TOUR DE FORCE D'EPOQUE RESTAURATION
TOUR DE FORCE D'EPOQUE RESTAURATION
1 More
Prospective purchasers are advised that several co… Read more DUCHESSE DE BERRY, PROTECTRICE DES ARTS
TOUR DE FORCE D'EPOQUE RESTAURATION

DIEPPE, TRES PROBABLEMENT ADRIEN-NICOLAS CLEMENCE POUR L'ATELIER BLARD, ENTRE 1816 et 1830

Details
TOUR DE FORCE D'EPOQUE RESTAURATION
DIEPPE, TRES PROBABLEMENT ADRIEN-NICOLAS CLEMENCE POUR L'ATELIER BLARD, ENTRE 1816 et 1830
En ivoire d'éléphant, simulant un temple à l'Antique, le fronton cintré sculpté des portraits de profil du duc et de la duchesse de Berry protégeant les Arts et les Sciences, l'entablement aux armes de la ville de Dieppe, les colonnes ajourées enveloppées d'une branche de lierre, le podium reposant sur quatre pieds en griffes, la figure de Mercure d'après Giambologna associée à l'ancien emplacement du miroir ; restaurations au toit
H: 35,5 cm. (14 in.) ; L.: 25 cm. (10 in.) ; P.: 14 cm. (5 ½ in.)
Provenance
Offert à Marie-Caroline de Bourbon, duchesse de Berry par la ville de Dieppe, soit à l'occasion de son mariage soit en 1829.
Collection de Son Altesse Royale la duchesse de Berry, Palais Vendramin Calergi, Grand Canal, Venise,
Très probablement sa vente, Paris, Hôtel Drouot, Maître Pillet, 8 mai 1865 et jours suivant, lot 41
Special Notice
Prospective purchasers are advised that several countries prohibit the importation of property containing materials from endangered species, including but not limited to coral, ivory and tortoiseshell. Accordingly, prospective purchasers should familiarize themselves with relevant customs regulations prior to bidding if they intend to import this lot into another country.
Further Details
A DIEPPE CARVED IVORY ARCH GIFT OFFERED TO MARIE CAROLINE DE BOURBON, DUCHESSE DE BERRY, ALMOST CERTAINLY ADRIEN-NICOLAS CLEMENCE FOR BLARD WORKSHOP, BEETWEEN 1816 AND 1830

Brought to you by

Simon de Monicault
Simon de Monicault Vice-President, Director Decorative Arts

Lot Essay

L’objet que nous avons le privilège de présenter est un des très rares et importants cadeaux de prestige offerts par la ville de Dieppe à sa bienfaitrice la duchesse de Berry. D’une taille importante considérant le matériau, d’une qualité d’exécution inouïe, ce chef-d’œuvre résume à lui seul une quantité de phénomènes artistiques et sociaux de la Restauration. Il représente l’importance nouvelle de la « Vie élégante » et de ses loisirs et la forte implication de la princesse royale dans la renaissance de l’art de l’ivoire.

L’ivoire à Dieppe : une tradition multiséculaire

Situé à l'embouchure de l'Arques, porte sur la mer de la vallée du Pays de Caux, Dieppe est un port de la Manche à l’importance historique capitale. L’ivoire y est importé depuis au moins 1379. En transit pour Rouen ou Paris, le précieux matériau est petit à petit directement travaillé sur place. On observe alors au XVIe siècle un lent mais sûr essor de l’artisanat, si bien qu’aux XVIIe et XVIIIe, Dieppe devient un centre incontournable aux œuvres recherchées. Des dynasties comme celle des Belleteste s’y sont illustrées et grâce à elles Dieppe demeure encore aujourd’hui pour les amateurs une référence mondiale de l’ivoirerie post médiévale. La Révolution cependant marque un coup d’arrêt à cet art luxueux et les guerres menées par Napoléon laissent à la ville de Dieppe une activité et une économie moribondes. A ce triste constat la duchesse de Berry allait tout changer, ressuscitant avec le port, l’art qui de tout temps fit sa gloire.

Le rôle majeur de la duchesse de Berry

Certainement influencée par la mode anglaise et les habitudes contractées Outre-Manche durant son exil, la cour allait s’adonner, une fois la Restauration acquise, au tourisme balnéaire. Bien qu’arrivée de Naples en 1816 pour épouser Charles Ferdinand d’Artois, duc de Berry, c’est Marie-Caroline de Bourbon qui popularise la pratique des bains. A Dieppe ou est créée la première société anonyme des bains de mer, la princesse royale inaugure en 1824 les bains de mer Caroline, qui portent son prénom. Dotant la ville d’institutions de charité, relançant l’économie locale, inaugurant un théâtre, la duchesse de Berry se prend surtout de passion pour le travail des ivoiriers.

D’après le Vicomte de Reiset, « chaque année elle s’empressait de visiter les ateliers de Dieppe où l’on sculptait l’ivoire. Elle encourageait les ouvriers, s’intéressant à leurs travaux, et à chaque visite, faisait des achats en grand nombre » (Reiset, Marie-Caroline, duchesse de Berry, 1816-1830, Paris, 1906, p.319).

Un cadeau princier

Pour remercier cette mécène, tenue pour être la mère du futur Roi de France, la ville de Dieppe prit l’habitude de lui offrir chaque année un cadeau. « A son arrivée à Dieppe le 31 juillet 1824, elle reçoit des mains de douze jeunes filles dieppoises un navire en ivoire portant le nom de Saint-Ferdinand, en souvenir du vaisseau qui l’avait accompagnée de Naples en France en 1816 » nous rapporte également le vicomte de Reiset. Ambroise Milet ajoute qu’un autre navire lui sera offert en 1828 (A. Milet, Ivoire et ivoiriers de Dieppe, Paris, 1906, p.34).

Mais ce qui nous intéresse davantage, c’est de savoir que la duchesse de Berry reçut de la même façon cette superbe toilette que nous présentons à la vente. Les différentes sources citent deux objets de ce type offerts à Marie-Caroline de Berry, parfois confondus en un seul selon les auteurs.

Ambroise Milet dans son ouvrage (op. cit., pp.34-35) atteste de l’existence d’une « toilette offerte à la duchesse, en 1829, […] dans le tympan son portrait figuré par la Clémence protégeant les Arts, l’Industrie, le Commerce ; des enfants représentaient la Science et les Arts ; les Armoiries de Madame alternaient avec celles de la ville, et le contour du stylobate était orné d’une branche de lierre sans fin, symbole d’attachement."

Isabelle Leroy-Jay Lemaistre reprend ces informations et explique que « ces auteurs appellent toilette une sorte de miroir à poser sur une table de toilette, qui devait avoir une forme architecturale assez classique, avec colonnes, entablement et fronton" (in Un âge d’or des arts décoratifs, 1814-1848, cat. Exp. Grand Palais 1991, Paris, 1991, p.424).

Le rapprochement de cette pièce avec celle que nous présentons est évident. On retrouve sur notre temple néoclassique les armes de la ville de Dieppe, le portrait de la duchesse et les allégories mentionnées, ses armes et le lierre courant autour des colonnes. Mais quelques différences subsistent et la description ne mentionne pas le portrait de son époux le duc de Berry ni ses armes. Cet élément iconographique conduit certains à penser que notre objet a pu être offert comme cadeau, sinon de mariage, du moins lorsque le duc était vivant, entre 1816 et 1820.
Une autre source majeure, la biographie du vicomte de Reiset, relate qu’en 1830 « une toilette en ivoire, chef-d'œuvre de sculpture, venait d'être terminée pour être offerte à Madame le jour même de son arrivée. A ce moment môme, la révolution éclatait et venait détruire tous ces beaux projets » (Op. Cit. p. 331.). Pierre Ickowicz semble considérer que ces deux objets ne font qu’un et mentionne à son endroit le nom du sculpteur Adrien-Nicolas Clémence (P. Ickowicz, La duchesse de Berry et l’artisanat dieppois, in Cat. Exp. Entre Cour et Jardins – Marie-Caroline, duchesse de Berry, Paris, 2007, p. 71).

Le catalogue des objets d’art provenant du palais Vendramini et appartenant à la duchesse de Berry (Vente, Hotel Drouot, mars 1865) semble lui donner raison puisqu’une toilette seulement y ait mentionnée, sous le numéro 41 de la section sculpture, une « petite toilette en ivoire sculpté de forme monumentale à frise, enrichie d’ornements et portant le blason de la duchesse de Berri. Le fronton est enrichi d’un groupe de figures. Cette pièce porte les armes de la ville de Paris et le chiffre de Madame la duchesse. » … La ville de Dieppe et celle de Paris étant toutes deux symbolisées par un bateau sur les flots, on comprend aisément la confusion.

La duchesse de Berry, grand collectionneur de son temps

Amazone de l'épique révolte vendéenne, épouse et mère de prétendants au trône assassinés, la duchesse de Berry conserve aux yeux de ses admirateurs l’indéfectible image d’une grande princesse romantique. Pour l’amateur d’art, elle est également une figure incontournable. Son rôle fut prépondérant dans le renouveau de l’art français au lendemain de la défaite napoléonienne. Mieux, son goût eut une telle influence sur la production contemporaine que beaucoup parlent encore aujourd’hui d’un « goût » ou d’un « style duchesse de Berry ». Dans ses quatre résidences principales que furent le palais de l’Elysée, le pavillon de Marsan aux Tuileries, le château de Rosny et le palais Vendramini, elle déploya des trésors d’inventivité. Objets néogothiques, peintures troubadour ou des maîtres anciens, meubles « modernes » en bois d’Amboine, loupe d’orme et acajou, mobilier de cristal choisi chez Madame Desarnaud à l’enseigne de L’Escalier de Cristal, mobilier chinois livré par Jacob-Desmalter, bibliothèque aux plats romantiques des meilleurs relieurs, aucune dépense ne fut trop somptueuse. Parmi ces centaines d’œuvres, les objets en ivoire de Dieppe trouvaient bonne place. Après l’exil et malgré les revers de fortune, elle les conserva vaille que vaille, jusqu’à la vente de ses trésors en 1865.



More from The Exceptional Sale, Paris

View All
View All