拍品专文
L'authenticité de cette oeuvre a été confirmée par Madame Yseult Riopelle.
L'oeuvre sera reproduite aux addenda du catalogue raisonné de Jean-Paul Riopelle actuellement en préparation.
Exécuté en 1954, Il était une fois de Jean-Paul Riopelle est un kaléidoscope d'éclairs de couleurs appliquées à la peinture à l'huile. Sur une toile immense de plus d'un mètre de haut sur près de deux mètres de large, une texture frémissante de peinture est appliquée au couteau et homogénéisée par un entrelacs serré de lignes de couleur. Comme dans toutes ses oeuvres, Riopelle fait de la couleur un spectacle. Il applique la peinture en couches épaisses de consistance crémeuse, ce qui inévitablement conduit le regard vers cette surface riche de nuances. Riopelle établit un système sensuel et physique qui donne à l'oeil le plaisir quasi charnel d'un fourmillement tactile. Composé avec la technique de la 'spatule', l'oeuvre possède une texture étonnamment dense, avec une masse tourbillonnante de marques s'opposant et se contrebalançant de façon spectaculaire pour s'assembler et former une surface matérielle épaisse et presque vivante. Immédiatement reconnaissable à ses taches de couleur qui s'unissent dans un tout organique, rythmique et dynamique, la surface du tableau est remplie de vie et invite le regard à virevolter au-dessus d'elle. Satisfait de la nature matérielle de son art, Riopelle crée une surface couverte d'un empâtement épais qui offre à l'observateur la chance de l'apprécier autant par le toucher que par la vue. Maîtrisant l'application de la peinture, Riopelle crée à l'envi des formes visuellement différenciables, nées d'amas palpables de peinture appliquée au couteau. Alors que ces formes pourraient sembler chaotiques et disposées au hasard, il suffit de prendre du recul par rapport à la toile pour obtenir la vision globale d'un ordre voulu, preuve que les marques sont organisées à dessein en un entremêlement de structures dynamiques mais finalement cohérentes.
Il était une fois a été achevé à un moment essentiel de la carrière de Riopelle. Ne se satisfaisant jamais d'un style unique, Riopelle était passé maître dans l'art de réinventer sa technique. Pendant toute sa carrière il s'est toujours efforcé de développer une esthétique personnelle qu'il a fait évoluer dans toutes ses toiles. Jusqu'alors son oeuvre était composée de giclées de peinture fluide qui s'enchevêtraient sur la toile dans un éventail de couleurs lui donnant un dynamisme rappelant le all over de Jackson Pollock. En revanche, dans des oeuvres comme Il était une fois, l'art de Riopelle commence à s'épanouir dans un style très personnel. Là où Pollock était encensé pour son action painting pour lequel le processus réel de création d'une oeuvre était aussi important que le résultat final, chez Riopelle, la technique est bien plus calculée et réfléchie, ce que l'artiste a souligné en écrivant dans une lettre à Pierre Matisse le 25 janvier 1954, 'Je ne connaissais pas Jackson Pollock en personne. C'est dommage parce que je pense qu'il est très intelligent et sincère. J'ai vu l'une de ses oeuvres pour la première fois à Paris en 1951, une toile que l'un des ses amis proches avait rapportée et avec qui j'avais eu une longue conversation qui confirma ce qui, à mon avis, est la grande différence de conception entre les deux méthodes d'exploration. Loin de partager une même cause, nous sommes en totale opposition' (J.-P. Riopelle cité dans Riopelle: Grands Formats, catalogue d'exposition, New York, Acquavella Contemporary Art, 2009, p. 23). Alors que les tableaux de Riopelle ne donnent aucunement l'impression d'avoir été méticuleusement travaillés, sa méthode qui consiste à appliquer avec soin la peinture au couteau pour créer cette mosaïque de losanges était radicalement différente de celle de Pollock qui consiste au sens vrai du terme à laisser s'égoutter de la peinture sur une toile posée à plat sur le sol. Cet ensemble d'oeuvres impressionnantes a suscité l'engouement de la critique. À 31 ans seulement, âge auquel il acheva ce tableau, Riopelle avait déjà été propulsé sur le devant de la scène internationale. À la fin de 1953 ses oeuvres avaient été exposées à Londres, dans la prestigieuse galerie Pierre Matisse à Paris, et figuraient à l'exposition consacrée aux jeunes peintres européens au Guggenheim.
Artiste canadien résidant en France, Riopelle a été considéré comme un étranger affranchi, conduisant à mettre en avant le lien entre son art et ses racines avec son pays natal. Le climat, la lumière, la couleur et l'espace canadiens se révélèrent vitaux dans la création d'une peinture si personnelle et unique, d'oeuvres 'enracinées' dans l'observation de la nature. Son art est évocateur des structures en évolution constante nées de l'observation des nuages, du ciel, de la lumière filtrant à travers les arbres ou des feuilles bruissant et se balançant doucement au gré du vent. S'il est patent que Riopelle n'illustre pas une scène particulière, l'application attrayante d'un empâtement se dissolvant globalement dans des halos atmosphériques de différentes couleurs et tonalités est en quelque sorte inspirée ou revitalisée par ces observations instructives. C'est plus une influence sur son subconscient. Riopelle a d'ailleurs déclaré un jour qu'il peignait dans une sorte de transe, évitant la pensée consciente ou les décisions picturales stratégiques. Il laisse son instinct prendre le dessus pour pouvoir contourner son intellect et éviter les pensées rationnelles qui auraient transformé son travail en une représentation plutôt qu'un produit de la Nature. 'La peinture doit aboutir toute seule', disait-il. 'C'est un processus... Je ne suis pas un de ces artistes recherchant un vert magnifique... Je ne me dis jamais, par exemple, que je dois peindre comme ceci ou comme cela pour obtenir un effet ou un autre. Si j'en arrive là, j'arrête. Cela devient dangereux... car à ce moment-là je suis sur le côté technique de la peinture. Il y a toujours une solution pour améliorer une oeuvre qui ne marche pas. Mais cela ne m'intéresse pas. Cela nuit à l'unité émotionnelle. Parce que la technique l'emportera malheureusement toujours.' (J.-P. Riopelle, cité dans M. Waldberg, Riopelle: The Absolute Gap, 1999, pp. 39-54).
L'oeuvre sera reproduite aux addenda du catalogue raisonné de Jean-Paul Riopelle actuellement en préparation.
Exécuté en 1954, Il était une fois de Jean-Paul Riopelle est un kaléidoscope d'éclairs de couleurs appliquées à la peinture à l'huile. Sur une toile immense de plus d'un mètre de haut sur près de deux mètres de large, une texture frémissante de peinture est appliquée au couteau et homogénéisée par un entrelacs serré de lignes de couleur. Comme dans toutes ses oeuvres, Riopelle fait de la couleur un spectacle. Il applique la peinture en couches épaisses de consistance crémeuse, ce qui inévitablement conduit le regard vers cette surface riche de nuances. Riopelle établit un système sensuel et physique qui donne à l'oeil le plaisir quasi charnel d'un fourmillement tactile. Composé avec la technique de la 'spatule', l'oeuvre possède une texture étonnamment dense, avec une masse tourbillonnante de marques s'opposant et se contrebalançant de façon spectaculaire pour s'assembler et former une surface matérielle épaisse et presque vivante. Immédiatement reconnaissable à ses taches de couleur qui s'unissent dans un tout organique, rythmique et dynamique, la surface du tableau est remplie de vie et invite le regard à virevolter au-dessus d'elle. Satisfait de la nature matérielle de son art, Riopelle crée une surface couverte d'un empâtement épais qui offre à l'observateur la chance de l'apprécier autant par le toucher que par la vue. Maîtrisant l'application de la peinture, Riopelle crée à l'envi des formes visuellement différenciables, nées d'amas palpables de peinture appliquée au couteau. Alors que ces formes pourraient sembler chaotiques et disposées au hasard, il suffit de prendre du recul par rapport à la toile pour obtenir la vision globale d'un ordre voulu, preuve que les marques sont organisées à dessein en un entremêlement de structures dynamiques mais finalement cohérentes.
Il était une fois a été achevé à un moment essentiel de la carrière de Riopelle. Ne se satisfaisant jamais d'un style unique, Riopelle était passé maître dans l'art de réinventer sa technique. Pendant toute sa carrière il s'est toujours efforcé de développer une esthétique personnelle qu'il a fait évoluer dans toutes ses toiles. Jusqu'alors son oeuvre était composée de giclées de peinture fluide qui s'enchevêtraient sur la toile dans un éventail de couleurs lui donnant un dynamisme rappelant le all over de Jackson Pollock. En revanche, dans des oeuvres comme Il était une fois, l'art de Riopelle commence à s'épanouir dans un style très personnel. Là où Pollock était encensé pour son action painting pour lequel le processus réel de création d'une oeuvre était aussi important que le résultat final, chez Riopelle, la technique est bien plus calculée et réfléchie, ce que l'artiste a souligné en écrivant dans une lettre à Pierre Matisse le 25 janvier 1954, 'Je ne connaissais pas Jackson Pollock en personne. C'est dommage parce que je pense qu'il est très intelligent et sincère. J'ai vu l'une de ses oeuvres pour la première fois à Paris en 1951, une toile que l'un des ses amis proches avait rapportée et avec qui j'avais eu une longue conversation qui confirma ce qui, à mon avis, est la grande différence de conception entre les deux méthodes d'exploration. Loin de partager une même cause, nous sommes en totale opposition' (J.-P. Riopelle cité dans Riopelle: Grands Formats, catalogue d'exposition, New York, Acquavella Contemporary Art, 2009, p. 23). Alors que les tableaux de Riopelle ne donnent aucunement l'impression d'avoir été méticuleusement travaillés, sa méthode qui consiste à appliquer avec soin la peinture au couteau pour créer cette mosaïque de losanges était radicalement différente de celle de Pollock qui consiste au sens vrai du terme à laisser s'égoutter de la peinture sur une toile posée à plat sur le sol. Cet ensemble d'oeuvres impressionnantes a suscité l'engouement de la critique. À 31 ans seulement, âge auquel il acheva ce tableau, Riopelle avait déjà été propulsé sur le devant de la scène internationale. À la fin de 1953 ses oeuvres avaient été exposées à Londres, dans la prestigieuse galerie Pierre Matisse à Paris, et figuraient à l'exposition consacrée aux jeunes peintres européens au Guggenheim.
Artiste canadien résidant en France, Riopelle a été considéré comme un étranger affranchi, conduisant à mettre en avant le lien entre son art et ses racines avec son pays natal. Le climat, la lumière, la couleur et l'espace canadiens se révélèrent vitaux dans la création d'une peinture si personnelle et unique, d'oeuvres 'enracinées' dans l'observation de la nature. Son art est évocateur des structures en évolution constante nées de l'observation des nuages, du ciel, de la lumière filtrant à travers les arbres ou des feuilles bruissant et se balançant doucement au gré du vent. S'il est patent que Riopelle n'illustre pas une scène particulière, l'application attrayante d'un empâtement se dissolvant globalement dans des halos atmosphériques de différentes couleurs et tonalités est en quelque sorte inspirée ou revitalisée par ces observations instructives. C'est plus une influence sur son subconscient. Riopelle a d'ailleurs déclaré un jour qu'il peignait dans une sorte de transe, évitant la pensée consciente ou les décisions picturales stratégiques. Il laisse son instinct prendre le dessus pour pouvoir contourner son intellect et éviter les pensées rationnelles qui auraient transformé son travail en une représentation plutôt qu'un produit de la Nature. 'La peinture doit aboutir toute seule', disait-il. 'C'est un processus... Je ne suis pas un de ces artistes recherchant un vert magnifique... Je ne me dis jamais, par exemple, que je dois peindre comme ceci ou comme cela pour obtenir un effet ou un autre. Si j'en arrive là, j'arrête. Cela devient dangereux... car à ce moment-là je suis sur le côté technique de la peinture. Il y a toujours une solution pour améliorer une oeuvre qui ne marche pas. Mais cela ne m'intéresse pas. Cela nuit à l'unité émotionnelle. Parce que la technique l'emportera malheureusement toujours.' (J.-P. Riopelle, cité dans M. Waldberg, Riopelle: The Absolute Gap, 1999, pp. 39-54).