Jean-Paul Riopelle (1923-2002)
Provenant de l'ancienne collection de Maurice Rheims, Paris
Jean-Paul Riopelle (1923-2002)

Sans titre

Details
Jean-Paul Riopelle (1923-2002)
Sans titre
huile sur toile
33 x 39.5 cm.
Peint en 1949-1950.

oil on canvas
13 x 15 ½ in.
Painted in 1949-1950.
Provenance
Maurice Rheims, Paris.
Collection particulière, Europe.

Brought to you by

Valentine LEGRIS
Valentine LEGRIS

Lot Essay

Cette œuvre est accompagnée d’un certificat d’authenticité d’Yseult Riopelle.

« Mes tableaux sont faciles à reconnaître. On croit voir des draps de lit sur lesquels un peintre en bâtiment aurait essuyé ses pinceaux »

“My pictures are easy to recognise. They look like bed sheets on which a house painter has just wiped his brushes”.

Jean Paul Riopelle

Ayant fait partie de la collection personnelle du commissaire-priseur et académicien français Maurice Rheims (1910-2003), Sans titre offre le spectacle d’un patchwork éblouissant de couleurs – jaune d’or, rouge coquelicot, lie-de-vin, blanc éclatant, vert forestier, bleu outremer ou cyan, rose et noir – entremêlées les unes aux autres en de courtes touches rapprochées et que viennent zébrer des drippings eux aussi multicolores. Condensées sur la petite surface de la toile, ces tonalités bigarrées engendrent une luminosité intense et une vibration singulière qui viennent happer le spectateur. Ayant autant à voir avec la peinture qu’avec la sculpture – le critique Patrick Waldberg les appelle ainsi « sculptures à l’huile » (Y. Riopelle, Jean Paul Riopelle. Catalogue raisonné 1939-1953. Tome 1, Montréal, 1999, p. 89), les œuvres réalisées à cette époque charnière des années 1949 et 1950 sont réalisées en appliquant le tube de peinture directement sur la toile, non pas par le bout mais par le milieu, éventrés, déversant leur pâte épaisse et onctueuse sur la surface du tableau. La richesse chromatique de ces œuvres fera dire à l’historien Pierre Descargues qu’« on croirait une catastrophe heureuse ; celle d’un camion de tubes de couleurs écrasé par une bombe » (Y. Riopelle, ibid., p. 89). Lorsqu’il réalise Sans titre, Riopelle vient tout juste de s’installer à Paris (il quitte le Canada en paquebot et accoste en France en décembre 1948). Il y fréquente dans un premier temps les Surréalistes – André Breton dira de lui qu’il est un « trappeur supérieur – desquels il se sentait proche du temps de sa formation au Canada. Très vite, cependant, son œuvre prend une orientation différente : « l’extraordinaire vigueur de Riopelle, ses prodigieuses réserves de passion, de fougue et de violence, qu’on devine impatientes à bondir et à se fixer en forêts de signes, annoncement un changement de route et un nouveau départ : de ses couleurs chargées d’orages, il fouette la toile inerte. […] Il y a chez lui cette originalité intense, cette sève débordante que rien ne peut endiguer » (P. Waldberg, Paru, décembre 1949, repris par Y. Riopelle, ibid., p. 89). Riopelle expose alors une première fois à la galerie Nina Dausset en 1949, puis en 1951 dans le cadre de l’exposition Véhémences confrontées, organisée par Michel Tapié, au cours de laquelle son travail est mis en perspective aux côtés notamment de peintres américains montrés pour la première fois à Paris : De Kooning, Russell et Pollock. Souvent comparé au maître américain de l’Action painting en raison de son emploi du dripping – ces giclées de peinture liquide projetées sur la toile – Riopelle se démarque pourtant nettement de ce dernier. Car si Pollock procède par arabesques, par circonvolutions, par courbes fluides qui s’entrelacent sur la toile sans se prolonger au-delà d’elle, Riopelle, lui, travaille par saillies, lance des traits qui scandent la surface de façon plus orthogonale, donnant un rythme, une direction à la matière, et qui débordent de la toile, faisant exploser l’espace du tableau vers l’extérieur, dans un all-over total dont Sans titre offre un exemple emblématique. La matière joue en outre un rôle plus important dans l’approche artistique du peintre canadien que dans celle de l’Américain : empâtements, épaisseurs, profondeurs et transparences occupent une place déterminante dans ses œuvres, faisant dire au critique Patrick Waldberg : « parfois la surface de la toile se filigrane d’un réseau de fibrilles échevelées, entrelacs arachnéens dont les teintes d’un raffinement extrême accentuent la somptuosité grave du fond, ici et là entrevu, et que modulent les splendeurs du ciel lunaire ou les éclats du plein soleil » (M. Waldberg, Riopelle vu par…, Paris, 2004, p. 14).

Untitled was part of the personal collection of the French auctioneer and academician Maurice Rheims (1910-2003). It presents a dazzling patchwork of colours – golden yellow, poppy red, deep purple, brilliant white, forest green, ultramarine or cyan, pink and black – intermingled in short, close dabs which criss-cross the artist’s similarly multicoloured “drippings”. Condensed on the small surface of thecanvas, these variegated shades produce an intense luminosity and an unusual vibrancy which grab the viewer’s attention. Considering them to have as much to do with painting as with sculpture, the critic Patrick Waldberg thus called them “sculptures in oils” (Y. Riopelle, Jean Paul Riopelle. Catalogue raisonné 1939-1953. Volume 1, Montreal, 1999, p. 89). The works produced during the artist’s key years 1949 and 1950 were created by applying the tube of paint directly to the canvas, not from the end of the tube but directly from the middle, disembowelled, spilling its thick, oily paste on the surface of the picture. Confronted by the wealth of colour in those works, the historian Pierre Descargues wrote “you’d think a happy accident had happened, as if a lorry full of tubes of coloured paint had been blown up by a bomb” (Y. Riopelle, ibid., p. 89). When he painted Untitled, Riopelle had just come to live in Paris (he left Canada by ship and arrived in France in December 1948). There, he first met the surrealists - André Breton called him a “superior trapper” – to whom he had felt close since his student days in Canada. However, his work soon took a different turn: “Riopelle’s extraordinary vigour, his prodigious reserves of passion, fre and violence, which seem impatient to leap forth and fix themselves in forests of signs, presage a change of route and a new start: with his storm-flled colours, he whips the inert canvas. { … } He has that intense originality, that rising sap which nothing can curb” (P. Waldberg, Paru, December 1949, reiterated by Y. Riopelle, ibid., p. 89). Riopelle exhibited for the first time at the Nina Dausset gallery in 1949 and then in 1951 as part of the Véhémences confrontées exhibition organised by Michel Tapié, where his work was hung alongside that of the American painters, shown in Paris for the first time, De Kooning, Russell and Pollock. Often compared with the American master of Action Painting because of his use of “dripping” – those squirts of paint projected at the canvas - Riopelle was clearly distinguished from Pollock because, while Pollock used arabesques, circumvolutions and fluid colours which intertwine on the canvas without extending beyond it, Riopelle worked in fits and starts, threw lines which scan the surface in a more orthogonal way, giving rhythm and direction to the material and overfowing from the canvas, making the space of the picture explode outwards with an “all over” efect of which Untitled is an emblematic example. The material also played a more important role in the Canadian painter’s approach than in that of the American: impasto, thicknesses, depths and transparencies occupied a primordial place in his works, leading the critic Patrick Waldberg to write “sometimes the surface of the canvas is broken into a network of tangled threads, spidery intertwinings, whose highly refned shades accentuate the severe sumptuousness of the background, glimpsed here and there, modulating the splendours of the moonlit sky or the splashes of full sunlight” (M. Waldberg, Riopelle vu par…, Paris, 2004, p. 14).

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