PAUL CEZANNE (1839-1906)
PROVENANT D'UNE IMPORTANTE COLLECTION PARTICULIÈRE FRANÇAISE
PAUL CEZANNE (1839-1906)

Etude de baigneuses

Details
PAUL CEZANNE (1839-1906)
Etude de baigneuses
huile sur toile
23.6 x 35.4 cm. (9¼ x 14 in.)
Peint vers 1902-06
Provenance
Ambroise Vollard, Paris.
Otto Wertheimer, Paris (acquis auprès de la Succession Vollard).
Acquis auprès de celui-ci par la famille du propriétaire actuel, avant novembre 1961.
Further Details
'STUDY FOR BATHERS'; OIL ON CANVAS.
Sale Room Notice
L'illustration au catalogue est légérement plus grande que l'original.
The illustration in the catalogue is slighlty larger than the original.

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Anika Guntrum
Anika Guntrum

Lot Essay

Conformement à l'opinion de Walter Feilchenfeldt, Jayne Warman et David Nash, cette oeuvre sera incluse au catalogue raisonné en ligne des peintures de Cézanne actuellemement en préparation sous leur direction.

La contribution de l'oeuvre de Paul Cézanne n'a pas d'égal dans l'histoire de l'Art et de la peinture du XXème siècle. Elle fut déterminante et laissa son empreinte sur des mouvements artistiques aussi fondamentaux que divers : le Cubisme, le Fauvisme, ou encore l'Abstraction. Traitant chaque aspect de ses compositions avec la mê me rigueur, se refusant á toute hiérarchisation de sujet, Cézanne fut á l'origine d'une nouvelle représentation de la perspective dont ses successeurs se servirent pour ouvrir les portes de l'Art Moderne.

"Cézanne allait seulement vers l'abstraction des corps naturels, car il ne voyait en eux que des surfaces et des volumes picturaux" K. Malevitch, De Cézanne au Suprématisme, Petrograd, 1920.

Ainsi, les célèbres séries des Natures Mortes aux Pommes, des Montagnes Sainte-Victoire et des Grandes Baigneuses - ces dernières constituant selon Philip Conisbee "le testament artistique de Cézanne " - sont aujourd'hui reconnues comme des chefs-d'oeuvre incontournables, "parmi les oeuvres d'art les plus difficiles [d'accès] et pourtant les plus puissantes de l'histoire du début du XXème siècle " (P. Conisbee, "l'Atelier des Lauves" in Cézanne en Provence, catalogue d'exposition, National Gallery, Washington et Musée Granet, Aix-en-Provence, 2006, p. 257).

Si la série des Grandes Baigneuses se compose de trois versions finales de grand format exécutées entre 1894 et la mort de l'artiste, en 1906, nous savons que Cézanne a consacré au "bain de femmes sous les arbres, dans un pré", ce "sujet qui le hantait", un certain nombre d'études ou ébauches.
La plupart sont des esquisses au crayon "qui ne quittaient pas le tiroir de sa commode, dans sa chambre, ou de sa table, dans son atelier ", témoignant de son opiniâtreté, voire d'un certain acharnement á traiter le thème (J. Gasquet, Cézanne, Paris, 1926, p. 55). A ce jour, il n'existe néanmoins qu'un nombre restreint d'études répertoriées reprenant la composition des version finales, avec notamment sept études á l'huile dont la présente version et un ensemble équivalent d'aquarelles, dont une large majorité est aujourd'hui détenue par des institutions publiques.


En traitant le thème des baigneurs dès les années 1870, puis celui des baigneuses une décennie plus tard, Cézanne s'inscrit dans la longue tradition mythologique et classique des XVIIème et XVIIIème siècles, qui place le nu dans des compositions de plein air, á la manière du Titien ou de Poussin. Mais si l'artiste semble trouver l'inspiration dans un thème classique, il en offre néanmoins une réinterprétation totale et très personnelle. En effet, il tente dans ces toiles d'atteindre l'harmonie parfaite, la fusion des figures et des éléments naturels, aussi bien au moyen des tons que des formes.
Si le débat reste ouvert du fait d'informations et de témoignages lacunaires et parfois contradictoires, Theodore Reff est parvenu á établir une chronologie d'exécution des trois versions des Grandes Baigneuses. Selon le lui, la version la plus ancienne, sur laquelle Cézanne travaille dès 1894, se trouverait á la Fondation Barnes (fig. 1), talonnée par celle de la National Gallery de Londres (fig.2), puis par la version aujourd'hui détenue par le Philadelphia Museum of Art (fig. 3), (T. Reff, "Painting and Theory in the Final Decade" in Cézanne. The Late Work, New York, 1977, pp. 38-44). En se basant sur cette chronologie, Reff constate une évolution nette de la composition au fil des toiles. D'une part, l'on assiste á une multiplication des baigneuses, passant du nombre de huit dans la version de Barnes á celui de quatorze dans la version de Philadelphie. D'autre part, leur répartition sur la toile évolue d'un arrangement en plusieurs groupes tendant á former un frise dans la première version, á deux groupes de forme pyramidale s'inscrivant dans l'architecture végétale dans la dernière. Enfin, les personnages perdent progressivement en importance au profit du paysage, qui dans la dernière version occupe une surface quasiment plus importante que le groupe des baigneuses.
Au regard de ces évolutions, il est possible d'établir un lien direct entre la présente étude et chacune des trois grandes versions. Tout d'abord, les baigneuses elles-mêmes, par leur nombre aussi bien que par leurs attitudes, évoquent nettement la première version du Dr Barnes, dans laquelle chacune peut se retrouver. La disposition générale des figures sur la toile, á mi-chemin entre la frise et les deux groupes pyramidaux, nous renvoie quant á elle la version intermédiaire détenue par la National Gallery. Enfin, l'importance accordée au paysage, aussi bien du fait de la surface qui lui est consacrée que par le soin particulier apporté aux tonalités de l'eau, du ciel et du feuillage, créant avec le plus grand minimalisme possible un effet de profondeur, la rapproche de la version de Philadelphie. L'ébauche d'architecture sur la rive opposée renvoie également á cette version, qui seul présente en arrière-plan l'église et le village.
Achetée en 1961 par le grand-père du propriétaire actuel auprès du marchand parisien Otto Wertheimer, cette huile n'a jamais été exposée depuis lors. Selon une lettre retrouvée dans la correspondance du collectionneur, Otto Wertheimer aurait lui-même acquis cette oeuvre auprès de la succession d'Ambroise Vollard au début des années cinquante. Cette provenance, limitée á trois propriétaires successifs, a contribué á conserver la fraîcheur de cette oeuvre, restée inconnue du grand public jusqu'á ce jour.





The contribution made by Paul Cézanne's work is unequalled in the history of 20th-century art and painting. It was pivotal and left its imprint on artistic movements which were as seminal as they were diverse: Cubism, Fauvism and Abstraction. Treating each aspect of his compositions with the same thoroughness, refusing to impose any hierarchy on his subjects, Cézanne was the source of a new representation of perspective which his successors would use to open the floodgates of Modern Art.

"Cézanne went solely towards the abstraction of natural bodies, since he saw in them only pictorial surfaces and volumes" K. Malevitch, De Cézanne au Suprématisme, Petrograd, 1920.

The famous series of Natures Mortes aux Pommes, Montagnes Sainte-Victoire and Les Grandes Baigneuses - the latter considered by Philip Conisbee to be "Cézanne's artistic legacy" - are now recognised as key masterpieces, "among the most difficult works of art [to access] and yet the most powerful in the history of the early 20th century" (P. Conisbee, "l'Atelier des Lauves" in Cézanne en Provence, exhibition catalogue, National Gallery, Washington and Musée Granet, Aix-en-Provence, 2006, p. 257).

While the series Les Grandes Baigneuses comprises three final large format versions produced between 1894 and the artist's death in 1906, we know that Cézanne undertook a number of studies and drafts of "women bathing beneath the trees, in a field", this "subject which haunted him".
"Most are pencil sketches which would not leave the chest-of-drawers in his bedroom or the draw of the table in his studio, testifying to his tenacity and even a certain determination to address the theme" (J. Gasquet, Cézanne, Paris, 1926, p. 55). There are currently only a small number of studies catalogued, however, that reflect the same composition as in the final versions, notably including seven studies in oil, including this version, and an equivalent set of watercolours, a large majority of which are now owned by public institutions.



By addressing the theme of male bathers on the 1870s, and then female bathers a decade later, Cézanne follows in the long 17th and 18th century tradition of mythology and Classicism, placing nudes in open-air compositions in the manner of Titian or Poussin. However, while the artist seems to find inspiration in a Classical theme, he nevertheless offers a complete and very personal reinterpretation of it. In these canvasses, he attempts to achieve perfect harmony, the merging of figures and natural elements, both through his use of tone and form.
While the debate continues, due to incomplete and sometimes contradictory information and testimony, Theodore Reff has managed to establish a chronology for the execution of the three versions of Les Grandes Baigneuses. According to him, the oldest version, on which Cézanne worked from 1894, is held by the Barnes Foundation (fig. 1), followed by the version in the National Gallery in London (fig.2), and then the version currently help by the Philadelphia Museum of Art (fig. 3), (T. Reff, "Painting and Theory in the Final Decade" in Cézanne. The Late Work, New York, 1977, pp. 38-44). Based on this chronology, Reff observes a clear development in the composition over the course of the three paintings. Firstly, we see an increase in the number of bathers, from eight in the Barnes version to 14 in the Philadelphia version. Secondly, the distribution around the canvas changes, from an arrangement in several groups tending to form a frieze in the first version, to two pyramid-shaped groups, merging with the structure of the vegetation in the third. Finally, the figures gradually become less prominent in comparison with the landscape, which in the last version occupies almost more space than the group of bathers.
In respect of these developments, it is possible to establish a direct link between this study and each of the three large format versions. Firstly, the bathers themselves, both in terms of their number and poses, clearly evoke the first Dr Barnes version, in which each of them can be identified. The general arrangement of the figures on the canvas, meanwhile, halfway between the frieze and the two pyramid-shaped groups, alludes to the middle version owned by the National Gallery. Finally, the importance given to the landscape, both in terms of the space allocated to it and the special attention paid to the tonality of the water, sky and foliage, creating a feeling of depth with the greatest possible minimalism, is reminiscent of the Philadelphia version. The architectural outline on the far bank is also similar to that version, which is the only one to depict the church and the village in the background.
Purchased in 1961 by the grandfather of the current owner from Parisian dealer Otto Wertheimer, this oil has never been exhibited since. According to a letter found in the collector's correspondence, Otto Wertheimer acquired this work personally from the estate of Ambroise Vollard in the early 1950s. This provenance, limited to three successive owners, has contributed to preserving the freshness of this work, which has remained unknown to the general public until now.

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