Félix Vallotton (1865-1925)
Ancienne collection Georges Renand
Félix Vallotton (1865-1925)

Les genêts en fleurs, Avallon

Details
Félix Vallotton (1865-1925)
Les genêts en fleurs, Avallon
signé et daté 'F.VALLOTTON.23' (en bas à droite)
huile sur toile
72.8 x 54 cm. (28¼ x 21¼ in.)
Peint en 1923
Provenance
Galerie Druet, Paris (acquis auprès de l'artiste en 1923).
Georges Renand, Paris (vers 1928).
Puis par descendance au propriétaire actuel.
Literature
C. Fegdal, "Amour de l'art, Félix Vallotton", in Beaux-Arts, mai 1933, p. 2.
F. Jourdain, Félix Vallotton, Genève, 1953, pl. 82 (illustré).
M. Ducrey, Félix Vallotton 1865-1925, L'oeuvre peint, catalogue raisonné, seconde partie: 1910-1925, Lausanne, 2005, vol. III, p. 798, no. 1515 (illustré).
Exhibited
Bruxelles, Galerie Georges-Giroux, IVe Salon annuel de la peinture française, octobre 1926, no. 150 (titré 'Bords du Cousin à Avallon').
Paris, Galerie Berhneim-Jeune, Félix Vallotton, mai 1933 (titré 'Pêcheur au bord du Cousin').
Zürich, Kunsthaus, Félix Vallotton 1865-1925, novembre-décembre 1938, no. 171.
Chartres, Chambre de commerce, Marquet et ses amis, juillet-septembre 1961, p. 15, no. 1 (titré 'Les bords du Cousin').
Genève, Galerie Jan Krugier, Bonjour, Monsieur Courbet, novembre 1967, p. 32, no. 19 (illustré; titré 'Paysage')
Further Details
'Les genêts en fleurs, Avallon'; signed and dated lower right; oil on canvas; painted in 1923.

Lot Essay

"Que la force créatrice se répande par tout mon être, qu'une forme substantielle jaillisse de mon coeur! Je ne fais que trembler et tâtonner. Mais je te connais nature, il faut que je te saisisse. Qu'il me tarde de te sentir aimante et fidèle, alors tu éclaireras toutes les forces de mon être, et mon étroite existence prendra des dimensions d'éternité" (notes de l'artiste sur un carnet de croquis, vers 1885-87, in M. Ducrey, Félix Vallotton 1865-1925, l'oeuvre peint,le peintre, Lausanne, 2005, vol. I, p. 165). Par ces quelques phrases écrites à tout juste vingt ans, Félix Vallotton résume toute la fascination qu'exercent sur lui la nature et sa représentation, sous-jacente dans chacun des innombrables paysages peints tout au long de sa carrière. Ce parisien d'adoption, éternel nostalgique de son enfance à la campagne, gardera toute sa vie un attachement et un respect profond pour la nature dans toute sa grandeur. Depuis ces jeunes années, il se livre ainsi à une véritable quête: celle de lui rendre hommage par sa peinture.
C'est à partir de 1920 qu'il semble toucher au but. En combinant les enseignements tirés de ses explorations artistiques passées, il accède enfin à la réalisation de ce qu'il pressent et appelle de ses voeux dès 1918 dans son Livre de raison: le paysage composé. Comme il l'explique dans son journal: "Je rêve d'une peinture dégagée de tout respect littéral de la nature, je voudrais reconstituer des paysages sur le seul secours de l'émotion qu'ils m'ont causée, quelques grandes lignes évocatrices, un ou deux détails, choisis, sans superstition d'exactitude d'heure ou d'éclairage. Au fond, ce serait une sorte de retour au fameux 'paysage historique'. Pourquoi pas ?" (cité in op. cit., p. 178). Vallotton est alors fortement influencé par Nicolas Poussin, dont certaines compositions inspirent directement ses toiles (fig. 1 et 2). De celui-ci, il hérite la technique du paysage recomposé en atelier mais aussi la volonté de reconstituer une nature somptueuse et impassible, par opposition à une condition humaine fragile et éphémère. De façon significative et à l'exemple du présent tableau, les rares personnages présents dans les paysages du peintre suisse semblent, comme dans les compositions tardives de Poussin, ne pas être le sujet principal du tableau, mais au contraire de simples faire-valoir de la nature luxuriante qui les entoure.
Une série offrant une nature particulièrement dense et majestueuse voit ainsi le jour dans les années 1920, dont fait partie Les genêts en fleurs, Avallon. Si l'usage des aplats cher au peintre est conservé pour la représentation des personnages et de la rive en premier plan, il procède par petites touches d'une variété infinie de verts pour traiter les feuillages, alors que la perspective se contracte. Ceci accentue le sentiment d'isolation des personnages dominés par une nature toute-puissante qui les enserre étroitement, bien que rien ne semble troubler leur quiétude. La langue de terre sur laquelle ils se trouvent comme prisonniers paraît bien mince, encadrée par les eaux agitées d'une part et par les buissons frémissants en surplomb de l'autre. Le ciel, dont seule une étroite bande est visible, est obstrué par les silhouettes sombres et menaçantes des arbres, qui semblent compromettre le retour des protagonistes à la civilisation. Comme l'écrivit Paul-Elie Gernez dans un article consacré aux paysages du peintre évoquant ce sentiment d'ascendant de la nature sur l'homme: "Spectateur, nous participons devant eux à leur métaphysique figurée et nous nous inclinons à notre insu sous leur emprise de choses muettes [...] Les paysages de Vallotton, comme ceux de Vigny, nous attendent dans un silence austère. Ils nous ramènent à la nature des choses et ils nous y incorporent" (cité in op. cit., p. 193).
Les genêts en fleurs, Avallon illustre à bien des égards les principes que Félix Vallotton applique à sa peinture et décrit en ces termes dans une lettre adressée le 26 juillet 1912 à un destinataire inconnu: "je peins autant que possible du premier coup. J'ignore le bitume et je considère le vernissage comme une opération administrative propre à mettre la responsabilité des conservateurs à couvert. Entre un tableau verni et un qui ne l'est pas il y a la même différence qu'entre un fruit dans un bocal et un qui est à sa branche" (cité in op. cit., p. 195). Le présent tableau offre ainsi une surface totalement mâte, où la notion de mouvement et de profondeur n'est accentuée par aucun verni mais seulement par la technique vibrante de l'artiste. Acquis vers 1928 par Georges Renand, propriétaire de plus d'une douzaine d'oeuvres de l'artiste, Les genêts en fleurs, Avallon fut préservé intact et selon la volonté de l'artiste durant près d'un siècle au sein de la collection familiale.
"May creative strength penetrate all my being, may substantial form spring from my heart! I can only tremble and stumble around. But I know you nature, I must hold you. How I long to feel you loving and faithful, you will then illuminate all the strengths within me and my narrow life shall take the dimensions of eternity" (artist's notes on a sketchbook, around 1885-1887, in M. Ducrey, Félix Vallotton 1865-1925, l'oeuvre peint, le peintre, Lausanne, 2005, vol. I, p. 165). With these few lines, written at just twenty years old, Félix Vallotton expresses all the fascination which nature and its representation hold for him, underlying each of the numerous landscapes painted all along his career. A Parisian by adoption, eternally longing for the country of his childhood, he retained throughout his life a deep attachment and respect for nature in all its grandeur. From his early years, he set off on a single quest: paying tribute to nature through his painting.
Around 1920, he seemed to attain his goal. Combining what he had learnt from his past artistic investigations, he finally reached the fulfillment of what he had sensed and wished for since 1918 in his
Livre de raison: the composed landscape. As he explained in his diary: "I dream of painting free from any literal respect of nature, I would like to reconstruct landscape, only with the help of the emotion it aroused in me, a few evocative lines, one or two details, selected without any superstition regarding exactness of time or light. It would be in fact a return to the "historical landscape". Why not?" (quoted in op. cit., p. 178). Vallotton was at the time strongly influenced by Nicolas Poussin, some of the latter's compositions directly inspiring Vallotton's paintings (fig. 1 and 2). He inherited from this master the technique of the landscape recomposed in the studio but also the will to recreate nature as sumptuous and impassive nature, in its opposition to the fragility and transience of human existence. Significantly, as in this painting, the rare figures in the Swiss painter's landscapes seem not to be the main subjects of the painting, but rather there only to highlight the lush nature surrounding them, as in Poussin's later works.
In the 1920s, Vallotton initiated a series depicting nature in a particularly rich and majestic manner, which included
Les genets en fleurs, Avallon (Brooms in flower, Avallon). He employed his prefered technique of solid colours to represent the figures and the bank on the foreground, but for the leaves and foliage, he used short strokes in infinite hues of green, and with these communicated a forshortening of persperctive. This increases the feeling of isolation of the figures dominated by an all-powerful nature, which encroaches on them, even though nothing seems to disturb their peace. The spit of land of which they seem prisoners appears very narrow, framed by troubled waters to one side and trembling overhanging bushes to the other. The sky, of which only a thin band is visible, is obstructed by the dark and threatening profiles of the trees, which seem to threaten the figures' return to civilisation. Paul-Elie Gernez wrote in an article about the painter's landscapes, evoking this feeling of domination of nature over man: "We take part in the figurative metaphysics of these mute elements and we bend unknowingly under their power [...] Vallotton's landscapes, as Vigny's, wait for us in austere silence. They bring us back to the nature of things and integrate us into it" (quoted in op. cit., p. 193).
Les genêts en fleurs, Avallon illustrates in many ways the principles which Félix Vallotton applied to his painting and described in a letter sent on 26 July 1912 to an unknown recipient: "I paint as much as possible in the first go. I never use bitumen and consider varnish as an administrative operation aimed at protecting curators. Between a varnished painting and one which isn't, there is the same difference as between a fruit in a jar and one on a branch" (quoted in op. cit., p. 195). The current work has an entirely mat surface; movement and depth are not highlighted by varnish, only by the vibrant technique of the artist. Les genêts en fleurs, Avallon was bought circa 1928 by Georges Renand, and kept for more than a century in the family collection, in the original condition intended by the artist.

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