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L'UNION DES ARTISTES MODERNES -- UAM
Avant l'Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes de Paris en 1925, les membres encore dispersés de ce qui deviendra l'Union des Artistes Modernes tentent de faire bloc et prennent la tête d'un mouvement contre la politique des Beaux-Arts et de l'Industrie en refusant d'accepter l'orientation qu'ils jugent par trop académique des contenus de l'Exposition. Leur souhait est que s'affirment, se concrétisent et soient rendus visibles les alternatives qu'ils opposent aux fabricants de pastiches et de vieuxneuf. Le titre choisit pour l'Exposition de 1925-- Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes -- est en lui-même révélateur du contexte de l'époque : d'une part les arts décoratifs contemporains dont la France s'enorgueillit à juste titre et d'autre part les arts industriels modernes qui peinent encore à trouver leur place.
En dépit de l'article 4 du règlement de l'Exposition qui précise : "Sont admises à l'Exposition les oeuvres d'une inspiration nouvelle et d'une originalité réelle exécutées et présentées par les artisans, industriels et créateurs de modèles et éditeurs rentrant dans les arts décoratifs et industriels modernes. En sont rigoureusement exclues les copies, imitations et contrefaçons de styles anciens", ce qui prévaut c'est l'omniprésence d'un art décoratif plus aristocratique que populaire qui s'inscrit plus volontiers dans la belle tradition des ébénistes français du XVIIIème siècle que dans les propositions novatrices du Deutscher Werkbund ou du Bauhaus allemands.
Après l'Exposition de 1925, la volonté des créateurs modernes français se fait plus précise : il leur faut trouver les moyens de leur visibilité, exposer ensemble, faire partager leurs convictions que le 'Beau dans l'Utile', le 'Beau pour Tous', la simplification du décor, l'usage dans l'ameublement de matériaux encore inusités, que l'air, la lumière, l'hygiène peuvent à terme produire une alternative stylistique à l'incessante répétition des typologies mobilières et architecturales des siècles passes
"Un style ça ne s'improvise pas. Il ne peut être l'oeuvre d'un seul" écrivait Frantz Jourdain. Les modernes doivent donc s'organiser, se grouper, faire bloc, afin de rendre perceptible la légitimité de leurs propositions : travailler à l'émergence d'un style pour le XXème siècle, reconnaissable, identifiable, qui refléterait, au plus près, un certain esprit du temps et la plus parfaite adéquation possible entre innovations techniques et innovations sociales. Ils s'inscrivent dans leur époque, travaillent la structure plus que la surface, adoptent une esthétique qui s'inspire de la machine, de la vitesse, usent des matériaux de leur temps, acier, béton (pour la construction), cuirs, premiers matériaux de synthèse. Leurs créations sont élégantes, certes pas encore industrialisées, encore moins standardisées mais leur conception est originale, innovante, leur quasi absence d'ornement n'autorisant aucune copie, aucune imitation.
Jusque là unis au sein de la Société des Artistes Décorateurs (SAD), entre créateurs 'contemporains' et créateurs 'modernes' la rupture semble inévitable. Le 29 mars 1929, René Herbst annonce au comité de la SAD le désistement d'une bonne quinzaine de ses membres dont René Herbst lui-même, Pierre Chareau, Francis Jourdain, Robert Mallet- Stevens, Jan et Joël Martel tous futurs membres de l'UAM. Les désistements se transforment en démissions, annoncées lors de l'Assemblée générale extraordinaire de la SAD du 21 février 1930. En art, la scission fait la force.
L'Union des Artistes Modernes est alors officiellement créée au cours de son assemblée constitutive du 15 mai 1929, au siège social de l'association, 7 rue des Grands Augustins à Paris, chez la créatrice de textiles Hélène Henry. Les statuts sont déposés à la Préfecture de police de Paris sous le numéro 79501-8967. Hélène Henry, René Herbst, Francis Jourdain, Robert Mallet-Stevens et Raymond Templier, qui assure le secrétariat, forment le premier Comité Directeur de l'UAM. Jusqu'à sa mort en 1945, Robert Mallet Stevens en assure la présidence. René Herbst lui succédera. La première exposition du groupe a lieu du 11 juin au 14 juillet 1930 au Pavillon de Marsan (Musée des Arts Décoratifs), un peu dans la précipitation, sans véritables moyens, sans ligne directrice commune encore clairement identifiable mais "où le goût ne manque pas, ni l'imagination, ni l'agrément, ni le talent". L'exposition rend hommage à Pierre Legrain, récemment décédé et créateur de l'identité visuelle du mouvement. Plusieurs créateurs étrangers qui en partagent les idéaux et les choix esthétiques exposent également au Pavillon de Marsan : les hollandais Bart Van der Leck et Gerrit Rietveld - tous deux membres du groupe De Stijl - l'américaine, décoratrice et créatrice de tapis Elizabeth Eyre de Lanux et l'anglaise Evelyn Wyld collaboratrice et amie d'Eileen Gray, le photographe et cinéaste américain Man Ray figurent parmi les invités.
"[...] s'ils n'ignorent pas ce qui les sépare les uns des autres, ils sont unanimes à vouloir chercher ce qui les unit."
En 1934, la publication du premier manifeste de l'Union des Artistes Modernes 'POUR l'art moderne, cadre de la vie contemporaine' rédigé par l'affichiste Jean Carlu en collaboration avec le critique d'art Louis Chéronnet permet à l'UAM de préciser ses intentions -- "capter toutes les vibrations de l'époque, créer le lendemain"-- affirmer la fécondité théorique et stylistique que procure le rapprochement des arts majeurs et des arts mineurs et répondre, par l'exemple, aux attaques parfois teintées de xénophobie et de nationalisme dont elle est l'objet, les détracteurs de l'art moderne l'accusant de préférer le cube européen à l'arabesque française. Vieille querelle des 'anciens et des modernes' qu'attisent une situation économique difficile et la montée d'une rumeur persistante d'une nouvelle guerre avec l'Allemagne. L'UAM qui ne peut compter que sur ses propres forces connaçt à plusieurs reprises des difficultés pour organiser son exposition annuelle qui se tient au Pavillon de Marsan (1930 et 1932), à la Galerie Georges Petit (1931), à la Galerie de la Renaissance (1933), au salon d'Automne en collaboration avec l'Office Technique pour l'Utilisation de l'Acier -- OTUA (1934 et 1936), au salon de la Lumière (1935), au salon des Arts Ménagers (1937). La Société des Artistes Décorateurs tente à plusieurs reprises de 'récupérer' les démissionnaires de 1929 en leur accordant --s'ils désirent revenir -- "toutes les satisfactions qui sont compatibles avec une application très libérale des statuts".
La préparation de l'Exposition Internationale des Arts et Techniques dans la vie modernede Paris de 1937 permet à l'UAM, enfin reconnue, de rebondir. Après l'arrivée du Front Populaire au pouvoir, elle est dotée d'un réel soutien financier par la Direction Générale des Beaux Arts et le Comité de l'Exposition, intègre ses diverses commissions de préparation, pèse sur leur contenu et prépare la construction de son propre pavillon dont l'architecture est confiée à Georges-Henri Pingusson, Frantz-Philippe Jourdain et André Louis. L'architecture intérieure est elle confiée à René Herbst qui met en scène quelques dix années de création des membres de l'UAM, une sélection d'objets manufacturés, des projets réalisés en collaboration avec des industriels, des installations en situation qui proposent de nouvelles manières d'habiter l'espace. Peintres et sculpteurs ne sont pas oubliés : leurs oeuvres accompagnent les divers parcours.
En octobre 1944, René Herbst convoque la première assemblée générale de l'UAM depuis l'Exposition de 1937 et la déclaration de la Seconde Guerre mondiale. En 1949, la publication du manifeste dit 'Manifeste de 1949' rédigé par l'architecte Georges-Henri Pingusson réactive le principe fondateur de l'UAM autour de la synthèse des arts ; beaucoup de membres se sont éloignés mais une génération nouvelle, pour la plupart constituée de jeunes architectes et de designers, apparaçt. André Hermant, vice président de l'UAM de 1948 à 1952, soutenu dans sa démarche par René Herbst et Charlotte Perriand, va donner une nouvelle impulsion au mouvement avec la création de la section Formes Utiles, 'émanation de l'UAM'. Si la formule :"Sont utiles (et belles) les formes qui manifestent l'accord entre les exigences de la matière et les aspirations de l'esprit" convient à presque tous, il s'agit pourtant de préciser les nouvelles orientations souhaitées par Formes Utiles, en particulier par René Herbst qui en devient le Président : "la réunion et la coopération es artistes créateurs, des techniciens, des usagers et des industriels en vue de la création, du perfectionnement et de la diffusion pour tout ce qui constitue le cadre matériel de la vie".
Un projet pour l'avenir, somme toute peu éloigné de celui imaginé par les fondateurs de l'Union des Artistes Modernes mais que la dureté des temps n'a pu voir se concrétiser pleinement. L'association Formes Utiles devenue indépendante, la rivalité avec l'UAM s'amplifie et, faute de moyens et de projets, dans l'incapacité de faire face aux nouveaux impératifs dictés par une consommation de masse grandissante, l'Union des Artistes Modernes, après avoir initié le plus important si ce n'est le seul mouvement moderne français de la première moitié du XXème siècle, disparaçt en 1958. Les oeuvres demeurent, désormais icônes du siècle passé, mais inchangées, modernes.
Arlette Barré-Despond
In anticipation of the Paris Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes of 1925, the scattered individuals who were eventually to unite as the Union des Artistes Modernes came together to challenge the influence of the Beaux-Arts and of Industry by refusing to submit to the direction in which the content of the exhibition was being steered, which they judged too conservative. Their wish was to identify, pursue and achieve alternatives to the dominant production of pastiches and variations of traditional styles. The very title of the 1925 Exhibition - Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes - is in itself indicative of prevailing positions of the time: on the one hand the justified pride that France felt in its decorative arts, and on the other the reality that modern industrial arts were struggling to establish their validity.
Despite the specific article 4 ruling that: 'Qualifying works in the Exhibition must be truly original creations in a modern style, executed and presented by craftsmen, manufacturers, designers and retailers working within the established parameters of the decorative and industrial arts. Copies, imitations and replications of historic styles are strictly excluded', the fact is that the omnipresent style was aristocratic rather than democratic, having more in common with the fine traditions of 18th century French cabinetmaking than with the innovative ideas promoted by the Deutsher Werkbund or the Bauhaus.
The 1925 Exhibition was the incentive for French Modernist designers to define their ideals and to establish a collective identity by exhibiting together and by winning others over to their belief in 'Beauty in Functionalism', 'Beauty for all', the simplification of interior design, the use of novel materials, and the notion that space, light and cleanliness could ultimately define a stylistic alternative to the endless reworking of the furnishing and architectural typologies of centuries past.
'A style cannot assert itself though just one individual's efforts,' wrote Frantz Jourdain. The Modernists needed to unite and organize themselves so as to give weight and legitimacy to their ideas. Their objective was to define a distinct style relevant to the century, truly reflecting the spirit of the age, and a commitment to the alignment of technical innovation and social progress. They made their mark by focusing on structure rather than surface, by evolving an aesthetic inspired from mechanisation and speed, by the use of materials relevant to the day - steel, concrete (in building), leather and new synthetics. Their designs are elegant, and still crafted in small numbers rather than serially manufactured and standardised, yet their ideas are original, innovative and their rejection of ornament allowed no opportunity for borrowings from the past.
The membership of the Société des Artistes Décorateurs (SAD) comprised artists in both camps, the 'Contemporary' and the 'Modern'. A rupture was inevitable. On March 29th 1928 René Herbst tendered to the SAD committee the resignation of fifteen or more members, among them Herbst himself, Pierre Chareau, Francis Jourdain, Robert Mallet-Stevens, Jan and Joël Martel - all destined to become members of the UAM. These resignations became dismissals, announced in an extraordinary general meeting of the SAD on February 21st 1930. Such ruptures have been the source of strength in the arts.
The Union des Artistes Modernes was formally established in a meeting on March 15th 1929 held in the official seat of the group at 7 rue des Grands Augustins, Paris, the premises of fabric designer Hélène Henry. The deeds of institution were registered with the Préfecture de police de Paris under the reference 79501-8967. Hélène Henry, René Herbst, Francis Jourdain, Robert Mallet-Stevens and Raymond Templier, who acted as secretary, became the first Board of Directors of the UAM.
Robert Mallet-Stevens acted as President till his death in 1945, when he was succeeded by René Herbst. The group's first exhibition took place from June 11th-July 14th 1930 in the Pavillon de Marsan (Musée des Arts Décoratifs) in something of a rush, under-funded and without a shared agenda having yet been clearly delineated; but there was 'no mistaking the manifest self-assurance, imagination, dexterity and talent.' The exhibition honoured the recently deceased Pierre Legrain, creator of the group's graphic symbol. A number of foreign designers who shared the group's ideals and aesthetic preferences exhibited at the same time in the Pavillon de Marsan. These included the Dutch designers Bart Van der Leck and Gerrit Rietveld -- both members of the De Stijl group - the American decorator and rug designer Elizabeth Eyre de Lanux, and the Englishwoman Evelyn Wyld, associate and friend of Eileen Gray ; American photographer and film-maker Man Ray was among the guests.
' . . . if they remained aware of their differences, they were unanimous in their determination to define their common goals.'
In 1934 the Union des Artistes Modernes was able to define its ambitions through the publication of its first manifesto - 'POUR l'art moderne, cadre de la vie contemporaine', drafted by poster artist Jean Carlu in collaboration with art critic Louis Chéronnet. These set out the aims: to 'create Tomorrow by tuning in to the spirit of the age', to assert the creativity in thought and practise that would unite all the arts, and to respond by example to those sometimes xenophobic and nationalistic critics of modern art who might accuse it of favouring the European cube to the French scroll. This was the predictable confrontation between the old and the new, fuelled by a difficult financial climate and the growing likelihood of a a second war with Germany. Self-reliant, the UAM frequently experienced difficulties in the organization of its exhibitions, held at the Pavillon de Marsan (1930 and 1932), the Galerie Georges Petit (1931), the Galerie de la Renaissance (1933), the Salon d'Automne in collaboration with OTUA, the Office Technique pour l'Utilisation de l'Acier (1934 et 1936), the Salon de la Lumière (1935), and the Salon des Arts Ménagers (1937). The Société des Artistes Décorateurs tried on several occasions to coaxe back the members who had left in 1929 by offering them - should they return - 'freedoms compatible with the most liberal interpretation of their regulations'.
The lead-up to the 1937 Paris Exposition Internationale des Arts et Techniques dans la Vie Moderne gave the UAM, now regarded seriously, to find new strength. With the election success of the Front Populaire, the group was granted significant financial sponsorship by the Direction Générale des Beaux Arts and the Comité de l'Exposition; the members, conscious of the diversity of their initial commissions, thought it wise to co-ordinate their projects and planned the construction of a dedicated pavilion, to be designed by architects Georges-Henri Pingusson, Frantz-Philippe Jourdain and André Louis.
The interior architecture was entrusted to René Herbst who created a setting for a decade's worth of work by members of the UAM, a selection of manufactured objects, projects realized in collaboration with industry, and installations that suggested new spatial concepts for living. And the exhibition did not overlook the contribution of artists and sculptors, whose works punctuated the various displays.
In October 1944, René Herbst summoned the first general assembly of the UAM since the 1937 Exposition Internationale and the outbreak of World War II. In 1949, the publication of a manifesto, known as the 'Manifeste de 1949', drafted by architect Georges-Henri Pingusson, reaffirmed the founding UAM principle of a synthesis of the arts. Many members had drifted away, but a new generation emerged, principally from the disciplines of architecture and design. André Hermant, vice-president of the UAM from 1948 till 1952, gave a new impetus to the group, supported by René Herbst and Charlotte Perriand, with the establishment of the Formes Utiles section as an off-shoot of the UAM. If the statement that 'Functional and beatiful forms will emerge from the integrated resolution of practical and aesthetic issues' proved universally acceptable, there was nonetheless a need to clarify the new direction proposed by the Formes Utiles programme, notably on the part of René Herbst who sought, on becoming President, 'The association and partnership of creative minds, of technicians, of end-users and manufacturers with a view to the design, refinement and distribution of all that is essential for material comfort'.
Such was the plan for the future - essentially in line with the vision of the founders of the Union des Artistes Modernes who had fought for their beliefs in difficult times yet not always seen their full realisation. The Formes Utiles project became independent; rivalries with the UAM became more marked; confronted by the new realities of a growing mass market and with limited funding and few commissions, the Union des Artistes Modernes - after initiating the only true manifestation of Modernism in France in the first half of the 20th century - disbanded in 1958. The group's creations survive, icons of the last century, yet eternally modern.
Arlette Barré-Despond
Boris Lacroix (1902-1984)
PAIRE DE VASES, VERS 1927
Details
Boris Lacroix (1902-1984)
Paire de vases, vers 1927
De forme boule, en verre teinté noir, enchâssé dans une structure cruciforme en laiton nickelé, à base circulaire
Hauteur : 20 cm. (7 7/8 in.)
Chacun signé 'BORIS LACROIX' sur la base (4)
Paire de vases, vers 1927
De forme boule, en verre teinté noir, enchâssé dans une structure cruciforme en laiton nickelé, à base circulaire
Hauteur : 20 cm. (7 7/8 in.)
Chacun signé 'BORIS LACROIX' sur la base (4)
Further Details
A pair of black-tinted glass and nickelled brass vases, by Boris Lacroix, circa 1927, both signed with impressed designer's mark to base