拍品專文
« Les processus sont ce qui m’intéresse (...) l’image n’est pas vraiment nécessaire. L’imprévisible est ce qui s'avère intéressant »
“The processes are what interest me, (...) the picture is not really necessary. The unforeseeable is what turns out to be interesting”
— SIGMAR POLKE
Sigmar Polke est l’un des artistes les plus créatifs et les plus radicaux du XXe siècle. Engagé dans une recherche à la fois sur les matériaux et les processus, son atelier devient un laboratoire où il peut tester ses idées sans risques. Il en résulte un impressionnant corpus d’oeuvres où il allie images, matériaux et processus de manière nouvelle et originale, associant des références historiques aux médiums contemporains pour inventer des façons totalement neuves de créer des images. « Les processus sont ce qui m’intéresse, » a déclaré Polke. « L’image n’est pas vraiment nécessaire. L’imprévisible est ce qui s’avère intéressant » (S. Polke, cité in Sigmar Polke Farbproben-Materiealversuche-Probierbilder aus den Jahren 1973-1986, catalogue d’exposition, Galerie Klein, Bad Münstereifel, 1999, non publié).
Dans Was Machen die Rudden in Mexico, 1982, Polke réunit une gamme de thèmes, de techniques et de médiums en un tableau particulièrement hypnotique. Il associe travail au pinceau, explosions de pigments, images kitsch de sombreros et formes au pochoir pour créer une composition qui réévalue les règles établies de compréhension artistique. Avec sa dextérité manuelle et intellectuelle caractéristique, Polke extrait un sens nouveau au travers de ces juxtaposions et de ces strates. Ce faisant, il prouve que loin d’être une pratique redondante à une époque de communication électronique instantanée, la peinture reste un médium riche de nombreuses ressources et qui demeure une forme de communication pertinente dans une société marquée par l’accélération et l’instantanéité.
Comme c’est le cas dans les oeuvres les plus emblématiques de l’artiste, la stratification complexe des images et des techniques engendre un patchwork riche d’associations. La partie supérieure de l’oeuvre semble être constituée d’une large pièce de jute trouvé, imprimée de bandes de motifs géométriques et de sombreros. À ceci, Polke ajoute ses propres interventions picturales, de larges étendues de peinture blanche qui ornent la partie supérieure avant de se dissoudre autour des bords. La nature picturale de la composition se poursuit avec un passage plus large de pigment qui intervient là où la partie supérieure rejoint la partie inférieure. L’esprit nomade de Polke peut se voir dans l’abondance des formes qui décorent la partie inférieure plus large de la toile ; des motifs floraux vert et blanc parsemés d’explosions de pigment violet. Mais le motif qui domine toute la composition est la phalange militaire de silhouettes masculines que Polke fait défiler devant nous et qui occupe la partie centrale de la composition.
Comme pour une grande partie de l’oeuvre de l’artiste, les références introduites par Polke semblent à la fois tangibles et élusives. Peint en 1982, à la suite des jeux olympiques d’été de 1980 à Moscou, en grande partie boycottés, le titre Was Machen die Russen in Mexico (Que font les Russes au Mexique) semble faire allusion aux tensions sous-jacentes de la guerre froide. Il pourrait également faire référence à l’assassinat par la police secrète soviétique de l’ancien révolutionnaire Léon Trotsky au Mexique en 1940 - la phalange tracée au pochoir d’hommes enrégimentés est une puissante évocation du pouvoir considérable de l’État russe.
En fusionnant figuration et abstraction au travers d’une série de médiums – une image recouvrant l’autre pour communiquer l’idée que la réalité est en fait constituée de nombreuses couches de perceptions changeantes – Polke crée un monde unique qui existe en dehors des limites de la logique traditionnelle. Nourri de ses expériences avec une variété de substances hallucinogènes et de la conscience des limites de la perception normale qu’elles apportent, Polke poursuit en effectuant des recherches sur les erreurs et déformations d’impression électronique créées par la manipulation du processus de photocopie pour suggérer un monde de mystère et de magie plutôt que pour apporter sens ou clarté. Dans ce contexte, son esthétique est un dérangement strictement rationnel des sens et son oeuvre suit une approche logique presque scientifique. Cette approche prend comme point de départ le type de paradoxe scientifique introduit dans la physique quantique par le principe d’incertitude de Werner Heisenberg selon lequel « toute amélioration de la précision de la position se traduit par une moindre précision de la vitesse.» Ce qui, autrement dit, signifie que la réalité perçue est une illusion, ou au mieux une approximation de l’état réel des choses.
À de nombreux points de vue, Polke réinvente entièrement le rôle des artistes, les libérant des nécessités de la représentation, en faisant plutôt des alchimistes, transformant le physique en métaphysique. Dans des oeuvres comme Was Machen die Russen in Mexico il tente d’explorer les espaces entre logique conventionnelle et perception, au moyen d’une approche métaphysique qui tente de générer une magie poétique entre objets et images disparates. L’accent dans son oeuvre consiste à établir des relations visuelles étranges et surprenantes entre forme, couleur et sujet, de façon à forcer le spectateur à reconnaitre le sens et la logique sous-jacents à la vision du monde fondamentalement illogique de Polke.
Sigmar Polke was among the 20th century’s most radical and inventive artists. Committed to the investigation of both materials and processes, his studio became a laboratory where he could test out his ideas with impunity. The result was an impressive body of work in which he would combine imagery, materials and processes in new and unusual ways, combining art historical references with contemporary media to create entirely new ways of image making. “The processes are what interest me,” Polke once said. “The picture is not really necessary. The unforeseeable is what turns out to be interesting.” (S. Polke, quoted in Sigmar Polke Farbproben-Materiealversuche-Probierbilder aus den Jahren 1973-1986, exh. cat., Galerie Klein, Bad Münstereifel, 1999, n.p.).
In Was Machen die Rudden in Mexico from 1982, Polke draws together a range of themes, techniques and media into one engaging painting. He combines painterly brushwork, bursts of pigment, kitsch imagery of sombrero, and a stenciled imagery to create a composition that re-assesses the established rules of artistic comprehension. With his characteristic dexterity of both hand and mind, Polke has extracted new meaning through this layering and juxtapositioning. In doing so he proves that far from being a redundant practice in this era of instant electronic communication, painting remains a resourceful medium that continues to be a relevant form of communication in today’s fast-paced and instantaneous society.
As with the best examples of the artist’s work, here the complex laying of both imagery and technique produces a rich tapestry of associations. The upper portion of the work appears to be comprised of a wide strip piece of found hessian material printed with bands of geometric patterns and sombrero motifs. To this, Polke adds his own painterly interventions, broad swathes of white paint that embellish the extreme upper edge, before dissolving around the edges. The painterly nature of the composition continues with a larger passage of pigment that occurs where the upper section joins the more substantial lower portion. The nomadic continuation of Polke’s mind can be seen in the abundance of forms that adorn the lower, larger section of canvas; green and white floral patterns being interspersed with bursts of purple pigment. But the motif which dominates the entire composition as a whole, is the regimented phalanx of male figures that Polke parades before us, commanding the central section of the composition.
As with much of the artist’s work, the references that Polke includes seem tangible, yet at the same time, elusive. Painted in 1982, in the wake of the heavily boycotted 1980 Summer Olympics in Moscow, the title Was Machen die Rudden in Mexico (which translates as ‘What the Russians do in Mexico’), seems to exude the continuing tensions of the Cold War. It could also be a reference to the assassination by the Soviet secret police of the former revolutionary Leon Trotsky in Mexico in 1940—the stenciled phalanx of regimented men acting as a potent reminder of the far reaching power of the Russian state.
By fusing figuration and abstraction through a variety of media to layer one image over another to convey the idea that reality is in fact made up of many shifting layers of perception, Polke has created a unique world that exists outside the bounds of conventional logic. Fueled by his experiments with a variety of hallucinogens and the psychedelic awareness of the limitations of normal perception that they provided, Polke would go on to investigate electronic printing mistakes and distortions caused by manipulating the photocopy process to suggest a world of mystery and magic rather than to suggest clarity or meaning. In this respect his aesthetic is a strictly rational derangement of the senses, and his work follows a logical almost scientific procedural approach. It is an approach that takes as its starting point the kind of scientific paradox introduced to quantum physics by Werner Heisenberg’s ‘Uncertainty Principle’ which declares that ‘the more precisely the position is determined, the less precisely the momentum is known’. This, in other words, means that perceived reality is an illusion and at best only an approximation of the real state of affairs.
In many ways, Polke completely reinvented the role of the artist, liberating them from the necessities of representation and instead turning them into alchemists, morphing the physical into the metaphysical. In works such as Untitled he attempts to explore the gaps that exist in conventional logic and perception through a metaphysical approach that attempts to generate a poetic magic between disparate images and objects. The emphasis in his work is on establishing strange and surprising visual relationships between form, color and subject in such a way that the viewer is forced to recognize the underlying sense and logic of Polke’s fundamentally illogical view of the world.
“The processes are what interest me, (...) the picture is not really necessary. The unforeseeable is what turns out to be interesting”
— SIGMAR POLKE
Sigmar Polke est l’un des artistes les plus créatifs et les plus radicaux du XXe siècle. Engagé dans une recherche à la fois sur les matériaux et les processus, son atelier devient un laboratoire où il peut tester ses idées sans risques. Il en résulte un impressionnant corpus d’oeuvres où il allie images, matériaux et processus de manière nouvelle et originale, associant des références historiques aux médiums contemporains pour inventer des façons totalement neuves de créer des images. « Les processus sont ce qui m’intéresse, » a déclaré Polke. « L’image n’est pas vraiment nécessaire. L’imprévisible est ce qui s’avère intéressant » (S. Polke, cité in Sigmar Polke Farbproben-Materiealversuche-Probierbilder aus den Jahren 1973-1986, catalogue d’exposition, Galerie Klein, Bad Münstereifel, 1999, non publié).
Dans Was Machen die Rudden in Mexico, 1982, Polke réunit une gamme de thèmes, de techniques et de médiums en un tableau particulièrement hypnotique. Il associe travail au pinceau, explosions de pigments, images kitsch de sombreros et formes au pochoir pour créer une composition qui réévalue les règles établies de compréhension artistique. Avec sa dextérité manuelle et intellectuelle caractéristique, Polke extrait un sens nouveau au travers de ces juxtaposions et de ces strates. Ce faisant, il prouve que loin d’être une pratique redondante à une époque de communication électronique instantanée, la peinture reste un médium riche de nombreuses ressources et qui demeure une forme de communication pertinente dans une société marquée par l’accélération et l’instantanéité.
Comme c’est le cas dans les oeuvres les plus emblématiques de l’artiste, la stratification complexe des images et des techniques engendre un patchwork riche d’associations. La partie supérieure de l’oeuvre semble être constituée d’une large pièce de jute trouvé, imprimée de bandes de motifs géométriques et de sombreros. À ceci, Polke ajoute ses propres interventions picturales, de larges étendues de peinture blanche qui ornent la partie supérieure avant de se dissoudre autour des bords. La nature picturale de la composition se poursuit avec un passage plus large de pigment qui intervient là où la partie supérieure rejoint la partie inférieure. L’esprit nomade de Polke peut se voir dans l’abondance des formes qui décorent la partie inférieure plus large de la toile ; des motifs floraux vert et blanc parsemés d’explosions de pigment violet. Mais le motif qui domine toute la composition est la phalange militaire de silhouettes masculines que Polke fait défiler devant nous et qui occupe la partie centrale de la composition.
Comme pour une grande partie de l’oeuvre de l’artiste, les références introduites par Polke semblent à la fois tangibles et élusives. Peint en 1982, à la suite des jeux olympiques d’été de 1980 à Moscou, en grande partie boycottés, le titre Was Machen die Russen in Mexico (Que font les Russes au Mexique) semble faire allusion aux tensions sous-jacentes de la guerre froide. Il pourrait également faire référence à l’assassinat par la police secrète soviétique de l’ancien révolutionnaire Léon Trotsky au Mexique en 1940 - la phalange tracée au pochoir d’hommes enrégimentés est une puissante évocation du pouvoir considérable de l’État russe.
En fusionnant figuration et abstraction au travers d’une série de médiums – une image recouvrant l’autre pour communiquer l’idée que la réalité est en fait constituée de nombreuses couches de perceptions changeantes – Polke crée un monde unique qui existe en dehors des limites de la logique traditionnelle. Nourri de ses expériences avec une variété de substances hallucinogènes et de la conscience des limites de la perception normale qu’elles apportent, Polke poursuit en effectuant des recherches sur les erreurs et déformations d’impression électronique créées par la manipulation du processus de photocopie pour suggérer un monde de mystère et de magie plutôt que pour apporter sens ou clarté. Dans ce contexte, son esthétique est un dérangement strictement rationnel des sens et son oeuvre suit une approche logique presque scientifique. Cette approche prend comme point de départ le type de paradoxe scientifique introduit dans la physique quantique par le principe d’incertitude de Werner Heisenberg selon lequel « toute amélioration de la précision de la position se traduit par une moindre précision de la vitesse.» Ce qui, autrement dit, signifie que la réalité perçue est une illusion, ou au mieux une approximation de l’état réel des choses.
À de nombreux points de vue, Polke réinvente entièrement le rôle des artistes, les libérant des nécessités de la représentation, en faisant plutôt des alchimistes, transformant le physique en métaphysique. Dans des oeuvres comme Was Machen die Russen in Mexico il tente d’explorer les espaces entre logique conventionnelle et perception, au moyen d’une approche métaphysique qui tente de générer une magie poétique entre objets et images disparates. L’accent dans son oeuvre consiste à établir des relations visuelles étranges et surprenantes entre forme, couleur et sujet, de façon à forcer le spectateur à reconnaitre le sens et la logique sous-jacents à la vision du monde fondamentalement illogique de Polke.
Sigmar Polke was among the 20th century’s most radical and inventive artists. Committed to the investigation of both materials and processes, his studio became a laboratory where he could test out his ideas with impunity. The result was an impressive body of work in which he would combine imagery, materials and processes in new and unusual ways, combining art historical references with contemporary media to create entirely new ways of image making. “The processes are what interest me,” Polke once said. “The picture is not really necessary. The unforeseeable is what turns out to be interesting.” (S. Polke, quoted in Sigmar Polke Farbproben-Materiealversuche-Probierbilder aus den Jahren 1973-1986, exh. cat., Galerie Klein, Bad Münstereifel, 1999, n.p.).
In Was Machen die Rudden in Mexico from 1982, Polke draws together a range of themes, techniques and media into one engaging painting. He combines painterly brushwork, bursts of pigment, kitsch imagery of sombrero, and a stenciled imagery to create a composition that re-assesses the established rules of artistic comprehension. With his characteristic dexterity of both hand and mind, Polke has extracted new meaning through this layering and juxtapositioning. In doing so he proves that far from being a redundant practice in this era of instant electronic communication, painting remains a resourceful medium that continues to be a relevant form of communication in today’s fast-paced and instantaneous society.
As with the best examples of the artist’s work, here the complex laying of both imagery and technique produces a rich tapestry of associations. The upper portion of the work appears to be comprised of a wide strip piece of found hessian material printed with bands of geometric patterns and sombrero motifs. To this, Polke adds his own painterly interventions, broad swathes of white paint that embellish the extreme upper edge, before dissolving around the edges. The painterly nature of the composition continues with a larger passage of pigment that occurs where the upper section joins the more substantial lower portion. The nomadic continuation of Polke’s mind can be seen in the abundance of forms that adorn the lower, larger section of canvas; green and white floral patterns being interspersed with bursts of purple pigment. But the motif which dominates the entire composition as a whole, is the regimented phalanx of male figures that Polke parades before us, commanding the central section of the composition.
As with much of the artist’s work, the references that Polke includes seem tangible, yet at the same time, elusive. Painted in 1982, in the wake of the heavily boycotted 1980 Summer Olympics in Moscow, the title Was Machen die Rudden in Mexico (which translates as ‘What the Russians do in Mexico’), seems to exude the continuing tensions of the Cold War. It could also be a reference to the assassination by the Soviet secret police of the former revolutionary Leon Trotsky in Mexico in 1940—the stenciled phalanx of regimented men acting as a potent reminder of the far reaching power of the Russian state.
By fusing figuration and abstraction through a variety of media to layer one image over another to convey the idea that reality is in fact made up of many shifting layers of perception, Polke has created a unique world that exists outside the bounds of conventional logic. Fueled by his experiments with a variety of hallucinogens and the psychedelic awareness of the limitations of normal perception that they provided, Polke would go on to investigate electronic printing mistakes and distortions caused by manipulating the photocopy process to suggest a world of mystery and magic rather than to suggest clarity or meaning. In this respect his aesthetic is a strictly rational derangement of the senses, and his work follows a logical almost scientific procedural approach. It is an approach that takes as its starting point the kind of scientific paradox introduced to quantum physics by Werner Heisenberg’s ‘Uncertainty Principle’ which declares that ‘the more precisely the position is determined, the less precisely the momentum is known’. This, in other words, means that perceived reality is an illusion and at best only an approximation of the real state of affairs.
In many ways, Polke completely reinvented the role of the artist, liberating them from the necessities of representation and instead turning them into alchemists, morphing the physical into the metaphysical. In works such as Untitled he attempts to explore the gaps that exist in conventional logic and perception through a metaphysical approach that attempts to generate a poetic magic between disparate images and objects. The emphasis in his work is on establishing strange and surprising visual relationships between form, color and subject in such a way that the viewer is forced to recognize the underlying sense and logic of Polke’s fundamentally illogical view of the world.