Lot Essay
Cette oeuvre est accompagnée d'un certificat d'authenticité de Madame Françoise Guiter.
« Mes sujets appartiennent au monde de la métamorphose ; à cet animal qui est plus qu'un animal - ce sont les créatures fantastiques d'une époque que nous sommes incapables de reconnaître, mais qui est la nôtre, le monde des formes intervient sans cesse au moment de la recherche et de l'observation ». Germaine Richier
“My subjects belong to the world of metamorphosis; to that animal which is more than an animal — these are fantastic creatures stemming from an era that we are unable to recognize, but which happens to be ours—the world of shapes constantly intervenes at the time of research and observation.” Germaine Richier
« Toutes mes sculptures partent d'une vérité organique. L'imagination a besoin de départ. On peut ainsi déboucher dans la poésie ». Germaine Richier
“All my sculptures stem from an organic truth. Imagination needs a start. Thus, we end are led into poetry." Germaine Richier
Le terrain d’expression de Germaine Richier est avant tout l’imaginaire. Frappée par la guerre, l’artiste donne à voir des créations hybrides, marquées par une altération profonde de la figure humaine, dont La Sauterelle se révèle particulièrement emblématique. Formée à l’Ecole des Beaux-Arts de Montpellier, puis auprès du maître sculpteur Antoine Bourdelle, Richier s’attèle tout au long de sa trajectoire à appliquer son apprentissage tout en surpassant ceux qui l’ont porté. Celle que ses amis appelaient « l’Ouragane », casse en effet les codes la sculpture de son temps. L’abstraction n’est pour elle qu’un instrument avec lequel elle façonne son champ lexical figuratif si singulier, volontiers expressionniste.
La Sauterelle fait partie d’un ensemble d’œuvres aussi appelé « les monstres » ou « les bêtes humaines ». À la frontière du réel et du rêvé, ces figures sortent tout droit du monde symbolique que veut construire Richier. Pétrifiée, cette créature mi-femme, mi-insecte renvoie le regardeur aux corps inertes de Pompéi et Herculanum, transformés en pierres volcaniques. De la même manière, la sauterelle se fige face à la fin de sa propre civilisation. Georges Limbour, lors de sa première visite chez Richier en 1948, est particulièrement frappé par la découverte de la « femme-sauterelle » : « Cet être imaginaire, en plâtre, était assis, presque accroupi, ses longs bras, terminés par de fortes mains menaçantes et ouvertes, soutenus par les puissants genoux des membres inférieurs. Il y avait dans son visage humain une expression ardente et tendue » (G. Limbour in « Visite à un sculpteur », Arts de France, n°17-18, 1948, p. 55).
Parallèlement, l’artiste provençale, par ses formes hybrides, interroge de façon inédite le genre. À une époque où ses contemporains sont quasi-exclusivement masculins, Richier pose la question de la sexualité de ses insectes femelles (araignée, sauterelle, mante, fourmi) et de la potentielle menace qu’elles peuvent représenter - une réflexion que prolongera par exemple Louise Bourgeois. Et si elle est la première artiste femme à bénéficier d’une rétrospective au Musée national d’art moderne de son vivant, en 1956, c’est précisément parce qu’elle a su forger une œuvre profondément humaine, en phase avec son temps : « L’artiste doit avoir son univers. Sinon il n’apporte rien. Il ne change la vision de personne. Les sculptures de Germaine Richier peuvent jouer ce rôle fatal. Elles bouleversent, elles irritent, elles surprennent, elles vivent » (A. Jouffroy in « Au musée d’Art moderne, Germain Richier », Arts, 10-16 oct. 1956, p.12).
Germaine Richier expressed herself principally through the world of fantasy. The war had a major impact on the artist and inspired her to create hybrid works with strikingly distorted human figures, La Sauterelle being a particularly iconic example. After attending the Montpellier Ecole des Beaux-Arts, Richier studied with master sculptor Antoine Bourdelle, and throughout her trajectory she focused on using everything she had learned while also surpassing those who had helped her along the way. Her friends called her the Hurricane, and she broke existing sculpture conventions. For Richier, abstraction was merely a tool with which she could shape her unique and resolutely expressionist figurative lexicon.
La Sauterelle was part of a set of works also known as “the monsters” or “the human insects”. Walking the line between reality and the dream world, these figures came straight from the symbolic world that Richier wanted to create. This petrified creature, half-woman, half-insect, brings to mind the lifeless bodies of Pompeii and Herculaneum, transformed by volcanic rock. Similarly, the grasshopper is immobilized at the prospect of the end of its own civilisation. Georges Limbour, after visiting Richier for the first time in 1948, was especially struck by the “woman-grasshopper”: “This imaginary being, cast in plaster, was seated, nearly crouching, with its long arms ending in open, menacing hands, supported by the powerful knees of the lower limbs. Its human face wore a tense, raging expression” (G. Limbour in “Visite à un sculpteur”, Arts de France, no. 17-18, 1948, p. 55).
At the same time, the Provençal artist was using her hybrids to examine gender in an unprecedented way. At a time when her contemporaries were almost exclusively male, Richier raised the question of the sexuality of her female insects (spiders, grasshoppers, mantises, ants) and the potential threat they may represent - a line of thinking that would be taken up by, for example, Louise Bourgeois. It was precisely because she succeeded in forging a profoundly human body of work in tune with its era that in 1956, Richier became the first living female artist to be honoured with a retrospective at the Musée National d’Art Moderne: “The artist must have their own universe. Otherwise they contribute nothing. They do not change anyone’s view. The sculptures of Germaine Richier can play this fateful role. They disrupt, they disturb, they surprise, they live” (A. Jouffroy in “Au Musée d’Art Moderne, Germain Richier”, Arts, 10-16 Oct. 1956, p.12).
« Mes sujets appartiennent au monde de la métamorphose ; à cet animal qui est plus qu'un animal - ce sont les créatures fantastiques d'une époque que nous sommes incapables de reconnaître, mais qui est la nôtre, le monde des formes intervient sans cesse au moment de la recherche et de l'observation ». Germaine Richier
“My subjects belong to the world of metamorphosis; to that animal which is more than an animal — these are fantastic creatures stemming from an era that we are unable to recognize, but which happens to be ours—the world of shapes constantly intervenes at the time of research and observation.” Germaine Richier
« Toutes mes sculptures partent d'une vérité organique. L'imagination a besoin de départ. On peut ainsi déboucher dans la poésie ». Germaine Richier
“All my sculptures stem from an organic truth. Imagination needs a start. Thus, we end are led into poetry." Germaine Richier
Le terrain d’expression de Germaine Richier est avant tout l’imaginaire. Frappée par la guerre, l’artiste donne à voir des créations hybrides, marquées par une altération profonde de la figure humaine, dont La Sauterelle se révèle particulièrement emblématique. Formée à l’Ecole des Beaux-Arts de Montpellier, puis auprès du maître sculpteur Antoine Bourdelle, Richier s’attèle tout au long de sa trajectoire à appliquer son apprentissage tout en surpassant ceux qui l’ont porté. Celle que ses amis appelaient « l’Ouragane », casse en effet les codes la sculpture de son temps. L’abstraction n’est pour elle qu’un instrument avec lequel elle façonne son champ lexical figuratif si singulier, volontiers expressionniste.
La Sauterelle fait partie d’un ensemble d’œuvres aussi appelé « les monstres » ou « les bêtes humaines ». À la frontière du réel et du rêvé, ces figures sortent tout droit du monde symbolique que veut construire Richier. Pétrifiée, cette créature mi-femme, mi-insecte renvoie le regardeur aux corps inertes de Pompéi et Herculanum, transformés en pierres volcaniques. De la même manière, la sauterelle se fige face à la fin de sa propre civilisation. Georges Limbour, lors de sa première visite chez Richier en 1948, est particulièrement frappé par la découverte de la « femme-sauterelle » : « Cet être imaginaire, en plâtre, était assis, presque accroupi, ses longs bras, terminés par de fortes mains menaçantes et ouvertes, soutenus par les puissants genoux des membres inférieurs. Il y avait dans son visage humain une expression ardente et tendue » (G. Limbour in « Visite à un sculpteur », Arts de France, n°17-18, 1948, p. 55).
Parallèlement, l’artiste provençale, par ses formes hybrides, interroge de façon inédite le genre. À une époque où ses contemporains sont quasi-exclusivement masculins, Richier pose la question de la sexualité de ses insectes femelles (araignée, sauterelle, mante, fourmi) et de la potentielle menace qu’elles peuvent représenter - une réflexion que prolongera par exemple Louise Bourgeois. Et si elle est la première artiste femme à bénéficier d’une rétrospective au Musée national d’art moderne de son vivant, en 1956, c’est précisément parce qu’elle a su forger une œuvre profondément humaine, en phase avec son temps : « L’artiste doit avoir son univers. Sinon il n’apporte rien. Il ne change la vision de personne. Les sculptures de Germaine Richier peuvent jouer ce rôle fatal. Elles bouleversent, elles irritent, elles surprennent, elles vivent » (A. Jouffroy in « Au musée d’Art moderne, Germain Richier », Arts, 10-16 oct. 1956, p.12).
Germaine Richier expressed herself principally through the world of fantasy. The war had a major impact on the artist and inspired her to create hybrid works with strikingly distorted human figures, La Sauterelle being a particularly iconic example. After attending the Montpellier Ecole des Beaux-Arts, Richier studied with master sculptor Antoine Bourdelle, and throughout her trajectory she focused on using everything she had learned while also surpassing those who had helped her along the way. Her friends called her the Hurricane, and she broke existing sculpture conventions. For Richier, abstraction was merely a tool with which she could shape her unique and resolutely expressionist figurative lexicon.
La Sauterelle was part of a set of works also known as “the monsters” or “the human insects”. Walking the line between reality and the dream world, these figures came straight from the symbolic world that Richier wanted to create. This petrified creature, half-woman, half-insect, brings to mind the lifeless bodies of Pompeii and Herculaneum, transformed by volcanic rock. Similarly, the grasshopper is immobilized at the prospect of the end of its own civilisation. Georges Limbour, after visiting Richier for the first time in 1948, was especially struck by the “woman-grasshopper”: “This imaginary being, cast in plaster, was seated, nearly crouching, with its long arms ending in open, menacing hands, supported by the powerful knees of the lower limbs. Its human face wore a tense, raging expression” (G. Limbour in “Visite à un sculpteur”, Arts de France, no. 17-18, 1948, p. 55).
At the same time, the Provençal artist was using her hybrids to examine gender in an unprecedented way. At a time when her contemporaries were almost exclusively male, Richier raised the question of the sexuality of her female insects (spiders, grasshoppers, mantises, ants) and the potential threat they may represent - a line of thinking that would be taken up by, for example, Louise Bourgeois. It was precisely because she succeeded in forging a profoundly human body of work in tune with its era that in 1956, Richier became the first living female artist to be honoured with a retrospective at the Musée National d’Art Moderne: “The artist must have their own universe. Otherwise they contribute nothing. They do not change anyone’s view. The sculptures of Germaine Richier can play this fateful role. They disrupt, they disturb, they surprise, they live” (A. Jouffroy in “Au Musée d’Art Moderne, Germain Richier”, Arts, 10-16 Oct. 1956, p.12).