Pierre Bonnard (1867-1947)
Ancienne collection Jacques Dupont
Pierre Bonnard (1867-1947)

La robe de chambre rouge ou Le corsage orangé (Marthe Bonnard)

Details
Pierre Bonnard (1867-1947)
La robe de chambre rouge ou Le corsage orangé (Marthe Bonnard)
signé 'Bonnard' (en haut à gauche)
huile sur toile
53.4 x 69 cm.
Peint en 1912

signed 'Bonnard' (upper left)
oil on canvas
21 x 27 ¼ in.
Painted in 1912
Provenance
Galerie Bernheim-Jeune, Paris (acquis auprès de l'artiste).
Alphonse Kahn, Saint-Germain-en-Laye (acquis auprès de celle-ci).
Vente, Me Lair-Dubreuil, Paris, 20 novembre 1922, lot 40 (titré 'La robe de chambre orange').
Eugène Blot, Paris (acquis au cours de cette vente); vente, Me Baudoin, Paris, 2 juin 1933, lot 33 (titré 'Femme assise dans un intérieur').
Collection Huet, Paris (acquis au cours de cette vente).
Jacques Dupont, Paris (en décembre 1940).
Puis par descendance au propriétaire actuel.
Literature
Le courrier européen, 23 mai 1913 (illustré; titré 'Étude de femme').
G. Coquiot, Les indépendants, 1884-1920, Paris, 1921, p. 78-79 (illustré).
G. Coquiot, Bonnard, Paris, 1922, p. 54 (titré 'La robe de chambre orangée').
L. Werth, Bonnard, Paris, 1923 (illustré, pl. 25).
A. Fage, Le collectionneur des peintures modernes, Paris, 1930, p. 252.
M.-T. Mauguis, in Arts, 25 juin 1955.
J. et H. Dauberville, Bonnard, Catalogue raisonné de l'œuvre peint, 1906-1919, Paris, 1968, vol. II, p. 247, no. 674 (illustré).
Exhibited
Paris, Galerie Bernheim-Jeune, Bonnard, Œuvres récentes, juin-juillet 1912, no. 15.
Paris, Galerie Bernheim-Jeune, Bonnard, Œuvres récentes, mai-juin 1913.
Paris, Galerie d'art Braun & Cie, Portraits de Pierre Bonnard, juin 1933, p. 4, no. 21 (titré ’Portrait de femme au turban’).
Paris, Galerie Frommont, La compagne du peintre, 1953.
Rotterdam, Museum Boymans-van Beuningen, Bonnard, 1953, no. 45 (daté 'vers 1910-11').
Paris, Maison de la Pensée française, Pierre Bonnard, été 1955, no. 20.
Munich, Haus der Kunst et Paris, Orangerie des Tuileries, Pierre Bonnard, Centenaire de sa naissance, octobre 1966-avril 1967, no. 75 (illustré).
Further Details
Dans La robe de chambre rouge ou Le corsage orangé, Pierre Bonnard représente son épouse, Marthe, vêtue d’un orange vif qui se dégage de l’arrière-plan rouge. Entre 1910 et 1920, l’artiste revisite le thème de la jeune femme, dans des états d’oisiveté où elle pose passivement, boit du thé ou prend un dessert, comme dans Jaune et rouge, 1915 (Dauberville, vol. II, no. 823, collection particulière) et Le café, 1915 (Dauberville, vol. II, no. 822, Tate Gallery, Londres). Dans cette composition qui place le modèle au premier plan, le peintre fond les motifs jaune orangé du corsage de Marthe dans l’arrière-plan vermillon - suggéré par de vifs coups de pinceau - faisant ainsi fusionner les contours de la silhouette avec le fond écarlate. Dans la présente œuvre, Marthe est l’élément central de la composition. Son regard oblique légèrement absent est direct et concentré, laissant au spectateur la liberté de l’examiner attentivement.
Le présent tableau, dans lequel Marthe s’accoude dynamiquement sur une table - à peine suggérée par des coups de pinceau multicolores et spontanés - témoigne de la virtuosité de Bonnard dans la représentation d’une scène domestique intimiste, genre adopté par l’artiste dès 1889. Dans une composition qui permet assurément à l’artiste de modeler les traits de sa muse à travers un jeu subtile d’ombre et de lumière, le bras de Marthe et son corsage lumineux absorbent la lumière qui pénètre dans la pièce, tandis que son visage est légèrement obscurci par la pénombre. Une pureté formelle se dégage des lignes vives verticales et horizontales du mur et de la petite table, à nouveau soulignée par le contraste entre les impasto clairs et les touches bleu profond, dispersées par l’artiste insistant ainsi sur le bras droit de Marthe et son regard absorbé.
Marthe commence à poser pour Bonnard à l’automne 1893, peu de temps après leur rencontre au printemps de cette même année à Montmartre. Née Maria Boursin, elle déménage à Paris en 1892, où elle travaille comme fleuriste. Elle se fait alors appeler Marthe de Méligny pour rompre avec son passé. Elle devient rapidement la compagne de Bonnard et son modèle quasi exclusif jusqu’à sa mort en 1942. En dépit du temps qui passe, ses traits restent figés dans une éternelle jeunesse sur les peintures de Bonnard. Comme le fait remarquer Annette Vaillant, «Bonnard a superposé les traits d’une femme-enfant à ceux d’une femme marquée par le temps» (cité in Bonnard, The Work of Art: Suspending Time, cat. exp., Paris, 2006, p. 104).
La robe de chambre rouge ou Le corsage orangé fut acquis par Jacques Dupont (1908-1988) en 1940 et est resté dans la même famille par descendance jusqu’à aujourd’hui. Passionné d'art, Jacques Dupont fut nommé inspecteur des Monuments Historiques, rattaché au Ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts en 1938. Il travaillera pendant la Seconde Guerre Mondiale auprès de Jacques Jaujard, directeur des Musées nationaux afin de sauvegarder et de mettre à l'abri de la destruction et du pillage les œuvres conservées au Musée du Louvre et au sein des musées nationaux.
C’est à l’occasion de la naissance de sa fille, née le 18 décembre 1940, que Jacques Dupont acquiert le présent tableau de Bonnard.
Il part en mission le 4 mai 1945 en Allemagne en tant qu’officier Beaux-Arts des Forces Françaises Libres dans la 1ère Armée française auprès notamment de Rose Valland, alors secrétaire de la Commission de Récupération Artistique.
En remerciement pour son travail pendant la guerre, Jacques Dupont se voit successivement promu entre 1945 et 1949 pour ensuite être nommé Inspecteur Général des Monuments Historiques et professeur à l’École des Beaux- Arts en 1957. En tant que président de la Société des Amis du Louvre, il permit par ailleurs l’enrichissement des collections du Musée du Louvre - avec notamment l’acquisition du tableau de Georges de La Tour, Saint Sébastien soigné par Irène - et organisa en outre de nombreuses expositions artistiques dans les plus prestigieuses institutions de Paris.

The present work depicts the artist’s wife, Marthe, in a vivid orange top and red background. Between 1910 and 1920, the artist revisited the theme of the young female, sitting passively, drinking tea or having dessert, in such examples as Jaune et rouge, 1915 (Dauberville, vol. II, no. 823, private collection) and Le café, 1915 (Dauberville, vol. II, no. 822, Tate Gallery, London). In this composition where the model is placed at the foreground, the orange-yellow motifs of Marthe’s blouse fuse with the vermilion background – executed with spontaneous brushstrokes – resulting in the silhouette’s outlines blending in with the scarlet background. In the present work, Marthe is the central compositional focus. Her slightly absent, oblique stare is direct and concentrated, leaving the viewer free to examine her intently.
The present painting is a wonderful example of an intimate domestic scene, a genre of painting adopted by the artist as early as 1889. Marthe vividly leans on her elbow on a table, which is barely suggested by colourful and spontaneous brushstrokes. This latter artistic device enables Bonnard to model her features through the contrast of light and shade. Her luminous arm and shirt absorb the sunlight streaming in, while her face is slightly obscured in semi-darkness. A formal purity is created through the strong vertical and horizontal lines of the wall and side table again evoked through the contrast of light impastos and deep blue touches scattered by the artist, hence underlining Marthe’s right arm and her captivated gaze.
Marthe began to model for Bonnard in the autumn of 1893, shortly after they met in the spring of that year in Montmartre. Born Maria Boursin, she moved in 1892 to Paris, where she worked as a flower arranger, and changed her name to Marthe de Méligny in a break with her past. She would quickly become Bonnard's companion and almost exclusive model until her death in 1942. Despite the passing years, her features became frozen in eternal youth in Bonnard's paintings, as Annette Valliant noted «Bonnard superimposed the features of the woman-child over those affected by time” (quoted in Bonnard, The Work of Art: Suspending Time, exh. cat., Paris, 2006, p. 104).
The present painting was acquired by Jacques Dupont (1908-1988) in 1940 and was passed down in his family until today. Fascinated by art, Jacques Dupont was appointed Inspector of Historic Monuments, reporting to the Ministry of Public Instruction and Fine Arts in 1938. During World War II, he helped Jacques Jaujard, named Director of National Museums in January 1940, safeguard artwork from the Louvre and national collections, which was stored away in various warehouses to escape the pillage and destruction.
It was to commemorate the birth of his daughter on 18 December 1940, that Jacques Dupont acquired this Bonnard painting.
On 4 May 1945, Jacques Dupont departed for a mission in Germany as a Fine Arts Officer for the Free French Forces in the First French Army commanded by General De Lattre de Tassigny, notably serving alongside Rose Valland, who was then secretary to the Commission for Art Recovery.
As a sign of gratitude for his efforts during the war, Jacques Dupont was successively promoted between 1945 and 1949, until his appointment as Inspector General of Historic Monuments and Professor at the École des Beaux-Arts in 1957. As president of the Société des Amis du Louvre, he also oversaw the enrichment of the Louvre’s collections with, in particular, the Georges de La Tour painting, Saint Sébastien soigné par Irène, and organised several art exhibitions in the most prestigious institutions of Paris.

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Tudor Davies
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