Details
Lyonel Feininger (1871-1956)
Diabolospielerinnen I
signé et daté 'Feininger 1909' (au revers); daté 'feb - mar. 1909' (sur le châssis)
huile sur toile
39.2 x 66.3 cm. (15 ½ x 26 in.)
Peint en février-mars 1909
Provenance
Atelier de l'artiste.
Collection Julia Feininger, New York (par succession).
Collection particulière, New York (par descendance).
Achim Moeller Fine Art Ltd., New York.
Collection particulière, États-Unis
Sotheby's, Londres, 3 février 2004, lot 12.
Literature
H. Hess, Lyonel Feininger, New York, 1959, p. 251, no. 37 (illustré).
W. Draeger, éd., Du 543, mai 1986, p. 22 (illustré en couleurs).
M. Faass, Lyonel Feininger und der Kubismus, Europäische Hochschulschriften, Reihe XXVIII, Band 33, Francfort, 1999, p. 35.
G. Finckh, 'Im Inneren ein Himmel von Schönheit' – Vorwort und Dank', in Feininger: Frühe Werke und Freunde, cat. exp., Bönen, 2006, p. 7–19.
P. Werner, Der Fall Feininger, Leipzig, 2006, no. 22, p. 26, 83, 236 (illustré en couleurs, p. 134).
A. Moeller, Lyonel Feininger: The Online Catalogue Raisonné of Paintings, no. 046 (illustré en couleurs).
Exhibited
New York, Acquavella Galleries et Washington, D.C., The Phillips Collection, Exposition Lyonel Feininger, octobre 1985-février 1986, no. 22 (illustré en couleurs).
New York, Achim Moeller Fine Art, Lyonel Feininger, From Old World to Cosmic Visions – Looking Back and Beyond: A Selection of Paintings, Drawings, and Watercolors Including Forty Carved and Painted Wooden Toys, novembre 1998-janvier 1999.
Hambourg, Hamburger Kunsthalle, Lyonel Feininger, Menschenbilder, Eine unbekannte Welt, octobre 2003-février 2004, p. 149, no. 60 (illustré en couleurs, p. 68).
Wuppertal, Von der Heydt-Museum, Feininger: Frühe Werke und Freunde, septembre-novembre 2006, p. 80 (illustré en couleurs).
New York, Whitney Museum of American Art et Montréal, The Montreal Museum of Fine Arts, Lyonel Feininger, At the Edge of the World, juin 2011-mai 2012, p. 251 (illustré en couleurs, p. 36, fig. 39).
Further Details
‘DIABOLOSPIELERINNEN I’; OIL ON CANVAS; SIGNED AND DATED; PAINTED IN FEBRUARY - MARCH 1909.
利奧尼·費寧格(1871-1956)-《扯鈴手I》,油彩、畫布,簽名及日期,1909年2月至3月作
Diabolospielerinnen I est l'une des rares et remarquables œuvres que Feininger réalise au cours de sa période de formation à la peinture. Après avoir travaillé durant quinze ans en tant que dessinateur de presse et connu un certain succès à Berlin et à Paris, Feininger ne se tourne vers ses pinceaux qu'en 1907, à l'âge de trente-six ans, le jour où il adapte à la peinture à l'huile l'une de ses planches humoristiques. Ce nouveau support lui permet de se frotter à des compositions plus audacieuses, plus risquées, et de prendre des libertés inédites avec les couleurs et leurs contrastes, dans le sillage des Fauves. Feininger ne se privera jamais pour autant des vertus du dessin, lui réservant au contraire une place toujours plus importante dans ses toiles des années à suivre.
La scène de Diabolospielerinnen I se déroule au cœur du Jardin du Luxembourg, à Paris. Feininger s'installe dans la capitale française en juillet 1906, pour y séjourner jusqu'en 1908. Il y loue un atelier au 242 boulevard Raspail. Fasciné par son atmosphère si particulière et ses résidents, l'artiste réalisera de nombreuses œuvres représentant aussi bien la bourgeoisie, élégante et distinguée, que les personnages excentriques qui arpentent les rues du quartier. La présente peinture s'attarde, au premier plan, sur une petite fille qui joue au diabolo, cet instrument en forme de bobine que l'on fait tourner et rebondir sur un fil relié à deux baguettes de bois. En toile de fond, deux autres amateurs de jonglage lui font écho. Le motif de la fille au diabolo apparaît par ailleurs dans une autre œuvre du peintre, Figuren in Abenddämmerung, datant de 1909. Feininger constelle la présente toile de personnages filiformes et élastiques, tout en aplats de couleurs vives, emblématiques de ses débuts maniéristes. L'artiste prend un plaisir palpable à représenter chacun de ses sujets de manière presque caricaturale – pratique bien entendu courante en illustration.
Cette palette vive, ces contrastes tranchants et ces traits emphatiques et colorés qui contournent chacun des éléments, comme s'ils avaient été collés un par un sur la surface de la toile, sont autant d'empreintes du talent d'illustrateur de Feininger. Une expérience qui lui offre certains avantages, le prédisposant notamment à créer une impression de profondeur de champ sans avoir à redoubler de détails ou à recourir à des effets de gradation de couleurs.
Dans sa monographie sur l'artiste, Hans Hess se penche de plus près sur ce procédé artistique: «La manière dont Feininger emploie la couleur est aussi directe que celle des Fauves, mais son choix de nuances est subtil et étrange. Les dissonances de sa palette sont plus douces et ses atmosphères plus oniriques. […] Sa peinture bannit toute participation émotionnelle; c'est une peinture du mouvement, de l'ici et du maintenant. Si la mise en scène est comique, il s'agit essentiellement d'une étude de l'espace et de la vitesse» (H. Hess, op. cit., p. 47-48).
À travers ces jeux de perspective et ces distorsions, alliés à l'excentricité des couleurs, Feininger transforme une scène autrement banale en un univers où l'étrange et le familier s'enchevêtrent et se confondent. Loin de l'atmosphère plus sereine, parfois même lugubre de certaines de ses œuvres de cette période, ici les courbes du chemin, et le galbe des vêtements et des chapeaux des personnages renvoient aux rotations vertigineuses du diabolo qui tournoie dans les airs, faisant de Diabolospielerinnen I un hymne au jeu, à l'espoir, à la jeunesse et à la vie.
Diabolospielerinnen I is one of Feininger’s rare and remarkable early works dating from the key formative period of his career as a painter. Having spent fifteen years working as a successful illustrator for periodicals in Berlin and Paris, Feininger only turned his attention to painting in 1907 at the age of 36, adapting one of his published cartoons into a composition in oil. With this new medium, he was able to take greater compositional risks, creating striking tonal contrasts and using daring color combinations in a similar manner to the Fauves. But Feininger would never completely abandon his allegiance to draftsmanship and increasingly emphasized its importance in his oil compositions over the next few years.
The scene of Diabolospielerinnen I is taking place in the Jardin de Luxembourg in Paris. Feininger moved to Paris in July 1906 where he stayed until 1908, renting a studio 242, Boulevard Raspail. Fascinated by its atmosphere and its citizens, Feininger executed a number of works representing the elegantly dressed bourgeoisie, as well as eccentric looking characters one encountered on the streets of Paris. The focus of the present painting is a girl in the foreground playing with a diabolo, a spool-shaped object balanced on a string that is attached at each end to a stick, her image echoed by two other diabolo players in the background. The motif of a girl with a diabolo also occurs in another painting of 1909, Figuren in Abenddämmerung. In the present work, the figures scattered across the composition in bright colour planes are with their elongated features typical of his early mannerist style. This approach allows Feininger to represent each figure as some sort of caricature, a practice that was common in the medium of illustration.
The choice of a vivid palette and striking tonal contrasts, as well as the sharp, bright outlining of the individual features that appear to be pasted onto the surface of the picture, are all derived from Feininger’s experience as an illustrator. It gave him a creative advantage when it came to rendering three-dimensional effects in his painting, as he was remarkably skilled in conveying spatial depth without having to rely on gradations of color or excessive details.
In his monograph about the artist, Hans Hess further explores Feininger's artistic process, "Feininger's use of color is as direct as that of the Fauve painters, but his choice of colors is subtle and strange. The color disharmonies are softer and the mood created more dreamlike. [...] The picture excludes emotional participation; it is a painting of movement and place. It is a comic scene, but essentially a study in space and speed." (H. Hess, op. cit., p. 47-48).
Through these pictorial devices of perspective and figural distortions, as well as eccentricities of colour, the artist transforms an otherwise mundane scene into a world where the strange and the familiar are inextricably wound. Unlike the more serene, even macabre atmosphere of some of Feininger’s works from this period, the curving form of the path and of the figures’ clothes and hats, alluding to the dizzying rotations of the diabolo ball after it has been cast into the air, Diabolospielerinnen I is a celebration of playfulness, youth, hope and life.