Lot Essay
« Il était de ceux qu’on ne rencontre qu’une fois dans sa vie : artiste autant que prophète ». - Glenn O’Brien
"He was the once-in-a-lifetime real deal: artist as prophet" - Glenn O’Brien
« Jean-Michel Basquiat ... produit une intensité de trait qui se lit comme un enregistrement polygraphique, une « secousse » du cerveau à la main ». - Diego Cortez
"Jean-Michel Basquiat … constructs an intensity of line which reads like a polygraph report, a brain-to-hand “shake”’ - Diego Cortez
Conservée dans la même collection privée depuis près de trois décennies, Sans titre (1981) est une œuvre électrisante, témoin de ce moment de transition où Jean-Michel Basquiat graffiteur culte devient superstar mondiale. Son premier propriétaire est Diego Cortez, conservateur de l’exposition avant-gardiste « New York/New Wave » présentée au P.S.1 en février 1981, qui fait connaître au grand public le jeune Basquiat, 20 ans à peine. Peinte sur un grand panneau de métal brillant usé par la vie urbaine, l’œuvre illustre l’ingénieuse débrouillardise qui a éveillé la curiosité de Cortez. Au centre, Basquiat a dessiné une voiture estampillée « MILK », son châssis taloché à l’acrylique blanche, en dessous est écrit le nom « AARON », en référence au joueur de base-ball Hank Aaron. Cette évocation emblématique d’Aaron, héros du milieu sportif, qui s’est battu tout au long de sa carrière contre le racisme et les abus et a officiellement été intronisé au Baseball Hall of Fame en 1982, définit un thème qui demeurera au cœur de l’œuvre de Basquiat alors qu’il s’impose en virtuose accompli de la scène artistique new-yorkaise.
Avec sa voiture au graphisme simple et cet habile mélange du métal, de la peinture et du stylo, Sans titre trouve naturellement sa place au cœur de cette explosion originelle de créativité. Eric Fretz écrit « Jean-Michel avait désormais développé sa propre iconographie, ses figures simples de couronnes, de têtes, d’avions, de tipis, de voitures et d’accidents peuplaient nombre de ses œuvres, de même que son lettrage familier » (E. Fretz, Jean-Michel Basquiat: An Autobiography, California 2010, p. 68). L’influent marchand d’art Henry Geldzahler, qui partage alors un appartement avec Cortez, se rappelle, lors de l’exposition de 1981 « J’ai acheté une peinture sur le champ », dit-il. « … J’ai tout de suite réalisé à quel point le travail était sophistiqué et à quel point le gamin était jeune. J’ai fait monter les enchères. Je lui ai donné 2 000 $ pour un collage sur une porte afin de lui montrer qu’il pouvait avoir un peu foi en ce monde » (H. Geldzahler, cité dans P. Hoban, « Samo is Dead », New York Magazine, 26 septembre 1988, p. 40). Basquiat ne tarde pas à susciter l’intérêt des galeries et des plus grands marchands d’art, qui lui ouvrent un chemin tout tracé vers la gloire.
Parmi les héros noirs au panthéon de Basquiat, qui compte d’autres joueurs de base-ball, des boxeurs, tels que Joe Louis et des artistes de jazz, tels que Charlie Parker et Thelonious Monk, Hank Aaron fait sans nul doute figure d’icône : son prénom, tantôt écrit en entier, tantôt évoqué dans un flot de « A » répétés, résonne à travers les premières œuvres de Basquiat. Élevant les athlètes et musiciens afro-américains au rang de rois ou de saints, Basquiat s’approprie également ces associations, se créant une identité composite de personnalités noires exceptionnelles. Si ces allusions vibrantes et répétées à l’identité de ses héros lui permettent de les sacrer champions, conquérants et rois, elles sont aussi le moyen d’évoquer la complexité de l’histoire raciale des États-Unis. Les strates d’un passé culturel et personnel complexe s’entremêlent dans les pictogrammes, hiéroglyphes et couches physiques de son art. Brève déclaration d’intention, Aaron est une relique vivante de la propre histoire de Basquiat et un exemple de l’extraordinaire puissance du jeune artiste.
Held in the same private collection for almost three decades, Untitled (1981) is a thrilling work that captures Jean-Michel Basquiat’s moment of transition from cult graffitist to global superstar. Its first owner was Diego Cortez: curator of the ground breaking ‘New York/New Wave’ exhibition at P.S.1 in February 1981 which launched the twenty-year-old Basquiat to widespread acclaim. Painted on a tall, glittering panel of scavenged metal weathered by its life in the city, the work exemplifies the streetwise ingenuity that caught Cortez’s eye. At the centre Basquiat has drawn a car labelled ‘MILK’, its chassis daubed in white acrylic; below in black is the name ‘AARON’, designating the baseball player Hank Aaron. This mythic evocation of Aaron—a hero of the sport who battled racism and abuse during his career, and who was formally inducted into the Baseball Hall of Fame in 1982—sets out a theme that would remain central to Basquiat’s work as he matured into a fully-fledged king of the New York art world.
Untitled’s graphic depiction of a car and its sharp use of metal, paint and pen situate it directly amid this seminal outburst of creativity. Biographer Eric Fretz wrote ‘Jean-Michel had by now developed his own iconography; his simple images of crowns, heads, airplanes, tepees, cars, and car crashes populated several works, along with his familiar lettering’ (E. Fretz, Jean-Michel Basquiat: An Autobiography, California 2010, p. 68). The influential dealer Henry Geldzahler, who shared an apartment with Cortez at the time, recalled being blown away by Basquiat’s work. ‘I bought a painting on the spot’, he said. ‘… I could see how incredibly sophisticated the work was and how young the kid was. I overpaid: I gave him $2,000 for a collage on a door to show him he could trust the world a bit’ (H. Geldzahler, quoted in P. Hoban, ‘Samo is Dead,’ New York Magazine, 26 September 1988, p. 40). Gallery representation and the interest of other major dealers swiftly followed, and Basquiat’s road to glory had begun.
Among Basquiat’s pantheon of black heroes, which included other baseball players, boxers such as Joe Louis and jazz artists like Charlie Parker and Thelonious Monk, Hank Aaron stands out as one of the most frequent cast members: his name is not only written in full, but also echoed in streams of iterated ‘A’s that sing throughout Basquiat’s early oeuvre. In elevating African-American athletes and musicians to royal or saintly status, Basquiat also frequently applied these associations to himself, conjuring a compound identity of majestic black personas. While his vibrant rehearsals of his heroes’ identities enabled him to celebrate them as champions, conquerors and kings, they also let him evoke the complexities of racial history in the United States. Intricate, intertwined strata of personal and cultural pasts are embedded in the pictograms, hieroglyphs and physical layers of his art. As a succinct statement of intent, Aaron is a vivid relic of Basquiat’s own story, and exemplary of the young artist’s extraordinary power.
"He was the once-in-a-lifetime real deal: artist as prophet" - Glenn O’Brien
« Jean-Michel Basquiat ... produit une intensité de trait qui se lit comme un enregistrement polygraphique, une « secousse » du cerveau à la main ». - Diego Cortez
"Jean-Michel Basquiat … constructs an intensity of line which reads like a polygraph report, a brain-to-hand “shake”’ - Diego Cortez
Conservée dans la même collection privée depuis près de trois décennies, Sans titre (1981) est une œuvre électrisante, témoin de ce moment de transition où Jean-Michel Basquiat graffiteur culte devient superstar mondiale. Son premier propriétaire est Diego Cortez, conservateur de l’exposition avant-gardiste « New York/New Wave » présentée au P.S.1 en février 1981, qui fait connaître au grand public le jeune Basquiat, 20 ans à peine. Peinte sur un grand panneau de métal brillant usé par la vie urbaine, l’œuvre illustre l’ingénieuse débrouillardise qui a éveillé la curiosité de Cortez. Au centre, Basquiat a dessiné une voiture estampillée « MILK », son châssis taloché à l’acrylique blanche, en dessous est écrit le nom « AARON », en référence au joueur de base-ball Hank Aaron. Cette évocation emblématique d’Aaron, héros du milieu sportif, qui s’est battu tout au long de sa carrière contre le racisme et les abus et a officiellement été intronisé au Baseball Hall of Fame en 1982, définit un thème qui demeurera au cœur de l’œuvre de Basquiat alors qu’il s’impose en virtuose accompli de la scène artistique new-yorkaise.
Avec sa voiture au graphisme simple et cet habile mélange du métal, de la peinture et du stylo, Sans titre trouve naturellement sa place au cœur de cette explosion originelle de créativité. Eric Fretz écrit « Jean-Michel avait désormais développé sa propre iconographie, ses figures simples de couronnes, de têtes, d’avions, de tipis, de voitures et d’accidents peuplaient nombre de ses œuvres, de même que son lettrage familier » (E. Fretz, Jean-Michel Basquiat: An Autobiography, California 2010, p. 68). L’influent marchand d’art Henry Geldzahler, qui partage alors un appartement avec Cortez, se rappelle, lors de l’exposition de 1981 « J’ai acheté une peinture sur le champ », dit-il. « … J’ai tout de suite réalisé à quel point le travail était sophistiqué et à quel point le gamin était jeune. J’ai fait monter les enchères. Je lui ai donné 2 000 $ pour un collage sur une porte afin de lui montrer qu’il pouvait avoir un peu foi en ce monde » (H. Geldzahler, cité dans P. Hoban, « Samo is Dead », New York Magazine, 26 septembre 1988, p. 40). Basquiat ne tarde pas à susciter l’intérêt des galeries et des plus grands marchands d’art, qui lui ouvrent un chemin tout tracé vers la gloire.
Parmi les héros noirs au panthéon de Basquiat, qui compte d’autres joueurs de base-ball, des boxeurs, tels que Joe Louis et des artistes de jazz, tels que Charlie Parker et Thelonious Monk, Hank Aaron fait sans nul doute figure d’icône : son prénom, tantôt écrit en entier, tantôt évoqué dans un flot de « A » répétés, résonne à travers les premières œuvres de Basquiat. Élevant les athlètes et musiciens afro-américains au rang de rois ou de saints, Basquiat s’approprie également ces associations, se créant une identité composite de personnalités noires exceptionnelles. Si ces allusions vibrantes et répétées à l’identité de ses héros lui permettent de les sacrer champions, conquérants et rois, elles sont aussi le moyen d’évoquer la complexité de l’histoire raciale des États-Unis. Les strates d’un passé culturel et personnel complexe s’entremêlent dans les pictogrammes, hiéroglyphes et couches physiques de son art. Brève déclaration d’intention, Aaron est une relique vivante de la propre histoire de Basquiat et un exemple de l’extraordinaire puissance du jeune artiste.
Held in the same private collection for almost three decades, Untitled (1981) is a thrilling work that captures Jean-Michel Basquiat’s moment of transition from cult graffitist to global superstar. Its first owner was Diego Cortez: curator of the ground breaking ‘New York/New Wave’ exhibition at P.S.1 in February 1981 which launched the twenty-year-old Basquiat to widespread acclaim. Painted on a tall, glittering panel of scavenged metal weathered by its life in the city, the work exemplifies the streetwise ingenuity that caught Cortez’s eye. At the centre Basquiat has drawn a car labelled ‘MILK’, its chassis daubed in white acrylic; below in black is the name ‘AARON’, designating the baseball player Hank Aaron. This mythic evocation of Aaron—a hero of the sport who battled racism and abuse during his career, and who was formally inducted into the Baseball Hall of Fame in 1982—sets out a theme that would remain central to Basquiat’s work as he matured into a fully-fledged king of the New York art world.
Untitled’s graphic depiction of a car and its sharp use of metal, paint and pen situate it directly amid this seminal outburst of creativity. Biographer Eric Fretz wrote ‘Jean-Michel had by now developed his own iconography; his simple images of crowns, heads, airplanes, tepees, cars, and car crashes populated several works, along with his familiar lettering’ (E. Fretz, Jean-Michel Basquiat: An Autobiography, California 2010, p. 68). The influential dealer Henry Geldzahler, who shared an apartment with Cortez at the time, recalled being blown away by Basquiat’s work. ‘I bought a painting on the spot’, he said. ‘… I could see how incredibly sophisticated the work was and how young the kid was. I overpaid: I gave him $2,000 for a collage on a door to show him he could trust the world a bit’ (H. Geldzahler, quoted in P. Hoban, ‘Samo is Dead,’ New York Magazine, 26 September 1988, p. 40). Gallery representation and the interest of other major dealers swiftly followed, and Basquiat’s road to glory had begun.
Among Basquiat’s pantheon of black heroes, which included other baseball players, boxers such as Joe Louis and jazz artists like Charlie Parker and Thelonious Monk, Hank Aaron stands out as one of the most frequent cast members: his name is not only written in full, but also echoed in streams of iterated ‘A’s that sing throughout Basquiat’s early oeuvre. In elevating African-American athletes and musicians to royal or saintly status, Basquiat also frequently applied these associations to himself, conjuring a compound identity of majestic black personas. While his vibrant rehearsals of his heroes’ identities enabled him to celebrate them as champions, conquerors and kings, they also let him evoke the complexities of racial history in the United States. Intricate, intertwined strata of personal and cultural pasts are embedded in the pictograms, hieroglyphs and physical layers of his art. As a succinct statement of intent, Aaron is a vivid relic of Basquiat’s own story, and exemplary of the young artist’s extraordinary power.