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Amoureux des "petites solennités profanes"1, comme l'écrira Claude Roger-Marx, Edouard Vuillard a nourri son imaginaire par l'observation attentive de son univers familial. Dans Marie rêveuse et sa mère, l'artiste prend pour sujet ses deux modèles de prédilection, sa mère et sa soeur. Le trio venait de quitter l'appartement parisien de la rue de Miromesnil pour s'installer un peu plus loin dans les quartiers historiques de la rive droite, rue Saint-Honoré. Vuillard fréquentait à cette époque les cercles littéraires symbolistes et venait de rejoindre le groupe des Nabis, formé dès 1888 autour de Maurice Denis et de Paul Sérusier. Mais, avec Pierre Bonnard, il préféra rapidement au symbolisme religieux des thèmes empruntés à la vie quotidienne. Les scènes d'intérieur représentent ainsi la majorité de sa production de la décennie 1890.
Marie rêveuse et sa mère met en scène les deux figures domestiques se détachant dans la pénombre obscure de l'appartement. Sans conscience de la présence du peintre, elles évoluent à l'image de pantins ou d'ombres fantomatiques. Cette impression est renforcée par le traitement très simplifié des volumes de leur robe et de leur physionomie. Au premier plan, la mère de Vuillard représentée de profil semble être complètement absorbée dans son activité. Le visage de Marie, quant à lui, n'apparaît qu'au second plan. La jeune femme semble perdue dans ses songes, à l'instar de son attitude dans Le dîner vert exécuté la même année, en 1891 (Salomon et Cogeval, no. IV-4), autre composition de Vuillard qui la présente détachée de la réalité familiale.
Les deux figures s'opposent ainsi tout en étant fondues l'une dans l'autre, comme superposées dans le décor. Sans doute influencé par l'art de la photographie qu'il pratique alors, le peintre a opté pour un cadrage serré qui accentue encore cette impression de confinement. Vuillard excelle dans les jeux de lumière et de perspective. Provenant d'une source unique, l'éclairage intérieur s'oppose avec franchise à la pénombre épaisse qui règne dans la pièce. Ce vif contraste fait naître un climat de mystère très théâtral qui n'est pas étranger à l'intérêt que portera le peintre à la mise en scène et au décor. Refusant la banalité de son univers familial, le peintre Nabi parvient à créer ici une tension unique dans le temps de la narration. En transcendant la dimension décorative de sa peinture, il propose une autre vision du symbolisme, plus personnelle et intime.
Note:
1. C. Roger-Marx, Vuillard et son temps, Paris, 1946, cité dans J. Salomon, Vuillard, Paris, 1968, p. 98.
Marie rêveuse et sa mère met en scène les deux figures domestiques se détachant dans la pénombre obscure de l'appartement. Sans conscience de la présence du peintre, elles évoluent à l'image de pantins ou d'ombres fantomatiques. Cette impression est renforcée par le traitement très simplifié des volumes de leur robe et de leur physionomie. Au premier plan, la mère de Vuillard représentée de profil semble être complètement absorbée dans son activité. Le visage de Marie, quant à lui, n'apparaît qu'au second plan. La jeune femme semble perdue dans ses songes, à l'instar de son attitude dans Le dîner vert exécuté la même année, en 1891 (Salomon et Cogeval, no. IV-4), autre composition de Vuillard qui la présente détachée de la réalité familiale.
Les deux figures s'opposent ainsi tout en étant fondues l'une dans l'autre, comme superposées dans le décor. Sans doute influencé par l'art de la photographie qu'il pratique alors, le peintre a opté pour un cadrage serré qui accentue encore cette impression de confinement. Vuillard excelle dans les jeux de lumière et de perspective. Provenant d'une source unique, l'éclairage intérieur s'oppose avec franchise à la pénombre épaisse qui règne dans la pièce. Ce vif contraste fait naître un climat de mystère très théâtral qui n'est pas étranger à l'intérêt que portera le peintre à la mise en scène et au décor. Refusant la banalité de son univers familial, le peintre Nabi parvient à créer ici une tension unique dans le temps de la narration. En transcendant la dimension décorative de sa peinture, il propose une autre vision du symbolisme, plus personnelle et intime.
Note:
1. C. Roger-Marx, Vuillard et son temps, Paris, 1946, cité dans J. Salomon, Vuillard, Paris, 1968, p. 98.