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'Moi j'ai fait de la ferraille parce que je me suis retrouvé dans une usine de Villetaneuse où j'avais été hébergé par un petit industriel qui s'appelle Léon Jacques et c'est le fait d'avoir été hébergé dans cette usine qui m'a fait utiliser ce matériau.', César cité in Georges Boudaille,Conversation autour d'un pouce avec César, Les Lettres Françaises, 1965.
Le choix de la ferraille, du métal pauvre, n'a rien chez César de volontaire. C'est par défaut que l'artiste, jeune et sans le sou, opte pour cette matière sans valeur. 'Pour moi, nécessité faisant foi, je n'ai choisi la ferraille que parce que ça ne coûtait rien.' (César cité dans Bernard Blistène, Centre de la Vieille Charité, Marseille, 1993.). Mais c'est surtout une rencontre qui s'avèrera décisive dans la trajectoire du sculpteur : celle de Léon Jacques, patron d'une usine de sidérurgie au nord de Paris : les Ateliers de Villetaneuse. C'est Jean, le fils de Léon, qui introduira César auprès de cet homme peu friand de beaux-arts, mais qui se prendra d'affection pour l'artiste et le laissera piocher à sa guise parmi les amas de ferraille de son usine : tôles, tuyaux, boulons, barres et autres rebuts industriels de cette France d'après-guerre qui découvre la grande consommation d'objets manufacturés.
Aux côtés des ouvriers de l'usine, César perfectionne sa technique, s'initiant notamment à la soudure à l'arc, qui lui permet de travailler le fer par assemblage progressif, sans dessein préalable, renouant ainsi avec les découvertes du Picasso assembliste des années 1930, ou de Julio Gonzales qu'il admire tant. Hommage à la chimie (1955) incarne une belle illustration de cette première période, pendant laquelle César s'attachera à métamorphoser des rejets d'usine en des structures cohérentes, hommages à la société industrielle naissante.
César, l'homme du sud, passera douze ans dans ces ateliers de la banlieue parisienne. Puis, comme l'indique son ami Jean Jacques, il aura envie d'autres horizons, d'autres matériaux. Cette nouvelle liberté, il la trouvera dans le cuivre, que les professionnels ont l'habitude de comprimer en blocs massifs, plus facilement manipulables que les copeaux ou les tiges destinées à la refonte. César, fasciné depuis quelque temps par les cimetières de voiture où s'entassent tôles froissées et carcasses accidentées, réalise donc ses premières compressions à cette époque. Compression dirigée et Compression dirigée 'On est 2' sont deux des premiers exemples de ces oeuvres d'un genre nouveau dont Jean Jacques résume l'émerveillement qu'elles suscitent : 'César me fit cadeau de ces radiateurs d'automobiles d'avant-guerre, ouvragés comme des nids d'abeilles, mais écrasés, vaincus par une force et une volonté inhumaine.' ('Souvenirs des Ateliers de Villetaneuse' in catalogue de l'exposition 'Villetaneuse-souvenirs. César-Villetaneuse', 1999-2000.)
Enfin, plus tard, et encore une fois de manière involontaire (alors qu'il tente de mouler un Pouce avec un matériau qu'il ignorait jusqu'alors), César découvre les propriétés du polyuréthane qui, suite à une réaction chimique, engendre des formes molles, figeant la matière en mouvement, en pleine coulée. Comme dans Expansion orange, ces oeuvres tirent leur force et leur beauté de cette liberté de la matière, abandonnée à elle-même, sans plan préconçu du sculpteur.
Le groupe d'oeuvres de César de la collection de Monsieur Jean Jacques que nous présentons aujourd'hui, conclu par un Autoportrait de 1968, raconte avant tout l'histoire d'une amitié entre Jean, son père Léon, et l'artiste. Mais il synthétise aussi, par sa diversité, ce qui constitue l'essence du travail de César. De Hommage à la chimie à Expansion orange, assemblant d'abord un à un, sans modèle préétabli, les morceaux de ferraille de Villateneuse ; abandonnant plus tard des radiateurs d'automobile à la puissance de la presse à métaux ; laissant enfin la coulée de polyuréthane faire son oeuvre, l'artiste n'aura de cesse de cultiver l'imprévu et l'accident, qui ne sont que deux synonymes du mot liberté.
'I used scrap metal because I found myself in a factory in Villetaneuse where I had been taken in by a small-scale manufacturer called Lon Jacques and it is because I was taken into this factory that I used that material.'
César quoted in Georges Boudaille, Conversation autour d'un pouce avec César, Les Lettres Françaises, 1965.
The choice by César of scrap and low grade metal was in no way deliberate. The young and impoverished artist chose this worthless material by default. 'For me it was a question of necessity, I only chose scrap metal because it didn't cost anything.' (César quoted in Bernard Blistène, Centre de la Vieille Charité, Marseille, 1993.). But it was a meeting which would prove most decisive in the sculptor's development - a meeting with Léon Jacques, the boss of a steel production plant to the north of Paris, called the Ateliers de Villetaneuse. It was Jean, Léon's son, who would introduce César to this man who, although no great admirer of fine arts, became fond of the artist and allowed him to take his pick from the factory's scrap pile: steel sheets, pipes, bolts, bars and other industrial refuse from a post-war France just discovering the mass consumption of manufactured goods.
César perfected his technique alongside the factory workers, learning arc welding, which would allow him to work the iron through gradual assembly, without any prior design, reflecting Picasso's discoveries via assembly during the 1930s, or Julio Gonzalez of whom he was a great admirer. Hommage à la chimie (1955) is a good illustration of this first period, during which César sought to transform the factory's rejects into coherent structures, tributes to the nascent industrial society.
César, a southerner, would spend 12 years in these workshops in the Parisian suburbs. He then decided to explore other horizons and other materials, as his friend Jean Jacques recalled. He found this new freedom in copper, which professionals usually compact into solid blocks to make it easier to handle than chippings or rods intended for re-smelting. César, who had become fascinated by the graveyards of vehicles with their piles of crumpled bodywork and smashed shells, carried out his first compressions during this period. Compression dirigée and Compression dirigée 'On est 2' are two of the earliest examples of this new genre of work described by Jean Jacques, emphasizing the astonishment they aroused: 'César made me a gift of these pre-war car radiators, worked like bees' nests, but squashed, overcome by an inhuman strength and will.' ( 'Souvenirs des Ateliers de Villetaneuse' in the 'Villetaneuse-souvenirs. César-Villetaneuse' exhibition catalogue, 1999-2000).
Finally, later on, and again involuntarily (when he was trying to mould a Pouce statue using a material new to him), César discovered the properties of polyurethane which, following a chemical reaction, creates limp forms, fixing the material in movement as it is being poured. As in Expansion orange, these works draw their power and beauty from this freedom of material, left to its own devices, without any preconceived plan by the sculptor.
The group of works by César in the Jacques collection presented by us today, concluding a Self-portrait dating from 1968, is above all the story of a friendship between Jean, his father Léon, and the artist. But its diversity also summarizes what constitutes the essence of César's work. Firstly, from Hommage à la chimie to Expansion orange, by assembling the pieces of scrap from Villetaneuse, one by one, without any predefined model; then by abandoning the car radiators to the power of the metal press; and, finally, by allowing the flow of polyurethane to do its work, the artist constantly cultivates the unforeseen and accidental, which are simply two synonyms for the word freedom.
Le choix de la ferraille, du métal pauvre, n'a rien chez César de volontaire. C'est par défaut que l'artiste, jeune et sans le sou, opte pour cette matière sans valeur. 'Pour moi, nécessité faisant foi, je n'ai choisi la ferraille que parce que ça ne coûtait rien.' (César cité dans Bernard Blistène, Centre de la Vieille Charité, Marseille, 1993.). Mais c'est surtout une rencontre qui s'avèrera décisive dans la trajectoire du sculpteur : celle de Léon Jacques, patron d'une usine de sidérurgie au nord de Paris : les Ateliers de Villetaneuse. C'est Jean, le fils de Léon, qui introduira César auprès de cet homme peu friand de beaux-arts, mais qui se prendra d'affection pour l'artiste et le laissera piocher à sa guise parmi les amas de ferraille de son usine : tôles, tuyaux, boulons, barres et autres rebuts industriels de cette France d'après-guerre qui découvre la grande consommation d'objets manufacturés.
Aux côtés des ouvriers de l'usine, César perfectionne sa technique, s'initiant notamment à la soudure à l'arc, qui lui permet de travailler le fer par assemblage progressif, sans dessein préalable, renouant ainsi avec les découvertes du Picasso assembliste des années 1930, ou de Julio Gonzales qu'il admire tant. Hommage à la chimie (1955) incarne une belle illustration de cette première période, pendant laquelle César s'attachera à métamorphoser des rejets d'usine en des structures cohérentes, hommages à la société industrielle naissante.
César, l'homme du sud, passera douze ans dans ces ateliers de la banlieue parisienne. Puis, comme l'indique son ami Jean Jacques, il aura envie d'autres horizons, d'autres matériaux. Cette nouvelle liberté, il la trouvera dans le cuivre, que les professionnels ont l'habitude de comprimer en blocs massifs, plus facilement manipulables que les copeaux ou les tiges destinées à la refonte. César, fasciné depuis quelque temps par les cimetières de voiture où s'entassent tôles froissées et carcasses accidentées, réalise donc ses premières compressions à cette époque. Compression dirigée et Compression dirigée 'On est 2' sont deux des premiers exemples de ces oeuvres d'un genre nouveau dont Jean Jacques résume l'émerveillement qu'elles suscitent : 'César me fit cadeau de ces radiateurs d'automobiles d'avant-guerre, ouvragés comme des nids d'abeilles, mais écrasés, vaincus par une force et une volonté inhumaine.' ('Souvenirs des Ateliers de Villetaneuse' in catalogue de l'exposition 'Villetaneuse-souvenirs. César-Villetaneuse', 1999-2000.)
Enfin, plus tard, et encore une fois de manière involontaire (alors qu'il tente de mouler un Pouce avec un matériau qu'il ignorait jusqu'alors), César découvre les propriétés du polyuréthane qui, suite à une réaction chimique, engendre des formes molles, figeant la matière en mouvement, en pleine coulée. Comme dans Expansion orange, ces oeuvres tirent leur force et leur beauté de cette liberté de la matière, abandonnée à elle-même, sans plan préconçu du sculpteur.
Le groupe d'oeuvres de César de la collection de Monsieur Jean Jacques que nous présentons aujourd'hui, conclu par un Autoportrait de 1968, raconte avant tout l'histoire d'une amitié entre Jean, son père Léon, et l'artiste. Mais il synthétise aussi, par sa diversité, ce qui constitue l'essence du travail de César. De Hommage à la chimie à Expansion orange, assemblant d'abord un à un, sans modèle préétabli, les morceaux de ferraille de Villateneuse ; abandonnant plus tard des radiateurs d'automobile à la puissance de la presse à métaux ; laissant enfin la coulée de polyuréthane faire son oeuvre, l'artiste n'aura de cesse de cultiver l'imprévu et l'accident, qui ne sont que deux synonymes du mot liberté.
'I used scrap metal because I found myself in a factory in Villetaneuse where I had been taken in by a small-scale manufacturer called Lon Jacques and it is because I was taken into this factory that I used that material.'
César quoted in Georges Boudaille, Conversation autour d'un pouce avec César, Les Lettres Françaises, 1965.
The choice by César of scrap and low grade metal was in no way deliberate. The young and impoverished artist chose this worthless material by default. 'For me it was a question of necessity, I only chose scrap metal because it didn't cost anything.' (César quoted in Bernard Blistène, Centre de la Vieille Charité, Marseille, 1993.). But it was a meeting which would prove most decisive in the sculptor's development - a meeting with Léon Jacques, the boss of a steel production plant to the north of Paris, called the Ateliers de Villetaneuse. It was Jean, Léon's son, who would introduce César to this man who, although no great admirer of fine arts, became fond of the artist and allowed him to take his pick from the factory's scrap pile: steel sheets, pipes, bolts, bars and other industrial refuse from a post-war France just discovering the mass consumption of manufactured goods.
César perfected his technique alongside the factory workers, learning arc welding, which would allow him to work the iron through gradual assembly, without any prior design, reflecting Picasso's discoveries via assembly during the 1930s, or Julio Gonzalez of whom he was a great admirer. Hommage à la chimie (1955) is a good illustration of this first period, during which César sought to transform the factory's rejects into coherent structures, tributes to the nascent industrial society.
César, a southerner, would spend 12 years in these workshops in the Parisian suburbs. He then decided to explore other horizons and other materials, as his friend Jean Jacques recalled. He found this new freedom in copper, which professionals usually compact into solid blocks to make it easier to handle than chippings or rods intended for re-smelting. César, who had become fascinated by the graveyards of vehicles with their piles of crumpled bodywork and smashed shells, carried out his first compressions during this period. Compression dirigée and Compression dirigée 'On est 2' are two of the earliest examples of this new genre of work described by Jean Jacques, emphasizing the astonishment they aroused: 'César made me a gift of these pre-war car radiators, worked like bees' nests, but squashed, overcome by an inhuman strength and will.' ( 'Souvenirs des Ateliers de Villetaneuse' in the 'Villetaneuse-souvenirs. César-Villetaneuse' exhibition catalogue, 1999-2000).
Finally, later on, and again involuntarily (when he was trying to mould a Pouce statue using a material new to him), César discovered the properties of polyurethane which, following a chemical reaction, creates limp forms, fixing the material in movement as it is being poured. As in Expansion orange, these works draw their power and beauty from this freedom of material, left to its own devices, without any preconceived plan by the sculptor.
The group of works by César in the Jacques collection presented by us today, concluding a Self-portrait dating from 1968, is above all the story of a friendship between Jean, his father Léon, and the artist. But its diversity also summarizes what constitutes the essence of César's work. Firstly, from Hommage à la chimie to Expansion orange, by assembling the pieces of scrap from Villetaneuse, one by one, without any predefined model; then by abandoning the car radiators to the power of the metal press; and, finally, by allowing the flow of polyurethane to do its work, the artist constantly cultivates the unforeseen and accidental, which are simply two synonyms for the word freedom.