Lot Essay
MESTROVIC
Ivan Meštrović (1883-1962) est né à Vrpolje en Dalmatie dans l’arrière-pays Croate. Issu d’une famille de paysans, il allait devenir le plus grand sculpteur croate du XXème siècle, principalement connu de son vivant pour ses sculptures figuratives, ses monuments et ses reliefs. Après son apprentissage dans un atelier de tailleur de pierre à Split, Meštrović part en Autriche à 17 ans pour étudier à l’Académie d’Art de Vienne. Il y est alors formé par les figures majeures de la Sécession Viennoise telles le sculpteur Edmund von Hellmer ou l’architecte Otto Wagner. Rejetant alors l’historicisme prôné par l’Académie, il rejoint le mouvement de la Sécession en 1906 et participe aux expositions durant lesquelles il rencontre beaucoup de succès. Le Puits de la Vie, considérée par Meštrović comme son œuvre la plus importante, date de cette période et se caractérise par la prédominance des thèmes symbolistes de l’amour, la vie et la mort. En plus d’une exposition au Victoria & Albert Museum à Londres, Meštrović devient le premier artiste vivant à se voir consacrer une exposition au Metropolitan Museum of Art à New-York.
UNE REDECOUVERTE
Prostrée, recroquevillée et désespérée après le départ de son amour, l’Abandonnée (Napuštena) est un magnifique exemple des premières œuvres de Meštrović. Dans cette œuvre, le physique, l’accentuation du réalisme et du caractère individuel reflètent l’influence d’Auguste Rodin avec qui Meštrović était devenu ami lorsqu’il étudiait à Vienne. Le contraste entre la vive torsion du buste et la douceur du modelé de la musculature illustre le chagrin d’amour et crée un jeu de lumière et de volume, de courbes et de lignes. Bien qu’influencée par les travaux impressionnistes de Rodin, l’Abandonnée est surtout caractéristique du travail de Meštrović.
Longtemps considéré comme perdue, notre sculpture apparait sur deux photographies avant d’entrer dans les collections de la reine Hélène de Montenegro puis de sa famille par succession, dans laquelle elle est restée pendant plus de cent ans et était affectueusement appelée ‘Marianne’. Une première fois en 1907 sur une photographie de l’atelier de l’artiste à Vienne (illustré), puis à nouveau en 1910 lors de la 35ème exposition de la Sécession Viennoise (illustré), durant laquelle elle était exposée sous le numéro 29 et intitulée Die Verlassene (marmor). Les deux photographies montrent notre sculpture telle qu'elle a été conçue à l'origine : avec une base carrée exécutée de manière non finito. Après cela, seule la monographie de l’artiste écrite par Ćurčin en 1919 fait référence à l’œuvre et la localise à Rome, alors même qu’elle se trouve déjà probablement dans les collections de la reine Hélène à la Villa Savoia, la résidence royale. Meštrović déménage à Rome en 1911 et participe à l’Exposition Internationale qui s’y déroule alors, et remporte le premier prix de Sculpture. Il est très probable que la Reine, elle-même originaire d’un pays slave, acheta l’œuvre directement auprès de l’artiste avec qui elle entretenait une longue relation d’amitié.
ELENA D'ITALIE
La fille du roi Nicolas I de Montenegro et de Milena Vukotović, la princesse Helene de Montenegro est devenue Reine d’Italie par son mariage avec le roi Victor-Emmanuel III d’Italie. Infirmière pendant la Première Guerre mondiale et mécène de nombreuses causes de charité, elle gagne en popularité dans son pays d’adoption et remporte la Rose d’Or, la plus importante récompense papale pour une souveraine catholique. Elle s’est aussi illustrée toute sa vie dans la lutte contre les maladies, et on lui attribue l’invention des photographies dédicacées qui étaient vendues afin de lever des fonds pour les causes qui lui étaient chères.
MESTROVIC
Born in the village of Vrpolje in the Dalmatian hinterland to a family of peasants, Ivan Meštrović (1883-1962) went to become Croatia’s greatest 20th century sculptor, acknowledged and acclaimed across the Western world during his own lifetime for his masterfully cut figurative sculptures, monuments and reliefs. Following his early apprenticeship in a local stone-cutter’s workshop in Split, Meštrović left for Austria aged 17 to complete his studies at the Vienna Academy of Art, where he received instruction from leading figures in the Vienna Secession movement such as the sculptor Edmund von Hellmer and architect Otto Wagner. Rejecting the Academy’s emphasis on Historicism, he joined the Secession in 1906 and participated in several of the Group’s celebrated Viennese exhibitions to great popular and critical acclaim. The Well of Life, regarded by Meštrović himself as his most important work, dates from this early period, which was characterized by a focus on the symbolist themes of love, life and death. In addition to a one-man show at the Victoria & Albert Museum in London, Meštrović became the first living artist in history to be honored with a one person show at the Metropolitan Museum of Art in New York.
THE REDISCOVERY OF AN EARLY WORK
Head-in-hand and contorting in despair following her lover’s desertion, Napuštena (Abandoned) is an outstanding example of Meštrović’s early work. Its emphasis on realism, individual character and physicality reflects the influence of Auguste Rodin, whom Meštrović had befriended while studying in Vienna. The sudden twisting movement of the torso and soft shaping of her tense musculature, which beautifully captures the physical strain of heartbreak, creates a forceful play of light and volume, curves and lines, which while strongly recalling the impressionistic works of Rodin, is uniquely Meštrović’s own.
Long thought lost, the present lot appears photographed twice before entering the collection of Queen Elena of Italy, in whose family it has remained by descent – lovingly referred to as 'Marianne' – for over 100 years: first in 1907, in the artist’s Viennese studio (illustrated), and then again in 1910, while exhibited at the 35th Vienna Secession exhibition (illustrated), where it was shown under no. 29 and titled Die Verlassene (marmor). Both photographs show our work as originally conceived, with a square base executed in the so-called non-finito manner. Thereafter, the only reference to the work appears in Ćurčin’s 1919 monograph on the artist, which records Napuštena in Rome, presumably already in Queen Elena’s personal collection at Villa Savoia, the royal residence. Meštrović moved to Rome in 1911 ahead of the international Exhibition held in the city that same year, where he won the first-place award for sculpture. It is therefore highly probable that the Queen – a fellow southern Slav – bought the work directly from the artist himself, with whom she is known to have formed a close and longstanding friendship.
ELENA OF ITALY
The daughter of King Nicolas I of Montenegro and Milena Vukotović, Princess Jelena of Montenegro (1873-1952) became Queen of Italy through her marriage to King Vittorio Emmanuelle III. Her charitable work as a nurse during World War I, and as patron to numerous charitable institutions, helped rapidly increase her popularity within her adoptive country and earned her the Golden Rose of Christianity, the most important honour for a Catholic lady at the time. A lifetime activist in the fight against disease, she is credited with the invention of the autographed photograph, which was sold at charity desks to raise funds for her causes.
Ivan Meštrović (1883-1962) est né à Vrpolje en Dalmatie dans l’arrière-pays Croate. Issu d’une famille de paysans, il allait devenir le plus grand sculpteur croate du XXème siècle, principalement connu de son vivant pour ses sculptures figuratives, ses monuments et ses reliefs. Après son apprentissage dans un atelier de tailleur de pierre à Split, Meštrović part en Autriche à 17 ans pour étudier à l’Académie d’Art de Vienne. Il y est alors formé par les figures majeures de la Sécession Viennoise telles le sculpteur Edmund von Hellmer ou l’architecte Otto Wagner. Rejetant alors l’historicisme prôné par l’Académie, il rejoint le mouvement de la Sécession en 1906 et participe aux expositions durant lesquelles il rencontre beaucoup de succès. Le Puits de la Vie, considérée par Meštrović comme son œuvre la plus importante, date de cette période et se caractérise par la prédominance des thèmes symbolistes de l’amour, la vie et la mort. En plus d’une exposition au Victoria & Albert Museum à Londres, Meštrović devient le premier artiste vivant à se voir consacrer une exposition au Metropolitan Museum of Art à New-York.
UNE REDECOUVERTE
Prostrée, recroquevillée et désespérée après le départ de son amour, l’Abandonnée (Napuštena) est un magnifique exemple des premières œuvres de Meštrović. Dans cette œuvre, le physique, l’accentuation du réalisme et du caractère individuel reflètent l’influence d’Auguste Rodin avec qui Meštrović était devenu ami lorsqu’il étudiait à Vienne. Le contraste entre la vive torsion du buste et la douceur du modelé de la musculature illustre le chagrin d’amour et crée un jeu de lumière et de volume, de courbes et de lignes. Bien qu’influencée par les travaux impressionnistes de Rodin, l’Abandonnée est surtout caractéristique du travail de Meštrović.
Longtemps considéré comme perdue, notre sculpture apparait sur deux photographies avant d’entrer dans les collections de la reine Hélène de Montenegro puis de sa famille par succession, dans laquelle elle est restée pendant plus de cent ans et était affectueusement appelée ‘Marianne’. Une première fois en 1907 sur une photographie de l’atelier de l’artiste à Vienne (illustré), puis à nouveau en 1910 lors de la 35ème exposition de la Sécession Viennoise (illustré), durant laquelle elle était exposée sous le numéro 29 et intitulée Die Verlassene (marmor). Les deux photographies montrent notre sculpture telle qu'elle a été conçue à l'origine : avec une base carrée exécutée de manière non finito. Après cela, seule la monographie de l’artiste écrite par Ćurčin en 1919 fait référence à l’œuvre et la localise à Rome, alors même qu’elle se trouve déjà probablement dans les collections de la reine Hélène à la Villa Savoia, la résidence royale. Meštrović déménage à Rome en 1911 et participe à l’Exposition Internationale qui s’y déroule alors, et remporte le premier prix de Sculpture. Il est très probable que la Reine, elle-même originaire d’un pays slave, acheta l’œuvre directement auprès de l’artiste avec qui elle entretenait une longue relation d’amitié.
ELENA D'ITALIE
La fille du roi Nicolas I de Montenegro et de Milena Vukotović, la princesse Helene de Montenegro est devenue Reine d’Italie par son mariage avec le roi Victor-Emmanuel III d’Italie. Infirmière pendant la Première Guerre mondiale et mécène de nombreuses causes de charité, elle gagne en popularité dans son pays d’adoption et remporte la Rose d’Or, la plus importante récompense papale pour une souveraine catholique. Elle s’est aussi illustrée toute sa vie dans la lutte contre les maladies, et on lui attribue l’invention des photographies dédicacées qui étaient vendues afin de lever des fonds pour les causes qui lui étaient chères.
MESTROVIC
Born in the village of Vrpolje in the Dalmatian hinterland to a family of peasants, Ivan Meštrović (1883-1962) went to become Croatia’s greatest 20th century sculptor, acknowledged and acclaimed across the Western world during his own lifetime for his masterfully cut figurative sculptures, monuments and reliefs. Following his early apprenticeship in a local stone-cutter’s workshop in Split, Meštrović left for Austria aged 17 to complete his studies at the Vienna Academy of Art, where he received instruction from leading figures in the Vienna Secession movement such as the sculptor Edmund von Hellmer and architect Otto Wagner. Rejecting the Academy’s emphasis on Historicism, he joined the Secession in 1906 and participated in several of the Group’s celebrated Viennese exhibitions to great popular and critical acclaim. The Well of Life, regarded by Meštrović himself as his most important work, dates from this early period, which was characterized by a focus on the symbolist themes of love, life and death. In addition to a one-man show at the Victoria & Albert Museum in London, Meštrović became the first living artist in history to be honored with a one person show at the Metropolitan Museum of Art in New York.
THE REDISCOVERY OF AN EARLY WORK
Head-in-hand and contorting in despair following her lover’s desertion, Napuštena (Abandoned) is an outstanding example of Meštrović’s early work. Its emphasis on realism, individual character and physicality reflects the influence of Auguste Rodin, whom Meštrović had befriended while studying in Vienna. The sudden twisting movement of the torso and soft shaping of her tense musculature, which beautifully captures the physical strain of heartbreak, creates a forceful play of light and volume, curves and lines, which while strongly recalling the impressionistic works of Rodin, is uniquely Meštrović’s own.
Long thought lost, the present lot appears photographed twice before entering the collection of Queen Elena of Italy, in whose family it has remained by descent – lovingly referred to as 'Marianne' – for over 100 years: first in 1907, in the artist’s Viennese studio (illustrated), and then again in 1910, while exhibited at the 35th Vienna Secession exhibition (illustrated), where it was shown under no. 29 and titled Die Verlassene (marmor). Both photographs show our work as originally conceived, with a square base executed in the so-called non-finito manner. Thereafter, the only reference to the work appears in Ćurčin’s 1919 monograph on the artist, which records Napuštena in Rome, presumably already in Queen Elena’s personal collection at Villa Savoia, the royal residence. Meštrović moved to Rome in 1911 ahead of the international Exhibition held in the city that same year, where he won the first-place award for sculpture. It is therefore highly probable that the Queen – a fellow southern Slav – bought the work directly from the artist himself, with whom she is known to have formed a close and longstanding friendship.
ELENA OF ITALY
The daughter of King Nicolas I of Montenegro and Milena Vukotović, Princess Jelena of Montenegro (1873-1952) became Queen of Italy through her marriage to King Vittorio Emmanuelle III. Her charitable work as a nurse during World War I, and as patron to numerous charitable institutions, helped rapidly increase her popularity within her adoptive country and earned her the Golden Rose of Christianity, the most important honour for a Catholic lady at the time. A lifetime activist in the fight against disease, she is credited with the invention of the autographed photograph, which was sold at charity desks to raise funds for her causes.