Lot Essay
‘La sphère est, à mes yeux, une forme parfaite, presque magique. Il s’agit alors d’en briser la surface, de se glisser dedans et de lui donner vie’.
Arnaldo Pomodoro
Conçu en 1966, Rotante primo sezionale n. 4 est parfaitement représentative des sculptures sphériques d’Arnaldo Pomodoro. D’un bronze étincelant, cette œuvre exceptionnelle se présente sous la forme d’un globe traversé par deux profondes entailles qui gravitent autour de son centre. Ainsi fendue, éventrée, la coque lisse révèle derrière ses parois un intérieur complexe, pareil à l’engrenage d’une machine figée en pleine rotation. Employée pour la première fois en 1963, la sphère demeure à ce jour l’une des formes les plus emblématiques de l’art de Pomodoro. En alliant perfection plastique et une certaine esthétique de la destruction, ces pièces traduisent toute l’anxiété de l’artiste face à l’évolution galopante de la science et de la technique d’après-guerre. Plusieurs exemplaires de cette édition ont été exposés à travers le monde, notamment en 1994 au Japon, lors d’une grande rétrospective itinérante consacrée au sculpteur italien.
C’est au début des années 1960 que Pomodoro signe ses premières œuvres en trois dimensions. Celles-ci s’inspirent fortement des sculptures de Constantin Brâncuși qu’il découvre à New York en 1959 et qui laissent sur Pomodoro une empreinte profonde, un désir brûlant d’imaginer ce qui se cache derrière ces surfaces pures et lustrées. ‘La perfection des formes chez Brâncuși était si belle, si mystérieuse, se souvient-il. …Et puis j’ai fini par me dire qu’une telle perfection matérielle n’avait plus lieu d’être à notre époque; il fallait la détruire à tout prix’ (A. Pomodoro, in S. Hunter, Arnaldo Pomodoro, New York, 1982, p. 52). Cubes, disques, cylindres et sphères deviennent bientôt les fondements d’un vocabulaire inédit. Pomodoro adopte, dès 1966, le titre Rotante (‘Tournant’) pour désigner ses sculptures en forme d’orbes, parcourues d’incisions qui en épousent la circonférence. Cette année-là, pour le pavillon italien de l’Exposition universelle de Montréal, il se lance par ailleurs dans la réalisation de l’une de ses premières sphères monumentales, aujourd’hui installée devant la Villa Farnesina, à Rome.
Durant les années 1950, Pomodoro avait essentiellement travaillé le bas-relief. De ces œuvres avait émergé une sorte de ‘scripte’ sculptural très personnel: un ensemble de glyphes énigmatiques, dérivés de sa fascination pour la peinture de Paul Klee. Les carcasses enchevêtrées de ses travaux plus tardifs en trois dimensions découlent directement de ce lexique de signes et de symboles: sauf qu’au lieu de se déployer sur la surface de l’œuvre, les inscriptions sont désormais tapies au cœur même de la sculpture. Habitées d’un réseau de formes semblables à des rouages, des rayons, des lames tournantes, ces structures denses renvoient volontairement à l’esthétique de l’ère industrielle. À l’instar de Lucio Fontana, l’un de ses premiers mentors, Pomodoro était bouleversé par les avancées techniques qui avaient permis à l’homme de partir à la conquête de l’espace tout en le précipitant - arme nucléaire oblige - au bord du gouffre. Dans Rotante primo sezionale n. 4, l’artiste conjugue l’idée de création et de destruction en évoquant un nouveau monde où sourdent des frontières encore inconnues.
‘For me, the sphere is a perfect, almost magical form. Then you try to break the surface, go inside and give life to the form’.
Arnaldo Pomodoro
Conceived in 1966, Rotante primo sezionale n. 4 is an exquisite example of Arnaldo Pomodoro’s spherical sculptures. The work consists of a gleaming bronze orb, divided by two deep incisions that curl around its centre. Its smooth shell splits apart, revealing a complex, machine-like interior that seems to be halted in the process of rotation. First employed in 1963, the sphere has become one of Pomodoro’s most iconic forms. Juxtaposing physical perfection with the aesthetics of destruction, works such as the present reflect his anxieties about the rapid progress of science and technology during the post-war period. Examples from the edition have been widely exhibited, notably featuring in Pomodoro’s solo touring museum exhibition across Japan in 1994.
Pomodoro first began to work in three dimensions during the early 1960s. He was particularly inspired by the sculptures of Constantin Brâncuși, which he encountered in New York in 1959, and was seized by a desire to imagine what lay beneath their sleek, pure surfaces. ‘The perfection of form in Brâncuși was so beautiful and mysterious’, he recalls. ‘…Then at a certain moment I said to myself, really this perfection of the form in our time is inappropriate; it has to be destroyed’ (A. Pomodoro, quoted in S. Hunter, Arnaldo Pomodoro, New York, 1982, p. 52). Alongside cubes, columns and discs, the sphere quickly became a central part of this new vocabulary. Pomodoro began to use the title Rotante in 1966, typically designating works whose incisions wrapped around the circumference of the sculpture. That year, significantly, he also began to work on one of his first monumental spheres for the Italian pavilion at the Montreal Expo, now installed in front of the Farnesina in Rome.
During the 1950s, Pomodoro had worked primarily with two-dimensional reliefs. These works saw the emergence of a kind of sculptural ‘writing’: mysterious glyphs that derived from his fascination with the paintings of Paul Klee. The writhing, tangled interiors of his three-dimensional works developed directly from this language of marks and signs. No longer inscribed upon the surface, this script was now hidden deep within the very heart of the sculpture. These intricate structures deliberately called to mind the aesthetics of the machine age, invoking spokes, cogs and whirring blades. Like Lucio Fontana, one of the artist’s early mentors, Pomodoro was deeply influenced by the technological developments of his time. Humankind had launched itself into space, yet had also - through the advent of nuclear warfare - brought itself to the brink of catastrophe. In Rotante primo sezionale n. 4, Pomodoro unites creation and destruction, visualising the new, unknown frontiers that lay before the world.
Arnaldo Pomodoro
Conçu en 1966, Rotante primo sezionale n. 4 est parfaitement représentative des sculptures sphériques d’Arnaldo Pomodoro. D’un bronze étincelant, cette œuvre exceptionnelle se présente sous la forme d’un globe traversé par deux profondes entailles qui gravitent autour de son centre. Ainsi fendue, éventrée, la coque lisse révèle derrière ses parois un intérieur complexe, pareil à l’engrenage d’une machine figée en pleine rotation. Employée pour la première fois en 1963, la sphère demeure à ce jour l’une des formes les plus emblématiques de l’art de Pomodoro. En alliant perfection plastique et une certaine esthétique de la destruction, ces pièces traduisent toute l’anxiété de l’artiste face à l’évolution galopante de la science et de la technique d’après-guerre. Plusieurs exemplaires de cette édition ont été exposés à travers le monde, notamment en 1994 au Japon, lors d’une grande rétrospective itinérante consacrée au sculpteur italien.
C’est au début des années 1960 que Pomodoro signe ses premières œuvres en trois dimensions. Celles-ci s’inspirent fortement des sculptures de Constantin Brâncuși qu’il découvre à New York en 1959 et qui laissent sur Pomodoro une empreinte profonde, un désir brûlant d’imaginer ce qui se cache derrière ces surfaces pures et lustrées. ‘La perfection des formes chez Brâncuși était si belle, si mystérieuse, se souvient-il. …Et puis j’ai fini par me dire qu’une telle perfection matérielle n’avait plus lieu d’être à notre époque; il fallait la détruire à tout prix’ (A. Pomodoro, in S. Hunter, Arnaldo Pomodoro, New York, 1982, p. 52). Cubes, disques, cylindres et sphères deviennent bientôt les fondements d’un vocabulaire inédit. Pomodoro adopte, dès 1966, le titre Rotante (‘Tournant’) pour désigner ses sculptures en forme d’orbes, parcourues d’incisions qui en épousent la circonférence. Cette année-là, pour le pavillon italien de l’Exposition universelle de Montréal, il se lance par ailleurs dans la réalisation de l’une de ses premières sphères monumentales, aujourd’hui installée devant la Villa Farnesina, à Rome.
Durant les années 1950, Pomodoro avait essentiellement travaillé le bas-relief. De ces œuvres avait émergé une sorte de ‘scripte’ sculptural très personnel: un ensemble de glyphes énigmatiques, dérivés de sa fascination pour la peinture de Paul Klee. Les carcasses enchevêtrées de ses travaux plus tardifs en trois dimensions découlent directement de ce lexique de signes et de symboles: sauf qu’au lieu de se déployer sur la surface de l’œuvre, les inscriptions sont désormais tapies au cœur même de la sculpture. Habitées d’un réseau de formes semblables à des rouages, des rayons, des lames tournantes, ces structures denses renvoient volontairement à l’esthétique de l’ère industrielle. À l’instar de Lucio Fontana, l’un de ses premiers mentors, Pomodoro était bouleversé par les avancées techniques qui avaient permis à l’homme de partir à la conquête de l’espace tout en le précipitant - arme nucléaire oblige - au bord du gouffre. Dans Rotante primo sezionale n. 4, l’artiste conjugue l’idée de création et de destruction en évoquant un nouveau monde où sourdent des frontières encore inconnues.
‘For me, the sphere is a perfect, almost magical form. Then you try to break the surface, go inside and give life to the form’.
Arnaldo Pomodoro
Conceived in 1966, Rotante primo sezionale n. 4 is an exquisite example of Arnaldo Pomodoro’s spherical sculptures. The work consists of a gleaming bronze orb, divided by two deep incisions that curl around its centre. Its smooth shell splits apart, revealing a complex, machine-like interior that seems to be halted in the process of rotation. First employed in 1963, the sphere has become one of Pomodoro’s most iconic forms. Juxtaposing physical perfection with the aesthetics of destruction, works such as the present reflect his anxieties about the rapid progress of science and technology during the post-war period. Examples from the edition have been widely exhibited, notably featuring in Pomodoro’s solo touring museum exhibition across Japan in 1994.
Pomodoro first began to work in three dimensions during the early 1960s. He was particularly inspired by the sculptures of Constantin Brâncuși, which he encountered in New York in 1959, and was seized by a desire to imagine what lay beneath their sleek, pure surfaces. ‘The perfection of form in Brâncuși was so beautiful and mysterious’, he recalls. ‘…Then at a certain moment I said to myself, really this perfection of the form in our time is inappropriate; it has to be destroyed’ (A. Pomodoro, quoted in S. Hunter, Arnaldo Pomodoro, New York, 1982, p. 52). Alongside cubes, columns and discs, the sphere quickly became a central part of this new vocabulary. Pomodoro began to use the title Rotante in 1966, typically designating works whose incisions wrapped around the circumference of the sculpture. That year, significantly, he also began to work on one of his first monumental spheres for the Italian pavilion at the Montreal Expo, now installed in front of the Farnesina in Rome.
During the 1950s, Pomodoro had worked primarily with two-dimensional reliefs. These works saw the emergence of a kind of sculptural ‘writing’: mysterious glyphs that derived from his fascination with the paintings of Paul Klee. The writhing, tangled interiors of his three-dimensional works developed directly from this language of marks and signs. No longer inscribed upon the surface, this script was now hidden deep within the very heart of the sculpture. These intricate structures deliberately called to mind the aesthetics of the machine age, invoking spokes, cogs and whirring blades. Like Lucio Fontana, one of the artist’s early mentors, Pomodoro was deeply influenced by the technological developments of his time. Humankind had launched itself into space, yet had also - through the advent of nuclear warfare - brought itself to the brink of catastrophe. In Rotante primo sezionale n. 4, Pomodoro unites creation and destruction, visualising the new, unknown frontiers that lay before the world.