Lucio Fontana (1899-1968)
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Lucio Fontana (1899-1968)

[Concetto spaziale]

Details
Lucio Fontana (1899-1968)
[Concetto spaziale]
signé 'l. fontana' (en bas à droite)
huile sur toile
46 x 38 cm.
Exécuté en 1961

signed 'l. fontana' (lower right)
oil on canvas
18 1⁄8 x 15 in.
Executed in 1961
Provenance
Studio Marconi, Milan.
Collection V. Corna, Milan.
Acquis auprès de celle-ci par le propriétaire actuel dans les années 1980.
Literature
E. Crispolti, Lucio Fontana, Catalogue raisonné des peintures, sculptures et environnements spatiaux, Bruxelles, 1974, vol. II, p. 112, no. 61 O 82 (illustré, p. 113).
E. Crispolti, Lucio Fontana, Catalogo generale, Milan, 1986, vol. I, no. 61 O 82 (illustré, p. 379).
E. Crispolti, Lucio Fontana, Catalogo ragionato di sculture, dipinti, ambientazioni, Milan, 2006, vol. II, no. 61 O 82 (illustré, p. 567).

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Lot Essay

‘Je perce un trou, l’infini le traverse’.
Lucio Fontana

Dans sa quête d’un langage visuel totalement inédit et adapté aux avancées scientifiques de son temps, Lucio Fontana mène au lendemain de la Seconde Guerre mondiale des expériences avec des gestes d’une radicalité nouvelle. Son Manifiesto Blanco de 1946 énonce les grandes lignes d’une vision qui consiste à créer, en définitive, un art fondé sur une ‘unité de temps et d’espace’ (Manifiesto Blanco, Buenos Aires, 1946). Toujours en accord avec ses théories spatialistes, les œuvres de Fontana vont dès lors défricher un territoire encore inexploré, quelque part entre peinture et sculpture. [Concetto spaziale] synthétise parfaitement cette approche révolutionnaire: exécuté en 1961, l’année même où Youri Gagarine effectuait son extraordinaire périple dans l’espace, ce tableau d’un jaune solaire, constellé d’entailles féroces et de perforations (les Buchi) semble ouvrir, lui aussi, de nouveaux horizons.

Les premiers Buchi font leur apparition dans l’œuvre de Fontana en 1949, marquant les débuts d’un iconoclasme insatiable. En pénétrant la surface a priori inviolable de la toile, l’artiste ouvre une brèche sans précédent, introduisant un espace véritable, un au-delà bien réel dans un domaine jusque-là purement bi-dimensionnel. Comme Gargarine franchissant l’atmosphère terrestre pour accéder à la dimension encore inconnue du cosmos, Fontana, en pénétrant le plan pictural, ouvre à son tour le champ des possibles. ‘Au moment où j’ai percuté la toile’, explique Fontana, ‘j’ai senti que j’avais fait un geste d’une grande importance. Ce n’était pas, à vrai dire, un trou accidentel, mais un trou bien conscient: en faisant un trou dans le tableau, j’avais découvert une nouvelle dimension dans le vide. En faisant des trous dans le tableau, j’ai inventé la quatrième dimension’ (L. Fontana, in P. Gottschaller, Lucio Fontana, The Artist’s Materials, Los Angeles, 2012, p. 21). Ne se résumant plus à une surface plane ni à un simple moyen de représenter le monde, le tableau devient alors un objet en lui-même, une manifestation concrète du monde lui-même.

D’un jaune très vif et d’une texture dense, [Concetto spaziale] est parsemé d’écorchures et d’incisions nerveuses. Conservée dans la même collection particulière depuis plus de quarante ans, cette œuvre fait partie des Olii (les ‘Huiles’), une série de toiles caractérisées par une épaisse couche de peinture monochrome et des empâtements très expressifs. Le tracé informe qui se découpe comme un îlot au centre de la toile revient souvent dans l’œuvre de Fontana: l’œuf est, à ses yeux, un puissant symbole de mort et de résurrection, du cycle de la vie, de l’unité de l’univers. ‘Mon art est tout porté sur cette pureté, sur cette philosophie du néant qui n’est pas un néant de destruction, mais un néant de création’ (L. Fontana, in ‘Interview with Carla Lonzi’, 10 octobre 1967, retranscrit dans Lucio Fontana, Sedici sculture 1937-67, cat. ex., Amedeo Porro Arte Moderna e Contemporanea, Milan, 2007, p. 35). Avec ces énigmatiques formes ovales qui se déploient telles des planètes ou des éléments topographiques, Fontana cherche à évoquer ‘le cheminement de l’homme dans l’espace, son angoisse et sa hantise de s’égarer’ (L. Fontana in B. Hess, Lucio Fontana, 1899-1968, A New Fact in Sculpture, Cologne, 2006, p. 68). Loin de se contenter d’une observation passive des choses, les œuvres comme [Concetto spaziale] tâchent d’apporter de nouvelles réponses aux bouleversements de leur temps. Ou comment se mettre au diapason d’un monde en pleine mutation.


‘I make a hole, infinity passes through it’.
Lucio Fontana

Seeking a revolutionary idiom that matched the technological developments of the era, Lucio Fontana began to explore new and radical gestures in the years following the Second World War. In the Manifiesto Blanco, published in 1946, he outlined what he hoped to create, specifically an art based on ‘the unity of time and space’ (Manifiesto Blanco, Buenos Aires, 1946). Following the tenants of his Spatialist theories, Fontana’s art would come to occupy a new space between painting and sculpture. Executed in 1961, [Concetto spaziale] encapsulates the artist’s bold new vision. Created the year that Yuri Gagarin completed his extraordinary journey into outer space, the painting’s solar yellow surface, brash perforations or Buchi, and zippy incisions too evoke new frontiers.

Fontana’s first Buchi date from 1949, the initial moments of what would become a sustained iconoclasm. By violating the seemingly inviolable surface of the canvas, the artist introduced real space into what had previously been two dimensions. Just as Gagarin’s pierced the planet’s atmospheric barrier, revealing the universe as an unexplored dimension, so too did Fontana penetrate the picture plane and in doing so, opened a new realm of possibility. ‘When I hit the canvas’, Fontana explained, ‘I sensed that I had made an important gesture. It was, in fact, not an incidental hole it was a conscious hole: by making a hole in the picture I found a new dimension in the void. By making holes in the picture I invented the fourth dimension’ (L. Fontana, quoted in P. Gottschaller, Lucio Fontana, The Artist’s Materials, Los Angeles, 2012, p. 21). Painting was no longer flat nor purely a means of depicting the world but rather an object in and of the world itself.

The richly textured, saturated yellow of [Concetto spaziale] is adorned with both gestural incisions and punctured marks. Held in the same private collection for over forty years, the work belongs to the artist’s Olii, a series defined by the use of a thick, base layer and expressive materiality. The island-like form at the centre of the painting is one that the artist returned to repeatedly: the egg, for Fontana, was a powerful symbol of death and resurrection, the cycle of life, and the unity of the universe. ‘My art is directed towards this purity’, he explained. ‘It is based on the philosophy of nothingness, a nothingness that does not imply destruction, but a nothingness of creation’ (L. Fontana, quoted in ‘Interview with Carla Lonzi’, 10 October 1967, reproduced in Lucio Fontana, Sedici sculture 1937-67, exh. cat. Amedeo Porro Arte Moderna e Contemporanea, Milan 2007, p. 35). At once topographical and planetary, these enigmatic ovals were later described by Fontana as ‘the path of man in space, his dismay and horror of going astray’ (L. Fontana, quoted in B. Hess, Lucio Fontana, 1899-1968. A New Fact in Sculpture, Cologne, 2006, p. 68). Far from passive observations, works such as [Concetto spaziale] endeavour to contend with an existential response to a changing world.

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