Lot Essay
Since that day in January 1979 when 'the colour black invaded the canvass', Soulages worked in 'outrenoir' (beyond black). It was no longer the colour itself which interested the artist, but rather the textures of the black - sometimes smooth, sometimes fibrous, sometimes in hollow-relief sometimes in bas-relief - and above all the light reflected by this geography of the canvass, which varies depending on the exposure, the lighting and the position of the spectator.
In the spring of 1986, Soulages was in Sète. The weather was good and the artist was outside with one of his canvasses, Peinture 222 x 421 cm, 30 septembre 1983. Again, the play of light with his 'outrenoir' would come as a revelation - the black reflected the blue of the sky and of the ocean. 'It was when I thought I could see a real blue in a canvass, although it was painted only with black, but had hints of an intense blue, that I wanted to mix a blue into it from the pigments of the paint.'* This revelation sparked a period lasting several years during which Soulages would use blue to intensify the light of his 'outrenoirs'. To do this, the artist first covered the canvass in an acrylic blue preparation, then used a brush to cover it in a thick black paste. Only afterwards, by scraping the surface with a blade, did the initial blue reappear here and there in a groove, as the material flowed back and forth. But even here blue is not considered in its own right, but rather for the light it gives out, the vibration it causes beyond the canvass. In a way, it is part of the chromatic continuity of the black and similarly challenges the very notion of colour.
In this canvass, dated 23rd September 1986, the double geometry - horizontal furrows along with vertical crevices to the top of the painting - sets a pace which emphasizes the plays of light and makes constant demands on the spectator's gaze. The presence of the blue is discreet and gives the work a soft and ethereal elegance, emblematic of Soulages's ideas regarding the alliance of black and blue: 'Bringing black and blue together is always quite sensual, it produces a certain frisson of pleasure.'**
*Olivier Paulio, "Les couleurs du noir: entretien avec Pierre Soulages", Soulages, peintures, Lausanne, Alice-Pauli gallery, 1990, p. 20
**Interview with Pierre Encrevé (September 1996), in Pierre Encrevé, Soulages. L'oeuvre complet. Peintures. III. 1979-1999, Paris, Seuil, 1998.
Depuis cette journée de janvier 1979 où 'la couleur noire avait envahi la toile', Soulages travaille l'outrenoir : ce n'est plus la couleur elle-même qui intéresse l'artiste, mais plutôt les textures du noir, tantôt lisses, tantôt fibreuses, quelquefois en creux, quelquefois en relief; et surtout la lumière qui naît de cette géographie de la toile, et qui varie selon l'exposition, la lumière, la position du regardeur.
Au printemps 1986, Soulages est à Sète. Il fait beau, l'artiste est dehors avec une de ses toiles, Peinture 222 x 421 cm, 30 septembre 1983. Cette fois encore, le jeu des lumières de son outrenoir va agir comme une révélation : le noir reflète le bleu du ciel et de l'océan. 'C'est lorsque j'ai cru voir un vrai bleu dans une toile, peinte pourtant avec du noir seul, mais qui avait les reflets d'un bleu intense, que j'ai eu envie d'y mêler un bleu venant des pigments de la peinture'. Cet évènement sera à l'origine d'une période de plusieurs années où Pierre Soulages utilisera le bleu pour intensifier la lumière de ses outrenoirs. Pour cela, l'artiste enduit d'abord la toile d'une préparation acrylique bleue, puis la recouvre à la brosse d'une épaisse pâte noire. Ce n'est qu'après, en raclant la surface avec une lame, que le bleu initial réapparaîtra çà et là, au gré des sillons, des flux et reflux de la matière. Pour autant, là encore, le bleu n'est pas considéré en tant que tel, mais davantage pour la lumière qu'il envoie, pour la vibration qu'il engendre au-delà de la toile. Il s'inscrit en quelque sorte dans la continuité chromatique du noir : comme lui, il oblige à penser autrement la notion même de couleur.
Dans cette toile datée du 23 septembre 1986, la double géométrie-stries horizontales mais également fissure verticale sur le haut du tableau engendre un rythme qui souligne les jeux de lumière et relance constamment le regard de l'observateur. La présence du bleu se fait discrète et confère à l'oeuvre une élégance douce et aérienne, emblématique des conceptions de Soulages quant à l'alliance du noir et du bleu : 'le rapprochement d'un noir et d'un bleu a toujours quelque chose d'assez sensuel, on s'y livre avec une certaine volupté'.
In the spring of 1986, Soulages was in Sète. The weather was good and the artist was outside with one of his canvasses, Peinture 222 x 421 cm, 30 septembre 1983. Again, the play of light with his 'outrenoir' would come as a revelation - the black reflected the blue of the sky and of the ocean. 'It was when I thought I could see a real blue in a canvass, although it was painted only with black, but had hints of an intense blue, that I wanted to mix a blue into it from the pigments of the paint.'* This revelation sparked a period lasting several years during which Soulages would use blue to intensify the light of his 'outrenoirs'. To do this, the artist first covered the canvass in an acrylic blue preparation, then used a brush to cover it in a thick black paste. Only afterwards, by scraping the surface with a blade, did the initial blue reappear here and there in a groove, as the material flowed back and forth. But even here blue is not considered in its own right, but rather for the light it gives out, the vibration it causes beyond the canvass. In a way, it is part of the chromatic continuity of the black and similarly challenges the very notion of colour.
In this canvass, dated 23rd September 1986, the double geometry - horizontal furrows along with vertical crevices to the top of the painting - sets a pace which emphasizes the plays of light and makes constant demands on the spectator's gaze. The presence of the blue is discreet and gives the work a soft and ethereal elegance, emblematic of Soulages's ideas regarding the alliance of black and blue: 'Bringing black and blue together is always quite sensual, it produces a certain frisson of pleasure.'**
*Olivier Paulio, "Les couleurs du noir: entretien avec Pierre Soulages", Soulages, peintures, Lausanne, Alice-Pauli gallery, 1990, p. 20
**Interview with Pierre Encrevé (September 1996), in Pierre Encrevé, Soulages. L'oeuvre complet. Peintures. III. 1979-1999, Paris, Seuil, 1998.
Depuis cette journée de janvier 1979 où 'la couleur noire avait envahi la toile', Soulages travaille l'outrenoir : ce n'est plus la couleur elle-même qui intéresse l'artiste, mais plutôt les textures du noir, tantôt lisses, tantôt fibreuses, quelquefois en creux, quelquefois en relief; et surtout la lumière qui naît de cette géographie de la toile, et qui varie selon l'exposition, la lumière, la position du regardeur.
Au printemps 1986, Soulages est à Sète. Il fait beau, l'artiste est dehors avec une de ses toiles, Peinture 222 x 421 cm, 30 septembre 1983. Cette fois encore, le jeu des lumières de son outrenoir va agir comme une révélation : le noir reflète le bleu du ciel et de l'océan. 'C'est lorsque j'ai cru voir un vrai bleu dans une toile, peinte pourtant avec du noir seul, mais qui avait les reflets d'un bleu intense, que j'ai eu envie d'y mêler un bleu venant des pigments de la peinture'. Cet évènement sera à l'origine d'une période de plusieurs années où Pierre Soulages utilisera le bleu pour intensifier la lumière de ses outrenoirs. Pour cela, l'artiste enduit d'abord la toile d'une préparation acrylique bleue, puis la recouvre à la brosse d'une épaisse pâte noire. Ce n'est qu'après, en raclant la surface avec une lame, que le bleu initial réapparaîtra çà et là, au gré des sillons, des flux et reflux de la matière. Pour autant, là encore, le bleu n'est pas considéré en tant que tel, mais davantage pour la lumière qu'il envoie, pour la vibration qu'il engendre au-delà de la toile. Il s'inscrit en quelque sorte dans la continuité chromatique du noir : comme lui, il oblige à penser autrement la notion même de couleur.
Dans cette toile datée du 23 septembre 1986, la double géométrie-stries horizontales mais également fissure verticale sur le haut du tableau engendre un rythme qui souligne les jeux de lumière et relance constamment le regard de l'observateur. La présence du bleu se fait discrète et confère à l'oeuvre une élégance douce et aérienne, emblématique des conceptions de Soulages quant à l'alliance du noir et du bleu : 'le rapprochement d'un noir et d'un bleu a toujours quelque chose d'assez sensuel, on s'y livre avec une certaine volupté'.