Lot Essay
« J'aimerais que tous les artistes vendent leurs empreintes digitales, ou bien qu'ils organisent des concours pour voir qui peut dessiner le trait le plus long, ou qu'ils vendent leur merde dans des boîtes de conserves ». - Piero Manzoni
"I should like all artists to sell their fingerprints, or else stage competitions to see who can draw the longest line or sell their shit in tins." - Piero Manzoni
Merda d'artista de Piero Manzoni figure parmi les actes artistiques les plus provocants et les plus sulfureux du XXe siècle. Poussant à l'extrême une réfexion radicale sur la mystique de l'artiste et l'aura dont on entoure son corps et son esprit, Manzoni a conçu quatre-vingt-dix boîtes de conserves étiquetées «Merde d'artiste, contenu gr 30 nets conservée au naturel, produite et mise en boîte au mois de mai 1961». La présente pièce porte le numéro douze; à l'origine, Manzoni voulait vendre ces œuvres au poids et avait indexé leur prix sur la valeur de l'or. Marquées par la pensée subversive et le discours esthétique caustique qui ont traversé l'ensemble de la carrière tragiquement écourtée de Manzoni, ces objets prennent le contre-pied de la notion de l'art comme phénomène sacré et désincarné avec une audace déconcertante. «Si les collectionneurs veulent quelque chose d'intime, quelque chose de vraiment personnel de la part de l'artiste, voilà la merde de l'artiste, voilà quelque chose qui est réellement à lui », écrivait-il (P. Manzoni, lettre à B. Vautier, décembre 1961).
De nombreux échantillons de la série ont été exposés à travers le monde au cours des soixante dernières années, et certains résident aujourd'hui dans des collections majeures comme le Centre Georges Pompidou, à Paris, la Tate de Londres ou le Museum of Modern Art de New York.
« La réification critique et métaphorique que Manzoni fait du corps de l'artiste, de ses processus naturels et de ses substances, nous invitent à concevoir le personnage de l'artiste et le produit de son corps comme un objet de consommation ». - Jon Thompson
Deux ans avant d'élaborer Merda d'artista, Manzoni avait fondé avec son ami Enrico Castellani la revue d'avant-garde Azimuth ainsi que la célèbre galerie du même nom. Figure de proue de l'art milanais des années 1960, il a infusé l'ensemble de sa pratique artistique d'un sens de l'humour conceptuel et frondeur qui le distingue de ses contemporains. Parallèlement à son travail sur les Achromes (série de créations incolores composées de matériaux aussi divers que le kaolin, le coton ou les petits pains), Manzoni était également fasciné par le rapport entre créativité et marchandise. Dans la veine de Merda d'artista, il a ainsi produit des œufs durs comestibles «signés» d'une empreinte de son pouce, ou des ballons gonfés avec son propre souffe. Ces projets résonnaient non seulement avec l'œuvre de Marcel Duchamp mais aussi avec l'approche d'Yves Klein, ce contemporain de Manzoni qui revendiquait le ciel bleu comme sa toute première œuvre d'art et vendait de l'air parisien aux collectionneurs. En mettant ses propres excréments à prix, Manzoni a mis en exergue notre propension à monétiser les traces qui indiquent la présence de l'artiste dans l'œuvre d'art. Un axe de réfexion que l'on retrouve au fondement même de mouvements ultérieurs, comme le Pop Art, le minimalisme ou l'art-performance.
Piero Manzoni’s Merda d’artista stands among the twentieth century’s most daring and provocative artistic statements. In a radical meditation upon the mythical aura surrounding the artist’s body and spirit, Manzoni produced 90 cans labelled ‘“Artist's Shit”, contents 30gr net freshly preserved, produced and tinned in May 1961’. The present work is inscribed with the number 12; the artist sold the cans at the time for the price of their weight in gold. Capturing the subversive wit and searing aesthetic commentary that defined Manzoni’s tragically brief oeuvre, the works offered an extraordinary riposte to the notion of art as a hallowed, disembodied phenomenon. ‘If collectors want something intimate, something truly personal from the artist, here is the artist’s shit, something truly his’, he wrote (P. Manzoni, letter to B. Vautier, December 1961). Widely exhibited over the last six decades, other examples from the series are held in major collections including the Centre Georges Pompidou, Paris, Tate, London and the Museum of Modern Art, New York.
"Manzoni's critical and metaphorical reification of the artist's body, its processes and products, pointed the way towards an understanding of the persona of the artist and the product of the artist's body as a consumable object." - Jon Thompson
Two years earlier, Manzoni had founded the pioneering journal Azimuth, and the accompanying Galleria Azimut, with his comrade Enrico Castellani. Working at the forefront of Milan’s avant-garde art scene, he embraced a radical conceptual humour across his practice that distinguished him from his contemporaries. Alongside his seminal series of Achromes—colourless creations formed from materials as diverse as kaolin, cotton wool and bread rolls—Manzoni was also fascinated by the relationship between creativity and commodity. As well as Merda d’artista, he produced edible hard-boiled eggs ‘signed’ with his thumbprint, and balloons inflated with his own breath. These projects resonated not only with the work of Marcel Duchamp, but also with that of Manzoni’s contemporary Yves Klein, who claimed the blue sky as his first artwork and famously sold Parisian air to patrons. By setting a price upon his own bodily waste, Manzoni threw into relief our propensity to valorise the trace of the artist’s presence in art. This line of thinking would come to form the basis of many movements that followed, including Pop Art, Minimalism and performance art.
"I should like all artists to sell their fingerprints, or else stage competitions to see who can draw the longest line or sell their shit in tins." - Piero Manzoni
Merda d'artista de Piero Manzoni figure parmi les actes artistiques les plus provocants et les plus sulfureux du XXe siècle. Poussant à l'extrême une réfexion radicale sur la mystique de l'artiste et l'aura dont on entoure son corps et son esprit, Manzoni a conçu quatre-vingt-dix boîtes de conserves étiquetées «Merde d'artiste, contenu gr 30 nets conservée au naturel, produite et mise en boîte au mois de mai 1961». La présente pièce porte le numéro douze; à l'origine, Manzoni voulait vendre ces œuvres au poids et avait indexé leur prix sur la valeur de l'or. Marquées par la pensée subversive et le discours esthétique caustique qui ont traversé l'ensemble de la carrière tragiquement écourtée de Manzoni, ces objets prennent le contre-pied de la notion de l'art comme phénomène sacré et désincarné avec une audace déconcertante. «Si les collectionneurs veulent quelque chose d'intime, quelque chose de vraiment personnel de la part de l'artiste, voilà la merde de l'artiste, voilà quelque chose qui est réellement à lui », écrivait-il (P. Manzoni, lettre à B. Vautier, décembre 1961).
De nombreux échantillons de la série ont été exposés à travers le monde au cours des soixante dernières années, et certains résident aujourd'hui dans des collections majeures comme le Centre Georges Pompidou, à Paris, la Tate de Londres ou le Museum of Modern Art de New York.
« La réification critique et métaphorique que Manzoni fait du corps de l'artiste, de ses processus naturels et de ses substances, nous invitent à concevoir le personnage de l'artiste et le produit de son corps comme un objet de consommation ». - Jon Thompson
Deux ans avant d'élaborer Merda d'artista, Manzoni avait fondé avec son ami Enrico Castellani la revue d'avant-garde Azimuth ainsi que la célèbre galerie du même nom. Figure de proue de l'art milanais des années 1960, il a infusé l'ensemble de sa pratique artistique d'un sens de l'humour conceptuel et frondeur qui le distingue de ses contemporains. Parallèlement à son travail sur les Achromes (série de créations incolores composées de matériaux aussi divers que le kaolin, le coton ou les petits pains), Manzoni était également fasciné par le rapport entre créativité et marchandise. Dans la veine de Merda d'artista, il a ainsi produit des œufs durs comestibles «signés» d'une empreinte de son pouce, ou des ballons gonfés avec son propre souffe. Ces projets résonnaient non seulement avec l'œuvre de Marcel Duchamp mais aussi avec l'approche d'Yves Klein, ce contemporain de Manzoni qui revendiquait le ciel bleu comme sa toute première œuvre d'art et vendait de l'air parisien aux collectionneurs. En mettant ses propres excréments à prix, Manzoni a mis en exergue notre propension à monétiser les traces qui indiquent la présence de l'artiste dans l'œuvre d'art. Un axe de réfexion que l'on retrouve au fondement même de mouvements ultérieurs, comme le Pop Art, le minimalisme ou l'art-performance.
Piero Manzoni’s Merda d’artista stands among the twentieth century’s most daring and provocative artistic statements. In a radical meditation upon the mythical aura surrounding the artist’s body and spirit, Manzoni produced 90 cans labelled ‘“Artist's Shit”, contents 30gr net freshly preserved, produced and tinned in May 1961’. The present work is inscribed with the number 12; the artist sold the cans at the time for the price of their weight in gold. Capturing the subversive wit and searing aesthetic commentary that defined Manzoni’s tragically brief oeuvre, the works offered an extraordinary riposte to the notion of art as a hallowed, disembodied phenomenon. ‘If collectors want something intimate, something truly personal from the artist, here is the artist’s shit, something truly his’, he wrote (P. Manzoni, letter to B. Vautier, December 1961). Widely exhibited over the last six decades, other examples from the series are held in major collections including the Centre Georges Pompidou, Paris, Tate, London and the Museum of Modern Art, New York.
"Manzoni's critical and metaphorical reification of the artist's body, its processes and products, pointed the way towards an understanding of the persona of the artist and the product of the artist's body as a consumable object." - Jon Thompson
Two years earlier, Manzoni had founded the pioneering journal Azimuth, and the accompanying Galleria Azimut, with his comrade Enrico Castellani. Working at the forefront of Milan’s avant-garde art scene, he embraced a radical conceptual humour across his practice that distinguished him from his contemporaries. Alongside his seminal series of Achromes—colourless creations formed from materials as diverse as kaolin, cotton wool and bread rolls—Manzoni was also fascinated by the relationship between creativity and commodity. As well as Merda d’artista, he produced edible hard-boiled eggs ‘signed’ with his thumbprint, and balloons inflated with his own breath. These projects resonated not only with the work of Marcel Duchamp, but also with that of Manzoni’s contemporary Yves Klein, who claimed the blue sky as his first artwork and famously sold Parisian air to patrons. By setting a price upon his own bodily waste, Manzoni threw into relief our propensity to valorise the trace of the artist’s presence in art. This line of thinking would come to form the basis of many movements that followed, including Pop Art, Minimalism and performance art.