Lot Essay
'J'aime tout. Mais la perspective me passionne. Pas cette perspective scientifique, mais celle retrouvée, faite de rythme, d'une musique Parvenir à suggérer un espace immense dans un petit morceau de toile !'
Maria Helena Vieira da Silva (L. Goldaine et P. Astier, Ces Peintres vous parlent, Paris, 1964, p. 190)
Lorsque son oeil rencontre cet espace aux multiples facettes, le spectateur se plaît à explorer l'infini dans une dimension inattendue. Peint en 1951, Composition donne à voir toute la substance du style en damiers de Vieira da Silva à l'orée de années 1950, déclinant 'dans la tension des rythmes à travers le carroyage des surfaces déconcertées par des verticales, les unes rigides, les autres onduleuses et comme animées [...] une sensation de détermination et d'angoisse.' (J.-F. Jaeger, Vieira da Silva : Monographie, 'Parcours : de l'angoisse métaphysique à la sérénité', Genève, 1993, p. 51).
Au-delà de la référence récurrente aux azulejos portugais, sa découverte de la peinture de Torres-Garcia en 1932 est déterminante pour l'artiste : démultiplié, déformé par la tension du squelette architectural, le carreau s'érige en élément organique de ses compositions. L'irrégularité du damier aux couleurs nuancées confère au tableau une qualité dynamique et spatialisante que l'on retrouve volontiers dans les oeuvres de Paul Klee : la diffraction des formes et la multiplication des points de vue magnifient la couleur et aspire le regard dans un espace aux possibilités infinies. Cette oeuvre traduit sans doute toute la richesse du langage pictural de Vieira da Silva, qui questionne la manière de voir, associe la mémoire et l'imaginaire à la perception.
Comme se plaisait à le rappeler Georges Duby, Vieira da Silva orchestre l'arrangement de ces formes selon une construction de perspective qui rappelle celle des camera du Quattrocento. Un événement de sa vie fut primordial dans l'élaboration de son style que l'on trouve dans Composition. En 1913, tandis qu'elle assiste à une représentation de Songe d'une nuit d'été de William Shakespeare, elle est charmée par la magie du décor qui joue sur des métamorphoses optiques. Composition exprime la maturité d'un travail quasi-scénographie dont les prémisses se font ressentir dans La Scala (1937) dont le tournoiement coloré de cet 'essaim de pupilles [symbolise] la tension et l'attention' portée sur la scène d'un thétre. (J.-F. Jaeger, ibid., 1993, p. 53). Composition révèle ainsi la 'vision multiple et une' de Vieira da Silva telle que l'évoquait René Char qu'elle rencontra en 1953. L'artiste affirme elle-mme sa singularité : 'Je voulais que les gens ne soient pas passifs. Je ne voulais pas de l'évidence' (M. H. Vieira da Silva, extrait d'une conversation avec Guy Weelen, 23 avril 1990).
Maria Helena Vieira da Silva (L. Goldaine et P. Astier, Ces Peintres vous parlent, Paris, 1964, p. 190)
Lorsque son oeil rencontre cet espace aux multiples facettes, le spectateur se plaît à explorer l'infini dans une dimension inattendue. Peint en 1951, Composition donne à voir toute la substance du style en damiers de Vieira da Silva à l'orée de années 1950, déclinant 'dans la tension des rythmes à travers le carroyage des surfaces déconcertées par des verticales, les unes rigides, les autres onduleuses et comme animées [...] une sensation de détermination et d'angoisse.' (J.-F. Jaeger, Vieira da Silva : Monographie, 'Parcours : de l'angoisse métaphysique à la sérénité', Genève, 1993, p. 51).
Au-delà de la référence récurrente aux azulejos portugais, sa découverte de la peinture de Torres-Garcia en 1932 est déterminante pour l'artiste : démultiplié, déformé par la tension du squelette architectural, le carreau s'érige en élément organique de ses compositions. L'irrégularité du damier aux couleurs nuancées confère au tableau une qualité dynamique et spatialisante que l'on retrouve volontiers dans les oeuvres de Paul Klee : la diffraction des formes et la multiplication des points de vue magnifient la couleur et aspire le regard dans un espace aux possibilités infinies. Cette oeuvre traduit sans doute toute la richesse du langage pictural de Vieira da Silva, qui questionne la manière de voir, associe la mémoire et l'imaginaire à la perception.
Comme se plaisait à le rappeler Georges Duby, Vieira da Silva orchestre l'arrangement de ces formes selon une construction de perspective qui rappelle celle des camera du Quattrocento. Un événement de sa vie fut primordial dans l'élaboration de son style que l'on trouve dans Composition. En 1913, tandis qu'elle assiste à une représentation de Songe d'une nuit d'été de William Shakespeare, elle est charmée par la magie du décor qui joue sur des métamorphoses optiques. Composition exprime la maturité d'un travail quasi-scénographie dont les prémisses se font ressentir dans La Scala (1937) dont le tournoiement coloré de cet 'essaim de pupilles [symbolise] la tension et l'attention' portée sur la scène d'un thétre. (J.-F. Jaeger, ibid., 1993, p. 53). Composition révèle ainsi la 'vision multiple et une' de Vieira da Silva telle que l'évoquait René Char qu'elle rencontra en 1953. L'artiste affirme elle-mme sa singularité : 'Je voulais que les gens ne soient pas passifs. Je ne voulais pas de l'évidence' (M. H. Vieira da Silva, extrait d'une conversation avec Guy Weelen, 23 avril 1990).