TÊTE FANG
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TÊTE FANG

GABON

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TÊTE FANG
GABON
Haut. 35 cm (13 ¾ in.)
Provenance
Collection Maurice de Vlaminck (1876-1958), Paris
Collection Morris J. Pinto (1925-2009), Paris/New York
Alain de Monbrison, Paris
Collection Michel Périnet (1930-2020), Paris, acquis en 1983
Literature
Maes, J. et Lavachery, H., Art Nègre, Bruxelles, 1930, p. 105, pl. 38
Rubin, W., "Primitivism" in 20th Century Art: Affinity of the Tribal and the Modern, New York, 1984, vol. I, p. 231
Rubin, W., Le primitivisme dans l’art du 20e siècle : les artistes modernes devant l’art tribal, Paris, 1987, vol. I, p. 231
Exhibited
Bruxelles, Palais des Beaux-Arts, Art Nègre, 15 novembre - 31 décembre 1930
Further Details
FANG HEAD, GABON

Brought to you by

Alexis Maggiar
Alexis Maggiar International Head, Arts of Africa, Oceania & the Americas

Lot Essay

« GRANDEUR ET IMMOBILITÉ »
UN BYERI1 CHEZ LES FAUVES
par Bernard Dulon

Peu de gens se souviennent de Germaine van Parys qui devint pourtant en 1913 la première femme photographe de presse de Belgique. Malgré son travail brillant et inscrit dans la durée, sa réputation ne franchit que rarement les frontières de son pays. Cependant les amateurs des arts africains lui reconnaissent le mérite d’un cliché historique qu’elle réalisa en novembre 1930 dans le Palais des Beaux-Arts de Bruxelles. Malgré la modestie de la mise en situation, elle conçut une image bouleversante, digne de Walker Evans. Ce jour-là, sous l’égide d’Henri Lavachery, étaient exposées en cimaises trois icônes de l’art Fang du Gabon. A ces oeuvres immortelles étaient associés les noms prestigieux de Paul Guillaume, André Derain, Jacob Epstein et Maurice de Vlaminck. Nous étions loin déjà de la vague qui porta les peintres fauves à se penser autrement mais, en cette occasion, Bruxelles découvrait à son tour que l’art était peut-être né en Afrique et, qu’en tous cas, il y avait pris racine.

Presque cent ans plus tard, deux d’entre elles se pavanent dans la salle consacrée aux arts d’Afrique du Metropolitan Museum. La troisième et peut-être la plus sensible, provient de la collection du peintre Maurice de Vlaminck et figure sur la gauche du document. Conservée avec respect par des connaisseurs au fait de son importance, elle effectue aujourd’hui sa réapparition. Il convient de célébrer l’évènement à sa mesure car, pour reprendre le mot de Guitry, convenons que Michel Périnet, son dernier propriétaire, était plutôt un collectionneur placard2 qui veillait sur ses trésors et les exposait fort peu.

Foin des controverses quant à une quelconque primauté de découverte, il est aujourd’hui reconnu que l’intérêt des peintres fauves pour les arts africains s’est affirmé dans le courant de l’année 1906. Vlaminck, Derain, Braque et Matisse furent les ferments de ce véritable engouement. C’est probablement cette même année qu’Ambroise Vollard fit réaliser par le fondeur François Rudier un tirage en bronze d’un masque Fang appartenant à Derain acquis de son ami Vlaminck. Au moment où le masque fut visible chez Vollard, l’art Fang s’offrait enfin aux regards des amateurs d’art du monde entier. Cependant, contemplation et tentatives d’assimilation des sculptures africaines menèrent peut-être les fauves dans une impasse artistique. Simple coïncidence sans doute, mais à partir de 1908, Vlaminck et Derain retournèrent à Cézanne, Braque vira cubiste et Matisse devint Matisse.

La tête Fang Vlaminck-Périnet est sculptée dans un magnifique bois dur à grain fin, proche de l’ébène (essence de bois mentionnée dès 1915 par Fernand Grébert « le Byeri est dans la boite, le buste est un ornement en ébène. »). Sous son grand front ovoïde, se dessine en creux le beau visage allongé en forme de coeur, au contour lisible dans le tracé des arcades sourcilières, prolongé aux commissures des lèvres. La fusion de ce dessin et d’une courbe épousant le rebord supérieur de chaque paupière pour venir mourir dans le contour du nez est la marque d’un maître sculpteur qui réalisa également une des oeuvres majeures de la collection Helena Rubinstein, presqu’une signature. Ses yeux mi-clos en amande offrent un regard serein. Sur ses lèvres entrouvertes se distinguent encore des traces de prélèvements médicinaux. Une coiffure trilobée orne l’arrière de son crâne dont la région occipitale porte les marques d’un autodafé cérémoniel ou guerrier. Sa patine noire, douce et profonde, lui confère comme une peau vivante et chaude.

[…] Les figures de reliquaire céphalomorphes sont d’une insigne rareté. Elles n’ont été produites que par les Fang-Betsi de la vallée de l’Ogooué qui ont également façonné des statuettes anatomiquement complètes. Au sein de l’ensemble des oeuvres Fang parvenues jusqu’à nous, la tête Vlaminck-Périnet s’impose comme l’oeuvre magistrale d’un sculpteur au sommet de son art. Juchée au sommet d’un long cou cylindrique, elle émerge de l’univers tourmenté des ancêtres, calme et tranquille telle une imperturbable reine donnant l’impression de la grandeur et de l’immobilité, écrivait Vlaminck3 peut-être en la rêvant.

1Byeri est un terme de langue Fang pouvant se traduire par ancêtre. Pour plus de commodités, il est utilisé couramment pour désigner les statuettes Fang qui, d’après les travaux de Louis Perrois, prennent en réalité le nom de eyema byeri (image de l’ancêtre) lorsqu’il s’agit d’une statuette en pied et de angokh nlo byeri (tête seule de l’ancêtre) lorsqu’il s’agit d’une simple tête
2Cité par Maurice Rheims dans Les Collectionneurs (1981), Sacha Guitry distinguait avec humour ceux d’entre eux qui partagent aisément la vue de leur collection, les vitrines, de ceux qui ne montrent rien, les placards
3« […] L’art africain parvient à donner l’impression de la grandeur et de l’immobilité… », Action, 1920, n° 3

“GRANDEUR AND IMMOBILITY”
A BYERI1 AMONG THE FAUVES
by Bernard Dulon

Few people remember the name of Germaine van Parys, but she became the first female photo journalist of Belgium in 1913. Despite her brilliant long-term work, her reputation is little-known outside her native country. However, African art aficionados recognise the value of the historical photo that she shot in November 1930 at the Palais des Beaux-Arts of Brussels. Despite the modest backdrop, she managed to capture a deeply moving image, on a level with those by Walker Evans. That day, three iconic artworks from Gabonese Fang art were being exhibited under the aegis of Henri Lavachery. These immortal works were associated with prestigious names such as Paul Guillaume, André Derain, Jacob Epstein and Maurice de Vlaminck. While this was already well after the movement that brought Fauvist painters to see things differently, Brussels was just discovering that art could also come from Africa, and that in any case, that was where it originated.

Nearly a century later, two of these figures were proudly displayed in the African art gallery of the Metropolitan Museum. The third, and perhaps most delicate, is from the collection of the painter Maurice de Vlaminck; it appears on the left of the document. Kept respectfully among the collections by connoisseurs because of its importance, it is resurfacing today. This should be celebrated as a significant event since, to cite Guitry, we should consider that its most recent owner, Michel Périnet, was a closet collector2 who jealously guarded his treasures and exhibited them very little.

But controversies over the claims of who was first to discover them aside, it is today recognised that the interest of Fauvist painters for African art was confirmed during the course of the year 1906. Vlaminck, Derain, Braque and Matisse instigated what became a true craze. It was probably in that same year that Ambroise Vollard commissioned the iron-master François Rudier to craft a bronze copy of a Fang mask that Derain had purchased from his friend Vlaminck. From the moment that the mask was put on display at Vollard’s gallery, Fang art finally came into the view of art aficionados the world over. Ironically, all the contemplation and attempts at assimilation of African sculptures might have driven the Fauvists into an artistic dead end. It might have been a coincidence, but from 1908, Vlaminck and Derain turned again to Cézanne, Braque veered into Cubism, and Matisse became Matisse.

The Vlaminck-Périnet Fang head is sculpted in a magnificent, finely-grained wood closely related to ebony (a type of wood mentioned by Fernand Grébert in 1915 with the passage “the Byeri is in the box, while the bust is an ebony ornament.”) Beneath its large ovoid forehead appears a long, beautiful, heart-shaped face. Its outline can be traced from the brow ridge to the corners of its lips. The fusion of this design with a curve along the upper edge of each eyelid, which reaches to the nose outline, is the signature mark of a master sculptor who also crafted one of the major pieces of the Helena Rubinstein collection. Its half-closed almond-shaped eyes gaze out serenely. On the lips, traces of medicinal residue are still visible. A trefoil headdress adorns the back of the skull, of which the occipital area bears the marks of a ceremonial or warrior ritual. Its soft, deep black patina lends it the appearance of warm, living skin.

[…] Cephalomorphic reliquary figures are remarkably rare. They were exclusively sculpted by the Fang-Betsi of the Ogooué Valley, who also carved anatomically complete statuettes. Among all the Fang works that have been recovered, the Vlaminck-Périnet head stands out as the majestic work of a sculptor at the pinnacle of his art. Perched at the top of a long, cylindrical neck, the image emerges, calm and tranquil, from the tormented world of the ancestors, like an impassive queen who creates an impression of grandeur and immobility, wrote Vlaminck3 perhaps dreaming of her.

1Byeri is a term from the Fang language that may be translated as “ancestor”. For convenience, the term is generally used to refer to Fang statuettes which, according to the research of Louis Perrois, more specifically take on the name eyema byeri (image of the ancestor) in the case of a full-body figure and angokh nlo byeri (head of the ancestor) in the case of a reliquary head
2Quoted by Maurice Rheims in Les Collectionneurs (1981), Sacha Guitry playfully distinguished those who easily share a glimpse of their collection - windows - from those who do not exhibit them, closets
3“[…] African art manages to express grandeur and immobility...”, Action, 1920, no. 3

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