拍品专文
This pair of monumental amaranth bookcases is a rare example of large Régence furniture pieces. As noted by A. Pradère in his monograph on the cabinetmaker Cressent: A survivor of the Grand Siècle, the bookcase is the piece of furniture par excellence of the years 1700-1730. This iconic piece of Régence collector's furniture was both a prestigious object and a bookcase designed to hold books, medals, precious or curious objects. It was part of the furnishing of any cabinet of curiosities. The amaranth veneer and its frieze compartments are richly ornamented with gilded bronze with acanthus leaves, scrolls and masks with men's heads, reminiscent of the masks used in appliqué work from the works of André-Charles Boulle to those of Charles Cressent. The general shape as well as the quality of the veneers indicate an unidentified craftsman of the calibre of these masters.
Although not stamped, the exceptional quality of this pair of bookcases allows us to compare it to the work of two great ébénistes from the beginning of the century: Charles Cressent and Joseph Poitou. Indeed, it’s in Charles Cressent’s work that the closest pieces of furniture, as regards to style and structure, can be found, even if these armoires, with their classical compartments inherited from the Louis XIV style, must undoubtedly be dated earlier. This style of cabinet with arched cornices is found in the sales of the cabinetmaker, first in 1749, then again in 1757, described as follows: "a bois satiné bookcase with two doors arched by the cornice, enriched with gold-coloured bronze ornaments in the best taste". It is possible to link this description to a cabinet with latticed doors sold in Rome, Semenzato sale, 21 June 1989, lot 69 (former S. Chalom, Marcel Bissey, Galerie Steinitz collections). But the closest model, identified by A. Pradère, is a pair of bookcases with two glass doors in amaranth and satin veneer (former Goncalves collection), sold in Monaco, Ader, 11 November 1984, lot 135 (A. Pradère, Charles Cressent, sculpteur, ébéniste du Régent, Dijon, 2003, p. 259, cat. 13-14). The same arched cornice overhanging the glass doors, the compartmented lower panels decorated with a frieze motif, the three vertical bands framing the doors and the circular gilt bronze rotating motif marking the centre of the doors are all present.
Although the similarity with Cressent's armoires is striking, the treatment of the gilded bronzes and the formal construction of the various panels are more inspired by earlier models from the end of the reign of Louis XIV, by Boulle and his sons, and seem to maybe predate Cressent's work by a few years. At this stage, it is appropriate to mention the Poitou dynasty, Philippe the father and Joseph the son. Philippe Poitou († 1709) married André-Charles Boulle's sister and worked in the master's workshop, where he specialised in metal inlay furniture. His son Joseph (master in 1717, † 1718) continued his father's activity, with a predilection for the use of amaranth and rosewood veneers. The inventory of his workshop made in 1719 after his death shows a prosperous activity. It lists several chests of drawers and armoires, with or without gilded bronzes, including an armoire " in amaranth wood ". We know of a cabinet of a model very close to our cabinets, but decorated with metal marquetry, sold in Paris, Galerie Georges Petit by Maitres Lair-Dubreuil and Albinet, 4 December 1922 (liquidation of the Styles company), lot 100. The general structure, the cornice, the placement of the gilded bronze sconces, in particular the alternating flowers and acanthus leaves at the cornice, the central rosette, the ornaments of the vertical bands and the feet, suggest they were made by the same workshop. Indeed, Joseph Poitou illustrates himself as a link between the work of Boulle (via his father) and that of Cressent by transposing models in metal marquetry to an amaranth veneer. The community of style with Cressent's cabinets can be explained: Cressent was a close collaborator of Joseph Poitou, certainly supplying him with a number of gilded bronzes. Although there is no certainty and any attribution would be risky, it seems reasonable to think that our cabinets must have been made in this circle of craftsmen working around 1720.
Cette paire de monumentales bibliothèques en amarante est un rare témoin des grands meubles d’époque Régence. Comme le rappelle A. Pradère dans sa monographie sur l’ébéniste Cressent : Survivance du Grand Siècle, l’armoire d’ébénisterie est le meuble d’apparat par excellence des années 1700-1730. Ce meuble emblématique du collectionneur de la Régence était à la fois un objet de prestige et un meuble de rangement, destiné à abriter livres, médailles, objets précieux ou curieux. Il faisait partie de l’ameublement de tout cabinet de curiosités. Au placage d’amarante et ses compartiments en frisage répond une riche ornementation de bronze doré à motifs de feuilles d’acanthe, enroulements et mascarons à têtes d’homme qui rappellent les masques employés en applique depuis les œuvres d’André-Charles Boulle jusqu’à celles de Charles Cressent. La forme générale comme la qualité des placages indiquent un artisan, non identifié, de la trempe de ces maîtres.
Bien que non estampillée, la qualité exceptionnelle de cette paire d’armoires nous permet de la rapprocher du travail de deux grands ébénistes de ce début du siècle : Charles Cressent et Joseph Poitou.
En effet, c’est tout d’abord dans l’œuvre de Charles Cressent que l’on retrouve les meubles les plus proches, structurellement et stylistiquement parlant, même si ces armoires, avec leur compartimentage classique hérité du style Louis XIV, doivent sans doute être datées antérieurement. Le type d’armoire à corniches cintrées se retrouve notamment dans les ventes de l’ébéniste, d’abord en 1749, puis de nouveau en 1757, décrit tel que suit : « une bibliothèque de bois satiné à deux portes cintrées par la corniche, enrichie d’ornements de bronze en couleur d’or du meilleur goût ». Il est possible de relier cette description à une armoire à portes grillagées vendue à Rome, vente Semenzato, 21 juin 1989, lot 69 (anciennes collections S. Chalom, Marcel Bissey, Galerie Steinitz). Mais le modèle le plus proche identifié par A. Pradère est une paire de bibliothèques à deux portes vitrées en placage d’amarante et satiné (ancienne collection Goncalves), vendue à Monaco, Ader, 11 novembre 1984, lot 135 (A. Pradère, Charles Cressent, sculpteur, ébéniste du Régent, Dijon, 2003, p. 259, cat. 13-14). On y retrouve la même corniche cintrée surplombant des portes vitrées, des panneaux inférieurs compartimentés ornés d’un motif de frisage, les trois plates-bandes verticales encadrant les portes ainsi que le motif circulaire tournant en bronze doré marquant le centre des portes.
Si la similitude avec les armoires de Cressent est frappante, le traitement des bronzes dorés ainsi que la construction formelle des différents panneaux présentent une inspiration plus marquée des modèles antérieurs, de la fin du règne de Louis XIV, de Boulle et ses fils et semblent peut être devoir être située quelques années avant l’œuvre de Cressent. À ce stade, il convient de citer la dynastie des Poitou, Philippe le père et Joseph le fils. Philippe Poitou († 1709) épousa la sœur d’André-Charles Boulle et travailla dans l’atelier du maître, où il se spécialisa notamment dans les meubles en marqueterie de métal. Son fils Joseph (maître en 1717, † 1718) poursuivit l’activité paternelle, avec une prédilection pour l’usage de placages en bois d’amarante, et de palissandre. L’inventaire de son atelier réalisé en 1719 après son décès, montre une activité prospère. Y figurent nombre de commodes et armoires, garnies ou non de bronzes dorés, dont une armoire en bois d’amarante. On connaît une armoire d’un modèle extrêmement similaire à nos armoires, mais ornée de marqueterie de métal, vendue à Paris, galerie Georges Petit par Mes Lair-Dubreuil et Albinet, 4 décembre 1922 (liquidation de la société Styles), lot 100. La structure générale, la corniche, l’emplacement des appliques de bronze doré, en particulier l’alternance de fleurs et feuilles d’acanthe à la corniche, le mascaron central, les ornements des plates-bandes verticales et des pieds, laissent penser à une fabrication du même atelier. Or Joseph Poitou s’illustre justement comme maillon entre l’œuvre de Boulle (via son père) et celle de Cressent en marquant la transposition de modèles en marqueterie de métal à un placage d’amarante. La communauté de style avec les armoires de Cressent s’expliquerait : Cressent fut un proche collaborateur de Joseph Poitou, lui fournissant certainement quantité de bronzes dorés. Bien qu’il n’existe aucune certitude et que toute attribution serait hasardeuse, il paraît raisonnable de penser que nos armoires ont dû être exécutées dans ce cercle d’artisans œuvrant autour de 1720.
Although not stamped, the exceptional quality of this pair of bookcases allows us to compare it to the work of two great ébénistes from the beginning of the century: Charles Cressent and Joseph Poitou. Indeed, it’s in Charles Cressent’s work that the closest pieces of furniture, as regards to style and structure, can be found, even if these armoires, with their classical compartments inherited from the Louis XIV style, must undoubtedly be dated earlier. This style of cabinet with arched cornices is found in the sales of the cabinetmaker, first in 1749, then again in 1757, described as follows: "a bois satiné bookcase with two doors arched by the cornice, enriched with gold-coloured bronze ornaments in the best taste". It is possible to link this description to a cabinet with latticed doors sold in Rome, Semenzato sale, 21 June 1989, lot 69 (former S. Chalom, Marcel Bissey, Galerie Steinitz collections). But the closest model, identified by A. Pradère, is a pair of bookcases with two glass doors in amaranth and satin veneer (former Goncalves collection), sold in Monaco, Ader, 11 November 1984, lot 135 (A. Pradère, Charles Cressent, sculpteur, ébéniste du Régent, Dijon, 2003, p. 259, cat. 13-14). The same arched cornice overhanging the glass doors, the compartmented lower panels decorated with a frieze motif, the three vertical bands framing the doors and the circular gilt bronze rotating motif marking the centre of the doors are all present.
Although the similarity with Cressent's armoires is striking, the treatment of the gilded bronzes and the formal construction of the various panels are more inspired by earlier models from the end of the reign of Louis XIV, by Boulle and his sons, and seem to maybe predate Cressent's work by a few years. At this stage, it is appropriate to mention the Poitou dynasty, Philippe the father and Joseph the son. Philippe Poitou († 1709) married André-Charles Boulle's sister and worked in the master's workshop, where he specialised in metal inlay furniture. His son Joseph (master in 1717, † 1718) continued his father's activity, with a predilection for the use of amaranth and rosewood veneers. The inventory of his workshop made in 1719 after his death shows a prosperous activity. It lists several chests of drawers and armoires, with or without gilded bronzes, including an armoire " in amaranth wood ". We know of a cabinet of a model very close to our cabinets, but decorated with metal marquetry, sold in Paris, Galerie Georges Petit by Maitres Lair-Dubreuil and Albinet, 4 December 1922 (liquidation of the Styles company), lot 100. The general structure, the cornice, the placement of the gilded bronze sconces, in particular the alternating flowers and acanthus leaves at the cornice, the central rosette, the ornaments of the vertical bands and the feet, suggest they were made by the same workshop. Indeed, Joseph Poitou illustrates himself as a link between the work of Boulle (via his father) and that of Cressent by transposing models in metal marquetry to an amaranth veneer. The community of style with Cressent's cabinets can be explained: Cressent was a close collaborator of Joseph Poitou, certainly supplying him with a number of gilded bronzes. Although there is no certainty and any attribution would be risky, it seems reasonable to think that our cabinets must have been made in this circle of craftsmen working around 1720.
Cette paire de monumentales bibliothèques en amarante est un rare témoin des grands meubles d’époque Régence. Comme le rappelle A. Pradère dans sa monographie sur l’ébéniste Cressent : Survivance du Grand Siècle, l’armoire d’ébénisterie est le meuble d’apparat par excellence des années 1700-1730. Ce meuble emblématique du collectionneur de la Régence était à la fois un objet de prestige et un meuble de rangement, destiné à abriter livres, médailles, objets précieux ou curieux. Il faisait partie de l’ameublement de tout cabinet de curiosités. Au placage d’amarante et ses compartiments en frisage répond une riche ornementation de bronze doré à motifs de feuilles d’acanthe, enroulements et mascarons à têtes d’homme qui rappellent les masques employés en applique depuis les œuvres d’André-Charles Boulle jusqu’à celles de Charles Cressent. La forme générale comme la qualité des placages indiquent un artisan, non identifié, de la trempe de ces maîtres.
Bien que non estampillée, la qualité exceptionnelle de cette paire d’armoires nous permet de la rapprocher du travail de deux grands ébénistes de ce début du siècle : Charles Cressent et Joseph Poitou.
En effet, c’est tout d’abord dans l’œuvre de Charles Cressent que l’on retrouve les meubles les plus proches, structurellement et stylistiquement parlant, même si ces armoires, avec leur compartimentage classique hérité du style Louis XIV, doivent sans doute être datées antérieurement. Le type d’armoire à corniches cintrées se retrouve notamment dans les ventes de l’ébéniste, d’abord en 1749, puis de nouveau en 1757, décrit tel que suit : « une bibliothèque de bois satiné à deux portes cintrées par la corniche, enrichie d’ornements de bronze en couleur d’or du meilleur goût ». Il est possible de relier cette description à une armoire à portes grillagées vendue à Rome, vente Semenzato, 21 juin 1989, lot 69 (anciennes collections S. Chalom, Marcel Bissey, Galerie Steinitz). Mais le modèle le plus proche identifié par A. Pradère est une paire de bibliothèques à deux portes vitrées en placage d’amarante et satiné (ancienne collection Goncalves), vendue à Monaco, Ader, 11 novembre 1984, lot 135 (A. Pradère, Charles Cressent, sculpteur, ébéniste du Régent, Dijon, 2003, p. 259, cat. 13-14). On y retrouve la même corniche cintrée surplombant des portes vitrées, des panneaux inférieurs compartimentés ornés d’un motif de frisage, les trois plates-bandes verticales encadrant les portes ainsi que le motif circulaire tournant en bronze doré marquant le centre des portes.
Si la similitude avec les armoires de Cressent est frappante, le traitement des bronzes dorés ainsi que la construction formelle des différents panneaux présentent une inspiration plus marquée des modèles antérieurs, de la fin du règne de Louis XIV, de Boulle et ses fils et semblent peut être devoir être située quelques années avant l’œuvre de Cressent. À ce stade, il convient de citer la dynastie des Poitou, Philippe le père et Joseph le fils. Philippe Poitou († 1709) épousa la sœur d’André-Charles Boulle et travailla dans l’atelier du maître, où il se spécialisa notamment dans les meubles en marqueterie de métal. Son fils Joseph (maître en 1717, † 1718) poursuivit l’activité paternelle, avec une prédilection pour l’usage de placages en bois d’amarante, et de palissandre. L’inventaire de son atelier réalisé en 1719 après son décès, montre une activité prospère. Y figurent nombre de commodes et armoires, garnies ou non de bronzes dorés, dont une armoire en bois d’amarante. On connaît une armoire d’un modèle extrêmement similaire à nos armoires, mais ornée de marqueterie de métal, vendue à Paris, galerie Georges Petit par Mes Lair-Dubreuil et Albinet, 4 décembre 1922 (liquidation de la société Styles), lot 100. La structure générale, la corniche, l’emplacement des appliques de bronze doré, en particulier l’alternance de fleurs et feuilles d’acanthe à la corniche, le mascaron central, les ornements des plates-bandes verticales et des pieds, laissent penser à une fabrication du même atelier. Or Joseph Poitou s’illustre justement comme maillon entre l’œuvre de Boulle (via son père) et celle de Cressent en marquant la transposition de modèles en marqueterie de métal à un placage d’amarante. La communauté de style avec les armoires de Cressent s’expliquerait : Cressent fut un proche collaborateur de Joseph Poitou, lui fournissant certainement quantité de bronzes dorés. Bien qu’il n’existe aucune certitude et que toute attribution serait hasardeuse, il paraît raisonnable de penser que nos armoires ont dû être exécutées dans ce cercle d’artisans œuvrant autour de 1720.