Fernand Léger (1881-1955)
Provenant de la collection d'un amateur parisien
Fernand Léger (1881-1955)

Nature morte

Details
Fernand Léger (1881-1955)
Nature morte
signé et daté ‘F.LÉGER.28’ (en bas à droite); signé, daté et titré ‘NATURE.MORTE F.LÉGER.28’ (au revers)
huile sur toile
53.8 x 64.8 cm.
Peint en 1928

signed and dated ‘F.LÉGER.28’ (lower right); signed, dated and titled ‘NATURE.MORTE F.LÉGER.28’ (on the reverse)
oil on canvas
21 ¼ x 25 ½ in.
Painted in 1928
Provenance
Paul Rosenberg, Paris.
Galerie Jean-Claude Bellier, Paris.
Collection particulière, Paris (acquis auprès de celle-ci en 1976); vente, Christie's, Londres, 21 juin 2011, lot 51.
Acquis au cours de cette vente par le propriétaire actuel.
Literature
G. Bauquier, Fernand Léger, Catalogue raisonné de l'œuvre peint, 1925-1928, Paris, 1993, p. 280, no. 555 (illustré).
Exhibited
Paris, Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris, Passions privées. Collections particulières d'art moderne et contemporain en France, décembre 1995-mars 1996, p. 368, no. 6 (illustré en couleurs, p. 373).

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Tudor Davies
Tudor Davies

Lot Essay

Mobilisé pendant la Grande Guerre, Fernand Léger retourne ensuite à Paris où il se rapproche d’Amédée Ozenfant et de Charles-Édouard Jeanneret - plus connu sous le pseudonyme de «Le Corbusier» - fondateurs du purisme. Avec son ambition de «clarifier» l’art à travers le perfectionnement des formes et l’utilisation de couleurs pures, le purisme aura une influence décisive sur l'œuvre de Fernand Léger dans les années 1920. À cette époque, le peintre devient partisan du non-alignement, une tendance qu’il suivra tout au long de sa carrière artistique. Ainsi, il refuse de s’associer directement au programme de ses confrères : «le purisme ne m’a pas touché; trop maigre pour moi cette chose, ce monde clos, mais il fallait pourtant que cela soit fait, qu’on aille jusqu’à l’extrême» (F. Léger cité in J. Cassou et J. Leymarie, Léger : Dessins et gouaches, Londres, 1973, p. 87). Lorsqu’il peint Nature morte en 1928, ce sont des lignes sinueuses et des formes organiques qui peuplent dorénavant ses œuvres, désormais plus chargées et davantage spontanées. Après dix ans à expérimenter les préceptes rigoureux du purisme, Fernand Léger leur préfère une esthétique plus fluide et naturelle qui témoigne d’un certain déclin du style classique, adopté par certains artistes qui prônaient un «retour à l’ordre» durant l’après-guerre et se positionnaient en opposition face aux excès de l’avant-garde.
Le présent tableau représente une pipe, un clou, la partie supérieure d’une pièce en cuivre et, sur la droite, une forme incomplète qui s’apparente à celle d’une toile prête à être peinte. Comme apposées sur la collection d’objets disparates qui occupe le bas de la composition, deux figures aux allures de feuilles se cambrent à l’unisson, si semblables qu’elles semblent créées à partir d’un même modèle. L’aspect brillant des motifs centraux vient parachever le spectacle grandiose et semi-abstrait qu’offre le tableau. Libéré des carcans imposés par la tradition, l’agencement des formes et des objets de Nature morte donne naissance à une audacieuse harmonie qui souligne la supériorité de l’objet sur le sujet. En effet, en s’adonnant aux natures mortes conventionnelles et en focalisant son art sur les objets, Fernand Léger cherche à mettre à mal l’idée répandue du sujet-roi pour la remplacer par ce qu’il appelle le Nouveau Réalisme. «On avait déjà détruit le sujet en peinture, comme le film d’avant-garde avait détruit le scénario. J’ai pensé que c’était l’objet négligé, mal mis en valeur, qui était susceptible de remplacer le sujet,» explique-t-il pour résumer le mouvement en question (ibid., p. 87).
Christopher Green, quant à lui, évoque les incroyables prouesses de l’artiste à cette époque : «Les natures mortes et les objets que peignait alors Fernand Léger [...] possèdent toutes les qualités de ses premières œuvres mécaniques – une préparation minutieuse, une précision technique hors du commun, des formes picturales claires et standardisées, un intérêt pour les variations et la répétition ainsi qu’un équilibre parfait entre des forces en opposition – sans se départir de leur simplicité épurée; elles attestent d’une maîtrise du paradoxe spatial bien supérieure à celle dont il faisait preuve dans ses jeunes années. C’est à cette période que l’objet courant est devenu monument» (Léger and Purist Paris, cat. exp., Londres, 1970, p. 77, 79 et 80).
La composition de cette peinture est quasiment identique à celle d’un autre tableau daté de la même année qui a rejoint la collection de l’Art Institute of Chicago. Il se dégage de Nature Morte une formidable énergie, née du mariage exubérant et enjoué de formes qui, ensemble, prennent vie et parviennent à séduire celui qui les contemple.

Upon his return to Paris from service following the Great War, Fernand Léger took up allegiance with fellow artists Amedée Ozenfant and Charles- Edouard Jeanneret – better known as Le Corbusier – who together had founded the movement known as Purism. Aimed at “purifying” the arts through refinement of form and use of pure color, Purism would be the central influence upon Léger’s work throughout much of the 1920’s. Léger, adopting a stance of nonalignment which he would pursue throughout his long artistic career, did not directly associate himself with the Purist agenda, stating that, “Purism did not appeal to me. Too thin to me, that closed-in world. But it had to be done all the same; someone had to go to the extreme” (quoted in J. Cassou and J. Leymarie, Fernand Léger, Drawings and Gouaches, London, 1973, p. 87). By the time he painted Nature morte in 1928, Léger had begun to infuse his works with sinuous lines, organic shapes and a busier, more spontaneous composition. A decade of experimentation with the rigid geometries of Purism had given way to a more fluid, organic aesthetic. This signaled a decline in the “return to order” following the catastrophe of World War I, in which artists had adopted a classical style in reaction to the avant-garde excesses of the pre-war years.
Depicted in the present painting are a pipe, a nail, the top of a brass fitting and what appears, at the right of the picture, to be the edge of a prepared canvas. Over this miscellany of objects which sits towards the lower part of the composition stand two leaf-shaped forms, curving in unison as if fashioned from a template. The painted sheen Leger applies to these central motifs adds to the effect they impart of sumptuous, semi-abstract entertainment for the eye. Liberated from the constraints of traditional perspective, the arrangement of forms and objects within Nature morte creates a playful harmony which underscores the hierarchy of object over subject. Indeed, through his focus on the traditional still life genre at this time and the emphasis on objects, Léger sought to subvert the reign of the generically classicized subject, and to replace this with what he referred to as a New Realism. The artist summarised this stance as: “The subject in painting had already been destroyed, just as the avant-garde film had destroyed the story-line. I thought that the object, which had been neglected and poorly exploited, was the thing to replace the subject” (ibid., p. 87).
Christopher Green has summed up the artist’s impressive achievement of this period: “the still-lifes and the object paintings […] bring together all the qualities of his earlier mechanical works; the careful planning, the perfect precision of technique, the clear, standardized pictorial forms, the interest in both variations and repetition, the sense of balance between opposing forces; but they do so with an uncluttered simplicity and a controlled mastery of spatial paradox beyond the range of his earlier work... It was now that the common object acquired true monumentality” (Léger and Purist Paris, exh. cat., London, 1970, p. 77, 79 and 80).
The present painting shares an almost identical composition with another work from the same year now in the collection of the Art Institute of Chicago. Bursting with energy, Nature morte exhibits an exuberant, even playful combination of forms that is at once vibrant and beguiling.

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