Provenant d'une collection particulière belge
James Ensor (1860-1949)
Gestes de nymphes
Details
James Ensor (1860-1949)
Gestes de nymphes
signé et daté 'Ensor 26' (en bas à gauche)
huile sur toile
96.9 x 110 cm.
Peint en 1926
signed and dated 'Ensor 26' (lower left)
oil on canvas
38 1/8 x 43 ¼ in.
Painted in 1926
Gestes de nymphes
signé et daté 'Ensor 26' (en bas à gauche)
huile sur toile
96.9 x 110 cm.
Peint en 1926
signed and dated 'Ensor 26' (lower left)
oil on canvas
38 1/8 x 43 ¼ in.
Painted in 1926
Provenance
Sam Salz, Paris et New York.
G. David Thompson, Pittsburgh.
Galerie Beyeler, Bâle.
Vente, Hauswedell & Nolte, Hambourg, 3 juin 1971, lot 421.
Christian Fayt Art Gallery, Knokke-Heist (après 1977).
Collection particulière, Belgique (avant 1981).
Madame Jean Krebs, Bruxelles.
Puis par descendance au propriétaire actuel.
G. David Thompson, Pittsburgh.
Galerie Beyeler, Bâle.
Vente, Hauswedell & Nolte, Hambourg, 3 juin 1971, lot 421.
Christian Fayt Art Gallery, Knokke-Heist (après 1977).
Collection particulière, Belgique (avant 1981).
Madame Jean Krebs, Bruxelles.
Puis par descendance au propriétaire actuel.
Literature
A. de Ridder, 'James Ensor' in Signaux de France et de Belgique, 1er mai 1921, p. 38-44 (illustré, pl. 48).
J. Janssens, Ensor, Paris, 1990, p. 92 (illustré en couleurs).
X. Tricot, James Ensor, Catalogue raisonné des peintures, 1902-1941, Paris, 1992, vol. II, p. 523, no. 551 (illustré).
F.-C. Legrand, Ensor, La mort et le charme, Un autre Ensor, Anvers, 1993, p. 55 et 176 (illustré en couleurs, pl. 42).
X. Tricot, James Ensor, Sa vie, son œuvre, Catalogue raisonné des peintures, Bruxelles, 2009, p. 369, no. 572 (illustré en couleurs).
J. Janssens, Ensor, Paris, 1990, p. 92 (illustré en couleurs).
X. Tricot, James Ensor, Catalogue raisonné des peintures, 1902-1941, Paris, 1992, vol. II, p. 523, no. 551 (illustré).
F.-C. Legrand, Ensor, La mort et le charme, Un autre Ensor, Anvers, 1993, p. 55 et 176 (illustré en couleurs, pl. 42).
X. Tricot, James Ensor, Sa vie, son œuvre, Catalogue raisonné des peintures, Bruxelles, 2009, p. 369, no. 572 (illustré en couleurs).
Exhibited
Bruxelles, Palais des Beaux-Arts, James Ensor, janvier-février 1929, p. 12, no. 318.
New York, Feigl Gallery, Ensor, 10 Oil-paintings exhibited for the first time in the United States, février 1953, no. 5 (titré 'Les baigneuses'; dimensions erronées).
Genève, Galerie Motte, Exposition James Ensor, mai-juillet 1966, no. 40 (titré 'Baigneuses').
Zurich, Kunsthaus et Anvers, Koninklijk Museum voor Schone Kunsten, James Ensor, mai-octobre 1983, p. 325 (illustré en couleurs).
Kobe, Museum of Modern Art et Kamakura, Museum of Modern Art, James Ensor, décembre 1983-février 1984, no. 84.
Bruxelles, Patrick Derom Gallery, Ensor, La mort et le charme, Un autre Ensor, avril-juin 1994.
New York, Feigl Gallery, Ensor, 10 Oil-paintings exhibited for the first time in the United States, février 1953, no. 5 (titré 'Les baigneuses'; dimensions erronées).
Genève, Galerie Motte, Exposition James Ensor, mai-juillet 1966, no. 40 (titré 'Baigneuses').
Zurich, Kunsthaus et Anvers, Koninklijk Museum voor Schone Kunsten, James Ensor, mai-octobre 1983, p. 325 (illustré en couleurs).
Kobe, Museum of Modern Art et Kamakura, Museum of Modern Art, James Ensor, décembre 1983-février 1984, no. 84.
Bruxelles, Patrick Derom Gallery, Ensor, La mort et le charme, Un autre Ensor, avril-juin 1994.
Further Details
Peinte en 1926, cette œuvre de James Ensor semble rompre avec l’iconographie habituelle de l’artiste ostendais, celle des masques macabres, des visages grimés et des natures mortes hétéroclites qui a fait sa renommée dès les années 1890. Dans cette toile aux teintes pastel, le peintre représente un groupe de nymphes batifolant dans un paysage aussi éblouissant que vaporeux. Ensor, qui passe son existence sur les rivages de la mer du Nord, s’avoue en effet fasciné par la lumière et ses effets autant que par la mer. Refusant catégoriquement l’affiliation au mouvement impressionniste, il partage pourtant avec ce courant la même obsession pour la lumière. Qu’elle croisse, décroisse, se fasse tantôt révélatrice d’ombres, tantôt triomphante jusqu’à l’aveuglement comme dans la présente œuvre, elle est au cœur de son travail tout au long de sa carrière. Reprenant un schéma de composition classique dans son œuvre, Ensor articule son arabesque de nus autour d’un puits de lumière selon un axe tourbillonnant: le regard du spectateur est en effet guidé par une ligne partant du paon à gauche vers les nymphes flottant plus haut, puis redescendant jusqu’à la naïade à la chevelure bleue, pour repartir vers la gauche et remonter en diagonale au centre de la toile. «La forme de la lumière, les déformations qu’elle fait subir à la ligne n’ont pas été comprises avant moi», affirme-t-il en 1899 (J. Ensor, Les Écrits de James Ensor, Bruxelles, 1944). Dans la fantasmagorie naïve qui se joue sous nos yeux, c’est bien la lumière en tant que telle que semble chercher à capter le peintre. A l’instar d’Edvard Munch et son Soleil une dizaine d’années plus tôt (fig. 2), Ensor tente de rendre visible la source-même de la lumière plutôt que ses réflexions, par l’emploi de ce blanc éclatant dans toute la partie centrale de la toile. Autour, la palette se limite à du rose pâle, des touches de rouge, du bleu céruléen et du vert d’eau, rendant l’atmosphère de la scène à la fois comme ruisselante et nacrée.
Cette œuvre étonne par son thème classique, celui des nymphes dont l’on pourrait presque entendre au loin le rire cristallin. La toile est ainsi imprégnée du souffle de maîtres plus anciens. Si l’influence des ciels de Turner dans l’Œuvre d’Ensor est largement reconnue, la composition générale en voûte de la présente huile, avec ces anges profanes en apesanteur, rappelle celle des plafonds et fresques baroques (fig. 3). En outre, le peintre belge reprenait déjà un an plus tôt, en 1925, le sujet des fêtes galantes en s’inspirant des œuvres rococos de Watteau, comme dans Le Jardin d’amour (fig. 1) ou Le Parc aux mirages (1937).
Ainsi, dans ce décor onirique autour d’un lac merveilleux, Ensor opère un mélange subtil de traditions. Au milieu de cette population de divinités, un mage aux airs asiatiques se dresse, lui aussi comme happé par les nuées. Par un syncrétisme discret, l’artiste insuffle des réminiscences de son goût pour les chinoiseries et l’association de sujets bigarrés. Dès lors, cette scène toute en grâce et virtuosité apparaît comme une parodie du genre mythologique. Cette nouvelle farce est d’ailleurs scellée par la réponse de James Ensor au questionnaire de Proust: «La couleur que je préfère? Cuisse de nymphe émue, rouge anglais, postérieur de macaque roséolé». Cette affirmation se fait performative dans la présente œuvre, où certaines nymphes toutes roses flottent dans des positions absurdes, tandis que deux oiseaux picorent la peau de la jeune femme allongée derrière le paon. Le grincement s’insinue alors dans la toile, et laisse entrevoir derrière ce décor naïf le rire amusé du peintre.
Painted in 1926, this work by James Ensor seems to break with the Ostend artist’s usual iconography, that of the macabre masks, made-up faces and eclectic still lives that made him famous in the 1890s. In this pastel-hued canvas, the painter depicts a group of nymphs frolicking in a landscape that is equally dazzling and hazy. Ensor, who spent his days along the shores of the North Sea, admitted that he was equally fascinated by the light and its effects as by the sea. Although he categorically refused any affiliation with the Impressionist movement, he shared the Impressionists’ obsession with light. Whether it intensifies, fades, sometimes reveals shadows, other times blazes with a blinding force, as in the present work, it lies at the heart of his work throughout his career. Depicting a classical scene in his work, Ensor positions his arabesque of nudes swirling around a shaft of light: the viewer's gaze is guided by a line stretching from the peacock on the left to the nymphs floating higher up, then dropping down to the blue-haired Naiad to move back leftwards and rise diagonally to the centre of the canvas. “The shape of light and how it deforms line was not understood before me,” he said in 1899. (J. Ensor, Les Écrits de James Ensor, Brussels, 1944.). In the naive phantasmagoria unfolding before our eyes, it is indeed light as such that the painter strives to capture. As had been the case for Edvard Munch and his Sun about a decade earlier (fig. 2), Ensor attempts to make visible the very source of light rather than its reflections, by applying this radiant white to the entire central part of the canvas. Around it, the palette is limited to light pink, touches of red, cerulean blue and sea-green, depicting a scene with an atmosphere that is both rippling and pearly.
This work is surprising for its classic theme, that of nymphs whose crystalline laughter we can almost hear from afar. As such, the canvas is infused with the spirit of older masters. Although the influence of Turner’s skies on Ensor’s work has been widely acknowledged, the general vaulted composition of this oil, with its weightless, profane angels, evokes that of Baroque ceilings and frescoes (fig. 3). Moreover, one year earlier in 1925 the Belgian artist had already taken up the subject of fêtes galantes, drawing inspiration from the rococo works of Watteau, as in Le Jardin d’amour (fig. 1) and Le Parc aux mirages (1937).
Ensor subtly merges traditions in this dreamlike setting around a magnificent lake. Amidst this divine population emerges an Asian-looking magician who also appears to be snatched from the clouds. Through discreet syncretism, the artist instils the work with reminders of his taste for Chinoiseries and the combination of variegated subjects. Gracious and virtuous, this scene then emerges as a parody of the mythological genre. This new farce is confirmed by James Ensor’s response to the Proust questionnaire: “My favourite colour? Thigh of excited nymph, English red, a macaque’s rose-coloured posterior”. This affirmation is fully expressed in the present work, where some pink nymphs float in absurd positions, while two birds peck the skin of the young woman lying behind the peacock. An irony is thus insinuated in the canvas, suggesting the painter’s amused laugh behind this naive scene.
Cette œuvre étonne par son thème classique, celui des nymphes dont l’on pourrait presque entendre au loin le rire cristallin. La toile est ainsi imprégnée du souffle de maîtres plus anciens. Si l’influence des ciels de Turner dans l’Œuvre d’Ensor est largement reconnue, la composition générale en voûte de la présente huile, avec ces anges profanes en apesanteur, rappelle celle des plafonds et fresques baroques (fig. 3). En outre, le peintre belge reprenait déjà un an plus tôt, en 1925, le sujet des fêtes galantes en s’inspirant des œuvres rococos de Watteau, comme dans Le Jardin d’amour (fig. 1) ou Le Parc aux mirages (1937).
Ainsi, dans ce décor onirique autour d’un lac merveilleux, Ensor opère un mélange subtil de traditions. Au milieu de cette population de divinités, un mage aux airs asiatiques se dresse, lui aussi comme happé par les nuées. Par un syncrétisme discret, l’artiste insuffle des réminiscences de son goût pour les chinoiseries et l’association de sujets bigarrés. Dès lors, cette scène toute en grâce et virtuosité apparaît comme une parodie du genre mythologique. Cette nouvelle farce est d’ailleurs scellée par la réponse de James Ensor au questionnaire de Proust: «La couleur que je préfère? Cuisse de nymphe émue, rouge anglais, postérieur de macaque roséolé». Cette affirmation se fait performative dans la présente œuvre, où certaines nymphes toutes roses flottent dans des positions absurdes, tandis que deux oiseaux picorent la peau de la jeune femme allongée derrière le paon. Le grincement s’insinue alors dans la toile, et laisse entrevoir derrière ce décor naïf le rire amusé du peintre.
Painted in 1926, this work by James Ensor seems to break with the Ostend artist’s usual iconography, that of the macabre masks, made-up faces and eclectic still lives that made him famous in the 1890s. In this pastel-hued canvas, the painter depicts a group of nymphs frolicking in a landscape that is equally dazzling and hazy. Ensor, who spent his days along the shores of the North Sea, admitted that he was equally fascinated by the light and its effects as by the sea. Although he categorically refused any affiliation with the Impressionist movement, he shared the Impressionists’ obsession with light. Whether it intensifies, fades, sometimes reveals shadows, other times blazes with a blinding force, as in the present work, it lies at the heart of his work throughout his career. Depicting a classical scene in his work, Ensor positions his arabesque of nudes swirling around a shaft of light: the viewer's gaze is guided by a line stretching from the peacock on the left to the nymphs floating higher up, then dropping down to the blue-haired Naiad to move back leftwards and rise diagonally to the centre of the canvas. “The shape of light and how it deforms line was not understood before me,” he said in 1899. (J. Ensor, Les Écrits de James Ensor, Brussels, 1944.). In the naive phantasmagoria unfolding before our eyes, it is indeed light as such that the painter strives to capture. As had been the case for Edvard Munch and his Sun about a decade earlier (fig. 2), Ensor attempts to make visible the very source of light rather than its reflections, by applying this radiant white to the entire central part of the canvas. Around it, the palette is limited to light pink, touches of red, cerulean blue and sea-green, depicting a scene with an atmosphere that is both rippling and pearly.
This work is surprising for its classic theme, that of nymphs whose crystalline laughter we can almost hear from afar. As such, the canvas is infused with the spirit of older masters. Although the influence of Turner’s skies on Ensor’s work has been widely acknowledged, the general vaulted composition of this oil, with its weightless, profane angels, evokes that of Baroque ceilings and frescoes (fig. 3). Moreover, one year earlier in 1925 the Belgian artist had already taken up the subject of fêtes galantes, drawing inspiration from the rococo works of Watteau, as in Le Jardin d’amour (fig. 1) and Le Parc aux mirages (1937).
Ensor subtly merges traditions in this dreamlike setting around a magnificent lake. Amidst this divine population emerges an Asian-looking magician who also appears to be snatched from the clouds. Through discreet syncretism, the artist instils the work with reminders of his taste for Chinoiseries and the combination of variegated subjects. Gracious and virtuous, this scene then emerges as a parody of the mythological genre. This new farce is confirmed by James Ensor’s response to the Proust questionnaire: “My favourite colour? Thigh of excited nymph, English red, a macaque’s rose-coloured posterior”. This affirmation is fully expressed in the present work, where some pink nymphs float in absurd positions, while two birds peck the skin of the young woman lying behind the peacock. An irony is thus insinuated in the canvas, suggesting the painter’s amused laugh behind this naive scene.
Brought to you by
Anika Guntrum