Lot Essay
"Tout objet impose à la base une idée constructive. Avant toute idée constructive doit être parfaitement défini l’usage répondant à un besoin : la fonction".
Charlotte Perriand citée dans J. Barsac, Charlotte Perriand-Un art d'habiter, Norma, Paris, 2005, p. 30.
Au milieu des années 1930, Perriand commence à explorer les possibilités du bois massif comme matériau afin de réaliser ses nouveaux modèles, parmi lesquels la table à manger créée pour Paul et Ange Gutmann en 1935. Présentant un long plateau rectangulaire soutenu sur des colonnes massives à section ovoïde, cette table anticipe les caractéristiques du mobilier "En Forme", et révèle un utilitarisme élégant fondé sur l'appréciation respectueuse du mobilier traditionnel de Savoie, où elle avait passé beaucoup d'étés dans son enfance. Son appréciation des bois simples et traditionnels, tels que le chêne ou le sapin, s’associe à des formes et proportions résolument modernes sans précédent dans la conception de meubles. Les photographies prises dans l'atelier mansardé de Perriand à Montparnasse en 1938 offrent un aperçu révélateur de ses sensibilités créatives : trois simples chaises rustiques aux assises cannées, des plateaux en osier artisanaux et un vase de marguerites fraîchement cueillies habillent une table à manger remarquable par son épais plateau à six pans en pin. La table devient le centre de gravité du petit studio tout à la fois dynamique et apaisante.
Quand bien même il semble procéder d’un dessin intuitif, ce premier plateau de forme libre est en réalité méthodiquement étudié afin d’offrir des proportions optimales permettant d’assurer le confort de huit convives. La disposition des places permet de créer un mouvement particulier, une portion de la table sert au repas, l'autre de desserte. La distribution des hôtes tout autour du meuble provoque un échange atypique entre les personnes.
En 1939, avec Georges Blanchon, Perriand établit son bureau d'études au 18, rue Las Cases à Paris, pour lequel est créé son premier bureau « En Forme ». Avec un plateau de forme libre allongé, un tiroir suspendu et soutenu de trois pieds asymétriques - maintenant dans la collection du Centre Pompidou, Paris, sert de prototype à notre exemplaire. Comme en 38, le dessin asymétrique et galbé du plateau permet de rythmer l’espace de vides inattendus, si essentiels pour l’artiste. Elle ne tarde pas à l’appliquer à d’autres pièces, bahuts ou consoles comme celles de M. et Mme Coquatrix en 1950. Grâce à la forme libre, la créatrice transfigure le mobilier en sculptures fonctionnelles dont le trait est souvent inspiré d’un galet ou du contour d’une branche trouvée dans la nature.
"Every object is based on a constructive idea. Before any constructive idea, the use that meets a need must be clearly defined: the function."
Charlotte Perriand quoted in J. Barsac, Charlotte Perriand-Un art d'habiter, Norma, Paris, 2005, p. 30.
In the mid-1930s, Perriand began to explore the possibilities of solid wood as a material for her new designs, including the dining table created for Paul and Ange Gutmann in 1935. Featuring a long rectangular top supported by solid ovoid columns, this table anticipates the characteristics of the 'En Forme' furniture and reveals an elegant utilitarianism based on a respectful appreciation of the traditional furniture of Savoy, where she had spent many summers as a child. Her preference for simple, traditional woods, such as oak and fir, is combined with the modern shapes and proportions that were unprecedented in furniture design. Photographs taken in Perriand's attic studio in Montparnasse in 1938 offer a revealing glimpse of her creative sensibilities: three simple rustic chairs with cane seats, handmade wicker trays and a vase of freshly picked daisies adorn a dining table that is remarkable for its thick, six-sided pine top. The table is the focal point of the small studio and is both dynamic and soothing at the same time.
Although it appears to be an intuitive design, this first free-form tabletop was in fact methodically designed to offer optimal proportions to ensure the comfort of eight guests. The arrangement of the seats creates a particular movement; one part of the table is used for eating, the other for serving. The way the guests are distributed around the piece of furniture creates an atypical exchange between people.
In 1939, with Georges Blanchon, Perriand set up her design office at 18, rue Las Cases in Paris, for which she created her first 'En Forme' desk. With an elongated free-form top and a suspended drawer supported by three asymmetrical legs - now in the collection of the Centre Pompidou, Paris -, it served as the prototype for our example. As in 38, the asymmetrical, curved design of the top allows the space to be punctuated by unexpected voids, which were so important to the artist. She soon applied it to other pieces, sideboards and consoles such as those made for Mr and Mrs Coquatrix in 1950. Thanks to the free form, the designer transformed furniture into functional sculptures, the line of which was often inspired by a pebble or the contour of a branch found in nature.
Charlotte Perriand citée dans J. Barsac, Charlotte Perriand-Un art d'habiter, Norma, Paris, 2005, p. 30.
Au milieu des années 1930, Perriand commence à explorer les possibilités du bois massif comme matériau afin de réaliser ses nouveaux modèles, parmi lesquels la table à manger créée pour Paul et Ange Gutmann en 1935. Présentant un long plateau rectangulaire soutenu sur des colonnes massives à section ovoïde, cette table anticipe les caractéristiques du mobilier "En Forme", et révèle un utilitarisme élégant fondé sur l'appréciation respectueuse du mobilier traditionnel de Savoie, où elle avait passé beaucoup d'étés dans son enfance. Son appréciation des bois simples et traditionnels, tels que le chêne ou le sapin, s’associe à des formes et proportions résolument modernes sans précédent dans la conception de meubles. Les photographies prises dans l'atelier mansardé de Perriand à Montparnasse en 1938 offrent un aperçu révélateur de ses sensibilités créatives : trois simples chaises rustiques aux assises cannées, des plateaux en osier artisanaux et un vase de marguerites fraîchement cueillies habillent une table à manger remarquable par son épais plateau à six pans en pin. La table devient le centre de gravité du petit studio tout à la fois dynamique et apaisante.
Quand bien même il semble procéder d’un dessin intuitif, ce premier plateau de forme libre est en réalité méthodiquement étudié afin d’offrir des proportions optimales permettant d’assurer le confort de huit convives. La disposition des places permet de créer un mouvement particulier, une portion de la table sert au repas, l'autre de desserte. La distribution des hôtes tout autour du meuble provoque un échange atypique entre les personnes.
En 1939, avec Georges Blanchon, Perriand établit son bureau d'études au 18, rue Las Cases à Paris, pour lequel est créé son premier bureau « En Forme ». Avec un plateau de forme libre allongé, un tiroir suspendu et soutenu de trois pieds asymétriques - maintenant dans la collection du Centre Pompidou, Paris, sert de prototype à notre exemplaire. Comme en 38, le dessin asymétrique et galbé du plateau permet de rythmer l’espace de vides inattendus, si essentiels pour l’artiste. Elle ne tarde pas à l’appliquer à d’autres pièces, bahuts ou consoles comme celles de M. et Mme Coquatrix en 1950. Grâce à la forme libre, la créatrice transfigure le mobilier en sculptures fonctionnelles dont le trait est souvent inspiré d’un galet ou du contour d’une branche trouvée dans la nature.
"Every object is based on a constructive idea. Before any constructive idea, the use that meets a need must be clearly defined: the function."
Charlotte Perriand quoted in J. Barsac, Charlotte Perriand-Un art d'habiter, Norma, Paris, 2005, p. 30.
In the mid-1930s, Perriand began to explore the possibilities of solid wood as a material for her new designs, including the dining table created for Paul and Ange Gutmann in 1935. Featuring a long rectangular top supported by solid ovoid columns, this table anticipates the characteristics of the 'En Forme' furniture and reveals an elegant utilitarianism based on a respectful appreciation of the traditional furniture of Savoy, where she had spent many summers as a child. Her preference for simple, traditional woods, such as oak and fir, is combined with the modern shapes and proportions that were unprecedented in furniture design. Photographs taken in Perriand's attic studio in Montparnasse in 1938 offer a revealing glimpse of her creative sensibilities: three simple rustic chairs with cane seats, handmade wicker trays and a vase of freshly picked daisies adorn a dining table that is remarkable for its thick, six-sided pine top. The table is the focal point of the small studio and is both dynamic and soothing at the same time.
Although it appears to be an intuitive design, this first free-form tabletop was in fact methodically designed to offer optimal proportions to ensure the comfort of eight guests. The arrangement of the seats creates a particular movement; one part of the table is used for eating, the other for serving. The way the guests are distributed around the piece of furniture creates an atypical exchange between people.
In 1939, with Georges Blanchon, Perriand set up her design office at 18, rue Las Cases in Paris, for which she created her first 'En Forme' desk. With an elongated free-form top and a suspended drawer supported by three asymmetrical legs - now in the collection of the Centre Pompidou, Paris -, it served as the prototype for our example. As in 38, the asymmetrical, curved design of the top allows the space to be punctuated by unexpected voids, which were so important to the artist. She soon applied it to other pieces, sideboards and consoles such as those made for Mr and Mrs Coquatrix in 1950. Thanks to the free form, the designer transformed furniture into functional sculptures, the line of which was often inspired by a pebble or the contour of a branch found in nature.