Collection privée, France
Toyen (Marie Cermínová, dite; 1902–1980)
Tu t'évapores dans un buisson de cris
Details
Toyen (Marie Cermínová, dite; 1902–1980)
Tu t'évapores dans un buisson de cris
signé et daté 'TOYEN 1956' (en bas à droite); signé, daté et inscrit 'TOYEN TU T'EVAPORES DANS UN BUISSON DE CRIS 1956 86x122' (sur le châssis)
huile sur toile
122 x 86 cm.
Peint en 1956
signed and dated 'TOYEN 1956' (lower right); signed, dated and inscribed 'TOYEN TU T'EVAPORES DANS UN BUISSON DE CRIS 1956 86x122' (on the stretcher)
oil on canvas
48 x 33 7⁄8 in.
Painted in 1956
Tu t'évapores dans un buisson de cris
signé et daté 'TOYEN 1956' (en bas à droite); signé, daté et inscrit 'TOYEN TU T'EVAPORES DANS UN BUISSON DE CRIS 1956 86x122' (sur le châssis)
huile sur toile
122 x 86 cm.
Peint en 1956
signed and dated 'TOYEN 1956' (lower right); signed, dated and inscribed 'TOYEN TU T'EVAPORES DANS UN BUISSON DE CRIS 1956 86x122' (on the stretcher)
oil on canvas
48 x 33 7⁄8 in.
Painted in 1956
Provenance
David Lévy & Associés, Paris.
Acquis auprès de celle-ci par le propriétaire actuel en octobre 2006.
Acquis auprès de celle-ci par le propriétaire actuel en octobre 2006.
Exhibited
Paris, Raymond Cordier & Cie., Toyen, mars-avril 1960, no. 26.
Prague, Museum Kampa, Toyen, I see for it is night, septembre 2015-janvier 2016, p. 130 (illustré en couleurs).
Prague, Galerie nationale; Hambourg, Kunsthalla et Paris, Musée d'art moderne de Paris, Toyen, L'Écart absolu, avril 2021-juillet 2022, p. 258, no. 437 (illustré en couleurs).
Prague, Museum Kampa, Toyen, I see for it is night, septembre 2015-janvier 2016, p. 130 (illustré en couleurs).
Prague, Galerie nationale; Hambourg, Kunsthalla et Paris, Musée d'art moderne de Paris, Toyen, L'Écart absolu, avril 2021-juillet 2022, p. 258, no. 437 (illustré en couleurs).
Further Details
« Toyen, de qui je ne puis jamais évoquer sans émotion le visage médaillé de noblesse. »
André Breton
Étrange vision onirique peinte par Toyen en 1956, Tu t'évapores dans un buisson de cris déploie une cascade de couleurs somptueuses semblable à une aurore boréale. Sur un fond d'un vert émeraude éclatant, des volutes blanches déferlent tels des nuages de fumée, ondoyant comme une nuée d'oiseaux, ou comme les drapés envoûtants des danses de Loïe Fuller. Au cœur de ce territoire fantastique trône fièrement une sorte d'arbre bleu squelettique, non loin de créatures rouges qui semblent se percher sur les coulures de peinture. Pour Toyen, l'inconscient offrait une source d'inspiration intarissable, comme si « elle voyait, écrit Lucy Ives, toute l'intériorité que pouvait renfermer un tableau qui se présente sous forme de surface inachevable, de faille ou de fissure dans la représentation elle-même » (L. Ives, ‘Mythic Being’, in Artforum, février 2022).
On ne sait que peu de choses sur la vie de Toyen, tant sa réserve était grande. Discrète au point de refuser, à terme, toute prise de parole en public, Marie Čermínová est née à Prague en 1902. Elle quitte le foyer familial dès l'âge de seize ans par soif de liberté et pour échapper, par la même occasion, aux attentes d'une société encore trop cloisonnée dans le stéréotype de genre. Elle prend bientôt, au mépris des normes patriarcales, un pseudonyme androgyne : « Toyen », dont l'origine fait débat, mais qui proviendrait sans doute à la fois du français « citoyen » et du tchèque « to je on », qui signifie « c'est lui ». Dans le même esprit, l'artiste porte volontiers des vêtements d'homme et s'accorde au masculin lorsqu'elle parle en tchèque à la première personne. Pour Toyen comme pour sa congénère Claude Cahun, l'aventure du « surréalisme est indissociable d'un affront à l'identité sexuelle traditionnelle, affront qui s'exprime pleinement dans leur expérience vécue – notamment leurs pseudonymes – et se reflète dans leur art » (S. D’Alessandro et M. Gale, ‘The World in the Time of the Surrealists’, in Surrealism Beyond Borders, cat. exp., The Metropolitan Museum of Art, New York, 2021, p. 16). Cette fluidité à toute épreuve irrigue l'ensemble de l'œuvre de Toyen, jusque dans les formes comme liquéfiées de Tu t'évapores dans un buisson de cris.
Formée à l'École des Arts appliqués de Prague, Toyen se lance à ses débuts dans l'art abstrait. Elle rejoint très tôt le cercle d'avant-garde praguois Devětsil avant de s'expatrier à Paris, où elle passe plusieurs années. À son retour en Tchécoslovaquie en 1928, elle côtoie ses compatriotes surréalistes, lesquels entretiennent d'étroits liens avec leurs homologues français. Ce n'est qu'au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, peu de temps avant la prise de pouvoir du parti communiste pro-soviétique, que Toyen se réinstalle à Paris. Elle se lie alors d'amitié avec Salvador Dalí, Max Ernst et André Breton, grâce auquel elle intègre le mouvement surréaliste parisien et participe aux expositions du groupe en France et à l'internationale. Fervent admirateur de l'art et de la personne de Toyen, Breton entrevoit dans sa peinture une portée « transcendantale », quelque chose d'ineffable (A. Breton, Surrealism and Painting, trans. by S. Taylor, London, 1972, p. 214).
Durant la période d'après-guerre, scènes nocturnes et formes sensuelles dominent de plus en plus l'expression plastique de Toyen. Loin des globes oculaires roulants et autres parties du corps désincarnées qui avaient habité ses travaux antérieurs, les toiles de l'artiste prennent une dimension mystique, sans doute inspirée de la fascination de Breton pour les sciences occultes. Sa production n'en perd pas pour autant de sa puissante charge érotique ni de sa radicalité politique : dans la peinture de Toyen, le thème omniprésent de la sexualité, si cher aux surréalistes, reste invariablement lié à des questions d'identité de genre. Synonyme de liberté, le langage du rêve et de l'étrangeté sera toujours pour elle un outil puissant pour interroger les structures du pouvoir. Ou comment se faire entendre « dans un buisson de cris ».
‘Toyen, who catches my heart every time I think of her’
André Breton
Painted in 1956, Toyen’s Tu t'évapores dans un buisson de cris is an enigmatic dreamscape, a cascade of sumptuous colour. Against a dazzling green ground – the aurora borealis in paint – white plumes curl like smoke. Evanescent and sinuous, it calls to mind Loie Fuller’s intoxicating dance, a flock of birds; this is a fantastical land where red creatures perch and a blue, skeletal tree stands proudly. For Toyen, the subconscious proffered an entire realm of inspiration as if, writes Lucy Ives, ‘she saw the possibility of interiority in a painting that manifested as an impossible-to-complete zone, a rip or fissure in representation itself’ (L. Ives, ‘Mythic Being’, in Artforum, February 2022).
Little is known of Toyen’s life, owing to her propensity for secrecy and her later refusal to speak in public. Born Marie Čermínová in Prague in 1902, she left home at the age of sixteen. This was as much a reach for freedom as it was a rejection of traditional gender expectations. Shortly thereafter, she adopted the name Toyen. Though no explanation was ever provided, scholars posit that the names continues her efforts to challenge patriarchal norms in its encouragement of a non-gendered reading: it plays on both the French citoyen (citizen) and the Czech phrase ‘to je on’, meaning ‘it is he’. In that vein, Toyen frequently dressed in men’s clothing and would use first-person masculine constructions when speaking in Czech. For the artist, like her contemporary Claude Calhoun, ‘Surrealism was bound up with a defiance of conventional gender identities in both their lived experience – most evident in their pseudonyms – and its reflection in their art’ (S. D’Alessandro and M. Gale, ‘The World in the Time of the Surrealists’, in Surrealism Beyond Borders, exh. cat., The Metropolitan Museum of Art, New York, 2021, p. 16). Indeed, such fluidity is suggested in Toyen’s output broadly, and in the liquid forms seen in Tu t'évapores dans un buisson de cris more specifically.
After studying at the Academy of Arts, Architecture and Design in Prague, Toyen initially saw herself as an abstract artist before making the shift towards Surrealism. She joined the Devětsil group – an association of avant-garde artists in Prague – before moving to Paris for several years; she returned to Czechoslovakia, now Czechia, in 1928. Czech Surrealism was closely associated with its Parisian counterparts. In the aftermath of the Second World War and shortly before the Soviet-backed Communist Party assumed control, she moved back to Paris. There she became friends with André Breton, Max Ernst, and Salvador Dalí and joined the Surrealist group in France with whom she exhibited internationally. Breton was particularly supportive of her work, which he described as possessing ‘transcendent meaning’ (A. Breton, Surrealism and Painting, trans. by S. Taylor, London, 1972, p. 214).
Toyen’s paintings created during the post-war period increasingly embraced nocturnal settings and sensual forms. Instead of the disembodied eyeballs and appendages she had previously depicted, her paintings took on mystical overtones, perhaps owing to Breton’s own fascination with the occult. Still, her output remained intensely political and erotic, the latter a defining feature of Surrealism. For Toyen, this theme was always, within pictorial representation, tied to questions of gender and identity. Surrealism gave her a language of liberation and a means to interrogate power structures. In short, works such as Tu t'évapores dans un buisson de cris gave her a means to be heard.
André Breton
Étrange vision onirique peinte par Toyen en 1956, Tu t'évapores dans un buisson de cris déploie une cascade de couleurs somptueuses semblable à une aurore boréale. Sur un fond d'un vert émeraude éclatant, des volutes blanches déferlent tels des nuages de fumée, ondoyant comme une nuée d'oiseaux, ou comme les drapés envoûtants des danses de Loïe Fuller. Au cœur de ce territoire fantastique trône fièrement une sorte d'arbre bleu squelettique, non loin de créatures rouges qui semblent se percher sur les coulures de peinture. Pour Toyen, l'inconscient offrait une source d'inspiration intarissable, comme si « elle voyait, écrit Lucy Ives, toute l'intériorité que pouvait renfermer un tableau qui se présente sous forme de surface inachevable, de faille ou de fissure dans la représentation elle-même » (L. Ives, ‘Mythic Being’, in Artforum, février 2022).
On ne sait que peu de choses sur la vie de Toyen, tant sa réserve était grande. Discrète au point de refuser, à terme, toute prise de parole en public, Marie Čermínová est née à Prague en 1902. Elle quitte le foyer familial dès l'âge de seize ans par soif de liberté et pour échapper, par la même occasion, aux attentes d'une société encore trop cloisonnée dans le stéréotype de genre. Elle prend bientôt, au mépris des normes patriarcales, un pseudonyme androgyne : « Toyen », dont l'origine fait débat, mais qui proviendrait sans doute à la fois du français « citoyen » et du tchèque « to je on », qui signifie « c'est lui ». Dans le même esprit, l'artiste porte volontiers des vêtements d'homme et s'accorde au masculin lorsqu'elle parle en tchèque à la première personne. Pour Toyen comme pour sa congénère Claude Cahun, l'aventure du « surréalisme est indissociable d'un affront à l'identité sexuelle traditionnelle, affront qui s'exprime pleinement dans leur expérience vécue – notamment leurs pseudonymes – et se reflète dans leur art » (S. D’Alessandro et M. Gale, ‘The World in the Time of the Surrealists’, in Surrealism Beyond Borders, cat. exp., The Metropolitan Museum of Art, New York, 2021, p. 16). Cette fluidité à toute épreuve irrigue l'ensemble de l'œuvre de Toyen, jusque dans les formes comme liquéfiées de Tu t'évapores dans un buisson de cris.
Formée à l'École des Arts appliqués de Prague, Toyen se lance à ses débuts dans l'art abstrait. Elle rejoint très tôt le cercle d'avant-garde praguois Devětsil avant de s'expatrier à Paris, où elle passe plusieurs années. À son retour en Tchécoslovaquie en 1928, elle côtoie ses compatriotes surréalistes, lesquels entretiennent d'étroits liens avec leurs homologues français. Ce n'est qu'au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, peu de temps avant la prise de pouvoir du parti communiste pro-soviétique, que Toyen se réinstalle à Paris. Elle se lie alors d'amitié avec Salvador Dalí, Max Ernst et André Breton, grâce auquel elle intègre le mouvement surréaliste parisien et participe aux expositions du groupe en France et à l'internationale. Fervent admirateur de l'art et de la personne de Toyen, Breton entrevoit dans sa peinture une portée « transcendantale », quelque chose d'ineffable (A. Breton, Surrealism and Painting, trans. by S. Taylor, London, 1972, p. 214).
Durant la période d'après-guerre, scènes nocturnes et formes sensuelles dominent de plus en plus l'expression plastique de Toyen. Loin des globes oculaires roulants et autres parties du corps désincarnées qui avaient habité ses travaux antérieurs, les toiles de l'artiste prennent une dimension mystique, sans doute inspirée de la fascination de Breton pour les sciences occultes. Sa production n'en perd pas pour autant de sa puissante charge érotique ni de sa radicalité politique : dans la peinture de Toyen, le thème omniprésent de la sexualité, si cher aux surréalistes, reste invariablement lié à des questions d'identité de genre. Synonyme de liberté, le langage du rêve et de l'étrangeté sera toujours pour elle un outil puissant pour interroger les structures du pouvoir. Ou comment se faire entendre « dans un buisson de cris ».
‘Toyen, who catches my heart every time I think of her’
André Breton
Painted in 1956, Toyen’s Tu t'évapores dans un buisson de cris is an enigmatic dreamscape, a cascade of sumptuous colour. Against a dazzling green ground – the aurora borealis in paint – white plumes curl like smoke. Evanescent and sinuous, it calls to mind Loie Fuller’s intoxicating dance, a flock of birds; this is a fantastical land where red creatures perch and a blue, skeletal tree stands proudly. For Toyen, the subconscious proffered an entire realm of inspiration as if, writes Lucy Ives, ‘she saw the possibility of interiority in a painting that manifested as an impossible-to-complete zone, a rip or fissure in representation itself’ (L. Ives, ‘Mythic Being’, in Artforum, February 2022).
Little is known of Toyen’s life, owing to her propensity for secrecy and her later refusal to speak in public. Born Marie Čermínová in Prague in 1902, she left home at the age of sixteen. This was as much a reach for freedom as it was a rejection of traditional gender expectations. Shortly thereafter, she adopted the name Toyen. Though no explanation was ever provided, scholars posit that the names continues her efforts to challenge patriarchal norms in its encouragement of a non-gendered reading: it plays on both the French citoyen (citizen) and the Czech phrase ‘to je on’, meaning ‘it is he’. In that vein, Toyen frequently dressed in men’s clothing and would use first-person masculine constructions when speaking in Czech. For the artist, like her contemporary Claude Calhoun, ‘Surrealism was bound up with a defiance of conventional gender identities in both their lived experience – most evident in their pseudonyms – and its reflection in their art’ (S. D’Alessandro and M. Gale, ‘The World in the Time of the Surrealists’, in Surrealism Beyond Borders, exh. cat., The Metropolitan Museum of Art, New York, 2021, p. 16). Indeed, such fluidity is suggested in Toyen’s output broadly, and in the liquid forms seen in Tu t'évapores dans un buisson de cris more specifically.
After studying at the Academy of Arts, Architecture and Design in Prague, Toyen initially saw herself as an abstract artist before making the shift towards Surrealism. She joined the Devětsil group – an association of avant-garde artists in Prague – before moving to Paris for several years; she returned to Czechoslovakia, now Czechia, in 1928. Czech Surrealism was closely associated with its Parisian counterparts. In the aftermath of the Second World War and shortly before the Soviet-backed Communist Party assumed control, she moved back to Paris. There she became friends with André Breton, Max Ernst, and Salvador Dalí and joined the Surrealist group in France with whom she exhibited internationally. Breton was particularly supportive of her work, which he described as possessing ‘transcendent meaning’ (A. Breton, Surrealism and Painting, trans. by S. Taylor, London, 1972, p. 214).
Toyen’s paintings created during the post-war period increasingly embraced nocturnal settings and sensual forms. Instead of the disembodied eyeballs and appendages she had previously depicted, her paintings took on mystical overtones, perhaps owing to Breton’s own fascination with the occult. Still, her output remained intensely political and erotic, the latter a defining feature of Surrealism. For Toyen, this theme was always, within pictorial representation, tied to questions of gender and identity. Surrealism gave her a language of liberation and a means to interrogate power structures. In short, works such as Tu t'évapores dans un buisson de cris gave her a means to be heard.
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