Lot Essay
This monumental mirror displays the formal features of the end of the reign of Louis XIV and the beginning of the Régence period. It is based on the classic model of the large mirror with parcloses - bands defining compartments designed to increase the range of mirrors - at a time, the 17th century, when it was still impossible to obtain large pieces of mirror glass. But if the frames were usually made of carved and gilded wood, here they are made of chiselled and gilded bronze, which is much rarer for mirrors.
Our mirror can be compared to a body of work that is just as sublime and majestic. We know of a few examples, the richest of which have these bands made of verre églomisé (glass with gold leaf). One example is the magnificent mirror dated 1700-1710, now in the musée des Arts décoratifs in Paris (Inv. 26547, ill. S. Roche, G. Courage, P. Devinoy, Miroirs, Fribourg, 1985, p. 64). We find here a similar composition although the one in the Arts décoratifs is in carved and gilt wood and not in bronze like the present lot. It can also be compared to two mirrors from the Kunstgewerbemuseum in Dresden (Inv. 50501, ill. C. Ernek-van der Goes, "'En Bordure de glace marqueterie' - Verre églomisé mirror frames from the Royal Palace in Dresden", in Journal of Furniture History Society, vol. 52, 2016, pp. 36-39), with obvious similarities in style. Finally, as a comparison, it is worth mentioning the large Regency gilt-bronze mirror from the Hubert de Givenchy collection (Christie's sale, Monaco, 4 December 1993, lot 43) attributed to Charles Cressent. Slightly later than the present mirror, it has all the same elements: the bands, the corner ornaments, the sculpted pediment with a clasp motif at the top. These mirrors can be compared with the seven gilt bronze mirrors delivered to the Duke of Orleans (before 1724) for his residences in the Palais-Royal and Saint-Cloud. Among these there is mention "a mirror with a glass border and ornaments of ormolu with its capital also of glass and its ornaments of ormolu", the description of which is consistent with our mirror (although much smaller than ours). The use of gilt bronze on this piece from the early 17th century in Paris, probably inspired by the decorative style of Jean Bérain, Daniel Marot or Jean Lepautre, gives it great significance and opulence.
But it is also the impressive dimensions of this mirror that are striking, underlining the technical tour de force required to manufacture the mirrors (even if they may have been in several parts). The development of the glass industry was a major issue in the 17th century, well understood by Louis XIV and Colbert, who set out to develop glass factories. In 1665, a Royal mirror glass factory was created, with the help of Venetian workers, who were until then the only ones to produce large mirrors sold throughout Europe. The factory was a great success and of course participated in the decoration of the Palace of Versailles. But Colbert’s policies also supported other factories, starting with the Thévard factory in 1688, which moved to Saint-Gobain in 1692. In 1688, Bernard Perrot, of the royal glassworks in Orléans, received a royal patent for his process of casting glass in tables: "He invented a hitherto unknown means of casting crystal into tables, as is done with metals, giving it any colour one wishes, and even of making the said tables hollow, in the manner of camayeux, and of depicting portraits on them, engraving letters and all other kinds of figures, as well as making all kinds of bas-reliefs, cornices and mouldings. " (Mercure Galant, March 1687, p. 227). This process made it possible to cast mirror glass in sizes previously unknown: but the efforts of his competitors, especially Thévard, got the better of his invention, as Perrot was forbidden to use his process for mirror glass. Nevertheless, by the end of the reign of Louis XIV, the mirror glass industry had brought about great technical innovations that revolutionised the place of mirrors in 18th century interiors, and enabled France to supplant Venice in the export of mirrors.
Ce monumental miroir présente les caractéristiques formelles de la fin du règne de Louis XIV et du début de la Régence. Il reprend le modèle classique du grand miroir à parcloses, ces baguettes délimitant des compartiments imaginés pour augmenter la portée des glaces à une époque, le XVIIe siècle, où il était encore impossible d’obtenir du verre à miroir de grandes dimensions. Mais si d’ordinaire les encadrements sont en bois sculpté et doré, ils sont ici en bronze ciselé et doré, beaucoup plus rare pour la fabrication des miroirs.
Nous pouvons rapprocher notre miroir d’un corpus d’œuvres tout aussi sublimes et majestueuses. Nous connaissons notamment quelques exemples, dont les plus riches ont leurs parcloses en verre églomisé. Citons à titre d’exemple le somptueux miroir daté de 1700-1710 aujourd’hui conservé au Musée des Arts Décoratifs de Paris. (Inv. 26547, ill. S. Roche, G. Courage, P. Devinoy, Miroirs, Fribourg, 1985, p. 64.) Nous retrouvons ici une composition similaire bien que celui des Arts Décoratifs soit en bois sculpté et doré et non en bronze comme notre présent lot. De plus nous pouvons également le rapprocher de deux miroirs du Kunstgewerbemuseum de Dresde (Inv. 50501, ill. C. Ernek-van der Goes, « ‘En Bordure de glace marqueterie’ – Verre églomisé mirror frames from the Royal Palace in Dresden », in Journal of Furniture History Society, vol. 52, 2016, pp. 36-39.) dont les similitudes stylistiques sont flagrantes. Enfin, à titre de comparaison, il convient de mentionner le grand miroir Régence en bronze doré provenant déjà de la collection Hubert de Givenchy (vente Christie’s, Monaco, 4 décembre 1993, lot 43) attribué à Charles Cressent. Légèrement plus tardif que le présent miroir, il en reprend tous les éléments : les parcloses, les ornements d’angle, le fronton sculpté avec un motif en agrafe au sommet. Ces miroirs peuvent être mis en relation avec les sept miroirs en bronze doré livrés au duc d’Orléans (avant 1724) pour ses résidences du Palais-Royal et de Saint-Cloud. Parmi ces derniers est mentionné un miroir à bordure de glace et ornements de bronze doré d’or moulu avec son chapiteau aussi de glace et ses ornements de bronze doré d’or moulu dont la description est conforme à notre miroir (bien que les dimensions soient très inférieures au nôtre). L’emploi du bronze doré fait tout l’intérêt et la richesse de cet exemplaire qui remonte aux premières années au XVIIIe siècle à Paris, sans doute influencé par le style décoratif des Jean Bérain, Daniel Marot ou Jean Lepautre…
Mais ce sont aussi les dimensions impressionnantes de ce miroir qui interpellent, soulignant le tour de force technique nécessaire à la fabrication des glaces (même si elles purent être en plusieurs parties). Le développement de l’industrie des glaces fut un enjeu majeur au XVIIe siècle, bien compris par Louis XIV et Colbert, qui s’attachèrent à développer les manufactures de glaces. En 1665 fut créée la manufacture royale de glaces de miroirs, avec l’aide d’ouvriers vénitiens, jusqu’alors les seuls à produire des glaces de grandes dimensions vendues dans toute l’Europe. La manufacture connut un grand succès et participa bien sûr au chantier de décoration du château de Versailles. Mais l’État colbertien soutint aussi d’autres manufactures, à commencer par celle de Thévard, à partir de 1688, qui s’installa en 1692 à Saint-Gobain. En 1688, Bernard Perrot, de la verrerie royale d’Orléans reçut un brevet royal d’invention pour son procédé consistant à couler le verre en table : Il a inventé un moyen inconnu jusques à présent de couler le cristal en tables, comme on fait les métaux, luy donnant telle couleur que l’on veut, mesme de rendre lesdites tables creuses, à la manière des camayeux, et d’y représenter des portraits, d’y graver des lettres et toute autre sorte de figures, comme pareillement de faire toute sorte de bas-reliefs, corniches et moulures. (Mercure Galant, mars 1687, p. 227). Ce procédé permettait de couler le verre à miroir dans des proportions jusqu’alors inconnues : mais les efforts de ses concurrents, en particulier Thévard, eurent raison de son invention, car Perrot fut interdit d’utiliser son procédé pour les glaces de miroir. Toujours est-il que l’industrie des glaces de miroir, à la fin du règne de Louis XIV avait apporté de grandes innovations techniques qui ont révolutionné la place des miroirs dans les intérieurs au XVIIIe siècle, et avait permis à la France de supplanter Venise dans l’exportation des miroirs.
Our mirror can be compared to a body of work that is just as sublime and majestic. We know of a few examples, the richest of which have these bands made of verre églomisé (glass with gold leaf). One example is the magnificent mirror dated 1700-1710, now in the musée des Arts décoratifs in Paris (Inv. 26547, ill. S. Roche, G. Courage, P. Devinoy, Miroirs, Fribourg, 1985, p. 64). We find here a similar composition although the one in the Arts décoratifs is in carved and gilt wood and not in bronze like the present lot. It can also be compared to two mirrors from the Kunstgewerbemuseum in Dresden (Inv. 50501, ill. C. Ernek-van der Goes, "'En Bordure de glace marqueterie' - Verre églomisé mirror frames from the Royal Palace in Dresden", in Journal of Furniture History Society, vol. 52, 2016, pp. 36-39), with obvious similarities in style. Finally, as a comparison, it is worth mentioning the large Regency gilt-bronze mirror from the Hubert de Givenchy collection (Christie's sale, Monaco, 4 December 1993, lot 43) attributed to Charles Cressent. Slightly later than the present mirror, it has all the same elements: the bands, the corner ornaments, the sculpted pediment with a clasp motif at the top. These mirrors can be compared with the seven gilt bronze mirrors delivered to the Duke of Orleans (before 1724) for his residences in the Palais-Royal and Saint-Cloud. Among these there is mention "a mirror with a glass border and ornaments of ormolu with its capital also of glass and its ornaments of ormolu", the description of which is consistent with our mirror (although much smaller than ours). The use of gilt bronze on this piece from the early 17th century in Paris, probably inspired by the decorative style of Jean Bérain, Daniel Marot or Jean Lepautre, gives it great significance and opulence.
But it is also the impressive dimensions of this mirror that are striking, underlining the technical tour de force required to manufacture the mirrors (even if they may have been in several parts). The development of the glass industry was a major issue in the 17th century, well understood by Louis XIV and Colbert, who set out to develop glass factories. In 1665, a Royal mirror glass factory was created, with the help of Venetian workers, who were until then the only ones to produce large mirrors sold throughout Europe. The factory was a great success and of course participated in the decoration of the Palace of Versailles. But Colbert’s policies also supported other factories, starting with the Thévard factory in 1688, which moved to Saint-Gobain in 1692. In 1688, Bernard Perrot, of the royal glassworks in Orléans, received a royal patent for his process of casting glass in tables: "He invented a hitherto unknown means of casting crystal into tables, as is done with metals, giving it any colour one wishes, and even of making the said tables hollow, in the manner of camayeux, and of depicting portraits on them, engraving letters and all other kinds of figures, as well as making all kinds of bas-reliefs, cornices and mouldings. " (Mercure Galant, March 1687, p. 227). This process made it possible to cast mirror glass in sizes previously unknown: but the efforts of his competitors, especially Thévard, got the better of his invention, as Perrot was forbidden to use his process for mirror glass. Nevertheless, by the end of the reign of Louis XIV, the mirror glass industry had brought about great technical innovations that revolutionised the place of mirrors in 18th century interiors, and enabled France to supplant Venice in the export of mirrors.
Ce monumental miroir présente les caractéristiques formelles de la fin du règne de Louis XIV et du début de la Régence. Il reprend le modèle classique du grand miroir à parcloses, ces baguettes délimitant des compartiments imaginés pour augmenter la portée des glaces à une époque, le XVIIe siècle, où il était encore impossible d’obtenir du verre à miroir de grandes dimensions. Mais si d’ordinaire les encadrements sont en bois sculpté et doré, ils sont ici en bronze ciselé et doré, beaucoup plus rare pour la fabrication des miroirs.
Nous pouvons rapprocher notre miroir d’un corpus d’œuvres tout aussi sublimes et majestueuses. Nous connaissons notamment quelques exemples, dont les plus riches ont leurs parcloses en verre églomisé. Citons à titre d’exemple le somptueux miroir daté de 1700-1710 aujourd’hui conservé au Musée des Arts Décoratifs de Paris. (Inv. 26547, ill. S. Roche, G. Courage, P. Devinoy, Miroirs, Fribourg, 1985, p. 64.) Nous retrouvons ici une composition similaire bien que celui des Arts Décoratifs soit en bois sculpté et doré et non en bronze comme notre présent lot. De plus nous pouvons également le rapprocher de deux miroirs du Kunstgewerbemuseum de Dresde (Inv. 50501, ill. C. Ernek-van der Goes, « ‘En Bordure de glace marqueterie’ – Verre églomisé mirror frames from the Royal Palace in Dresden », in Journal of Furniture History Society, vol. 52, 2016, pp. 36-39.) dont les similitudes stylistiques sont flagrantes. Enfin, à titre de comparaison, il convient de mentionner le grand miroir Régence en bronze doré provenant déjà de la collection Hubert de Givenchy (vente Christie’s, Monaco, 4 décembre 1993, lot 43) attribué à Charles Cressent. Légèrement plus tardif que le présent miroir, il en reprend tous les éléments : les parcloses, les ornements d’angle, le fronton sculpté avec un motif en agrafe au sommet. Ces miroirs peuvent être mis en relation avec les sept miroirs en bronze doré livrés au duc d’Orléans (avant 1724) pour ses résidences du Palais-Royal et de Saint-Cloud. Parmi ces derniers est mentionné un miroir à bordure de glace et ornements de bronze doré d’or moulu avec son chapiteau aussi de glace et ses ornements de bronze doré d’or moulu dont la description est conforme à notre miroir (bien que les dimensions soient très inférieures au nôtre). L’emploi du bronze doré fait tout l’intérêt et la richesse de cet exemplaire qui remonte aux premières années au XVIIIe siècle à Paris, sans doute influencé par le style décoratif des Jean Bérain, Daniel Marot ou Jean Lepautre…
Mais ce sont aussi les dimensions impressionnantes de ce miroir qui interpellent, soulignant le tour de force technique nécessaire à la fabrication des glaces (même si elles purent être en plusieurs parties). Le développement de l’industrie des glaces fut un enjeu majeur au XVIIe siècle, bien compris par Louis XIV et Colbert, qui s’attachèrent à développer les manufactures de glaces. En 1665 fut créée la manufacture royale de glaces de miroirs, avec l’aide d’ouvriers vénitiens, jusqu’alors les seuls à produire des glaces de grandes dimensions vendues dans toute l’Europe. La manufacture connut un grand succès et participa bien sûr au chantier de décoration du château de Versailles. Mais l’État colbertien soutint aussi d’autres manufactures, à commencer par celle de Thévard, à partir de 1688, qui s’installa en 1692 à Saint-Gobain. En 1688, Bernard Perrot, de la verrerie royale d’Orléans reçut un brevet royal d’invention pour son procédé consistant à couler le verre en table : Il a inventé un moyen inconnu jusques à présent de couler le cristal en tables, comme on fait les métaux, luy donnant telle couleur que l’on veut, mesme de rendre lesdites tables creuses, à la manière des camayeux, et d’y représenter des portraits, d’y graver des lettres et toute autre sorte de figures, comme pareillement de faire toute sorte de bas-reliefs, corniches et moulures. (Mercure Galant, mars 1687, p. 227). Ce procédé permettait de couler le verre à miroir dans des proportions jusqu’alors inconnues : mais les efforts de ses concurrents, en particulier Thévard, eurent raison de son invention, car Perrot fut interdit d’utiliser son procédé pour les glaces de miroir. Toujours est-il que l’industrie des glaces de miroir, à la fin du règne de Louis XIV avait apporté de grandes innovations techniques qui ont révolutionné la place des miroirs dans les intérieurs au XVIIIe siècle, et avait permis à la France de supplanter Venise dans l’exportation des miroirs.