拍品專文
Cette œuvre devra être présentée au comité des Archives Jannis Kounellis en février / mars 2022, à la charge de Christie’s.
« Je n’ai recherché que choses très belles. J’ai mesuré la distance par rapport à l’objectif. J’ai vu le sacré dans l’objet d’usage quotidien. J’ai cru dans le poids comme juste mesure. […] Je veux le retour de la poésie par tous les moyens : par la pratique, par l’observation, par la solitude, par le verbe, par l’image, par l’éversion ». J. Kounellis
“ I have always looked for very beautiful things. I measured the distance from objectives. I saw the holy in everyday object. I believed in weight as a fair measure. […] I want to go back to poetry by every means: by practice, by observation, by solitude, by images, through eversion.” - J. Kounellis
Exécutée en 1987 et exposée la même année à la Biennale de São Paulo, la présente œuvre est un spécimen complexe et ambitieux des reliefs muraux métalliques de Jannis Kounellis. Conservée dans la même collection privée depuis trois décennies, elle se compose de six panneaux d’aluminium, chacun orné de formes matérielles abstraites : plâtre, fer, cire, bois, laine et toile de jute s’assemblent en de curieuses formations d’un autre monde, comme détachés de toute fonction terrestre. Chef de file de l’Arte Povera, Kounellis appartient à une génération d’artistes, qui prête un riche potentiel métaphysique aux humbles matériaux du quotidien. Ses reliefs muraux, écrit la conservatrice Nancy Spector, « rappellent morphologiquement la peinture » avec leur « fusion de substances organiques et inorganiques [qui symbolise] la nature changeante et imprévisible de la signification dans l’art » (N. Spector, citée sur https://www.guggenheim.org/artwork/2377). Montés comme une suite de toiles, les panneaux de la présente œuvre semblent chargés d’une logique symbolique, se refusant toutefois à livrer toute forme de récit au-delà de leur composition matérielle brute. D’autres exemples de la même période sont conservés dans des institutions telles que le Musée Solomon R. Guggenheim de New York et le Musée d’art moderne de San Francisco.
Né dans le port commercial grec du Pirée, Kounellis s’installe à Rome en 1956. Il s’oriente dès le début vers une pratique conceptuelle : ses premières œuvres, Alfabeti ou Alphabet Paintings, se composent de lettres et de chiffres fragmentés que l’artiste « interprète » à haute voix tout au long de son travail, annihilant ainsi leurs propriétés sémantiques. Cette série donne le ton de ce que sera l’œuvre de Kounellis : bien que son travail des matériaux de récupération le classe parmi des artistes, tels que Mario Merz, Giulio Paolini et Luciano Fabro, son œuvre soulève des questions bien plus vastes sur la manière dont nous exploitons les formes et les matériaux pour leur donner un sens. À l’instar des créations d’Alberto Burri et d’Antoni Tàpies, précurseurs majeurs du mouvement Arte Povera, la présente œuvre fait allusion à un ordre, un raisonnement supérieurs tout en rejetant en définitive toute tentative de « lire » son contenu. Nombreux sont ceux qui décèlent dans le travail de Kounellis l’influence de son enfance, évoquant ses journées passées à regarder le flux incessant de cargos industriels aller et venir dans son port natal. L’utilisation répétée de certaines substances et formes dans l’ensemble de son œuvre, lui confère une impression de déjà-vu : chacun des panneaux nous semble à la fois familier et étranger, portant la lueur de souvenirs vaporeux et intangibles.
Pour Kounellis, la toile de fond métallique de ses reliefs muraux est telle une « feuille de papier », considérant plus largement ses œuvres comme des peintures. « Dans les années 1960, on m’a qualifié d’« artiste » car personne ne savait comment définir un tas de charbon », explique-t-il. « Mais je suis un peintre et je revendique mon initiation à la peinture car la peinture est la construction des images, elle n’indique aucunement une manière et encore moins une technique. Chaque peintre a sa propre vision et ses propres méthodes de construction de l’image » (J. Kounellis, cité dans L’Élémentaire, le vital, l’énergie : Arte Povera in Castello, cat. expo. Château de Villeneuve, Fondation Emile Hugues, Vence 2004, p. 57). La présente œuvre témoigne d’une profonde sensibilité à la ligne, à la forme, au motif, à la surface et au rythme, chaque élément conçu en harmonie avec ses voisins. En jouant avec ces paramètres artistiques classiques, Kounellis cherche à attirer l’attention sur la beauté et la magie inhérentes aux substances du quotidien : les idéaux que nous attribuions autrefois à la peinture, suggère-t-il, se retrouvent dans les aspects les plus banals de notre existence.
Executed in 1987, and shown at the Sao Paolo Biennial that year, the present work is a complex and ambitious example of Jannis Kounellis’ metal wall reliefs. Held in the same private collection for the past three decades, it consists of six aluminium panels, each adorned with abstract material forms: plaster, iron, wax, wood, wool and burlap conspire in curious otherworldly formations, seemingly divorced from all earthly function. A leading exponent of Arte Povera, Kounellis belonged to a generation of artists who found rich metaphysical potential in humble everyday materials. His wall reliefs, writes curator Nancy Spector, are ‘morphologically reminiscent of painting’, with their ‘fusion of organic and inorganic substances [symbolising] the shifting and unpredictable nature of meaning in art’ (N. Spector, quoted at https://www.guggenheim.org/artwork/2377). Mounted like a suite of canvases, the present work’s panels seem laden with symbolic logic, yet ultimately refuse to yield any sense of narrative beyond their raw material make-up. Other examples from the same period reside in institutions including the Solomon R. Guggenheim Museum, New York and the San Francisco Museum of Modern Art.
Born in the Greek shipping port of Piraeus, Kounellis moved to Rome in 1956. From the beginning, his practice was conceptually-oriented: his early Alfabeti, or Alphabet Paintings, consisted of fragmentary letters and numbers that the artist would ‘perform’ aloud as he worked, thereby dissolving their semantic properties. This series set the tone for Kounellis’ subsequent oeuvre: though his engagement with found materials would position him within the ranks of artists such as Mario Merz, Giulio Paolini and Luciano Fabro, his works continued to address wider questions about the way in which we mine forms and materials for meaning. Much like the creations of Alberto Burri and Antoni Tàpies—important precursors to the Arte Povera movement—the present work alludes to a sense of higher order and reason while ultimately rejecting any attempts to ‘read’ its content. Many have posited Kounellis’ upbringing as influential in this regard, citing days spent watching the routine flux of industrial cargo to and from his hometown harbour. The repeated use of substances and forms throughout his own oeuvre, meanwhile, imbues his works with a sense of déjà-vu: each of the present panels is at once familiar and alien, flickering with faint, intangible memories.
Kounellis conceived the metal backdrops of his wall reliefs as ‘sheets of paper’: more broadly, however, he considered these works in painterly terms. ‘In the 1960s, I was designated as an “artist” because no-one knew how to define a heap of coal’, he explained. ‘But I’m a painter, and I lay claim to my initiation in painting because painting is the construction of images, it doesn't indicate a manner, even less a technique. Each painter has his own way of seeing and methods of constructing an image’ (J. Kounellis, quoted in L'Élémentaire, le vital, l'énergie: Arte Povera in Castello, exh. cat. Chateau de Villeneuve, Fondation Emile Hugues, Vence 2004, p. 57). Indeed, underpinning the present work is a profound sensitivity to line, form, pattern, surface and rhythm, with each element conceived in harmonious relation to its neighbours. By playing with these traditional artistic parameters, Kounellis sought to draw attention to the beauty and magic inherent in the substances of daily life: the ideals we once ascribed to painting, he suggests, are present in even the most banal corners of our existence.
« Je n’ai recherché que choses très belles. J’ai mesuré la distance par rapport à l’objectif. J’ai vu le sacré dans l’objet d’usage quotidien. J’ai cru dans le poids comme juste mesure. […] Je veux le retour de la poésie par tous les moyens : par la pratique, par l’observation, par la solitude, par le verbe, par l’image, par l’éversion ». J. Kounellis
“ I have always looked for very beautiful things. I measured the distance from objectives. I saw the holy in everyday object. I believed in weight as a fair measure. […] I want to go back to poetry by every means: by practice, by observation, by solitude, by images, through eversion.” - J. Kounellis
Exécutée en 1987 et exposée la même année à la Biennale de São Paulo, la présente œuvre est un spécimen complexe et ambitieux des reliefs muraux métalliques de Jannis Kounellis. Conservée dans la même collection privée depuis trois décennies, elle se compose de six panneaux d’aluminium, chacun orné de formes matérielles abstraites : plâtre, fer, cire, bois, laine et toile de jute s’assemblent en de curieuses formations d’un autre monde, comme détachés de toute fonction terrestre. Chef de file de l’Arte Povera, Kounellis appartient à une génération d’artistes, qui prête un riche potentiel métaphysique aux humbles matériaux du quotidien. Ses reliefs muraux, écrit la conservatrice Nancy Spector, « rappellent morphologiquement la peinture » avec leur « fusion de substances organiques et inorganiques [qui symbolise] la nature changeante et imprévisible de la signification dans l’art » (N. Spector, citée sur https://www.guggenheim.org/artwork/2377). Montés comme une suite de toiles, les panneaux de la présente œuvre semblent chargés d’une logique symbolique, se refusant toutefois à livrer toute forme de récit au-delà de leur composition matérielle brute. D’autres exemples de la même période sont conservés dans des institutions telles que le Musée Solomon R. Guggenheim de New York et le Musée d’art moderne de San Francisco.
Né dans le port commercial grec du Pirée, Kounellis s’installe à Rome en 1956. Il s’oriente dès le début vers une pratique conceptuelle : ses premières œuvres, Alfabeti ou Alphabet Paintings, se composent de lettres et de chiffres fragmentés que l’artiste « interprète » à haute voix tout au long de son travail, annihilant ainsi leurs propriétés sémantiques. Cette série donne le ton de ce que sera l’œuvre de Kounellis : bien que son travail des matériaux de récupération le classe parmi des artistes, tels que Mario Merz, Giulio Paolini et Luciano Fabro, son œuvre soulève des questions bien plus vastes sur la manière dont nous exploitons les formes et les matériaux pour leur donner un sens. À l’instar des créations d’Alberto Burri et d’Antoni Tàpies, précurseurs majeurs du mouvement Arte Povera, la présente œuvre fait allusion à un ordre, un raisonnement supérieurs tout en rejetant en définitive toute tentative de « lire » son contenu. Nombreux sont ceux qui décèlent dans le travail de Kounellis l’influence de son enfance, évoquant ses journées passées à regarder le flux incessant de cargos industriels aller et venir dans son port natal. L’utilisation répétée de certaines substances et formes dans l’ensemble de son œuvre, lui confère une impression de déjà-vu : chacun des panneaux nous semble à la fois familier et étranger, portant la lueur de souvenirs vaporeux et intangibles.
Pour Kounellis, la toile de fond métallique de ses reliefs muraux est telle une « feuille de papier », considérant plus largement ses œuvres comme des peintures. « Dans les années 1960, on m’a qualifié d’« artiste » car personne ne savait comment définir un tas de charbon », explique-t-il. « Mais je suis un peintre et je revendique mon initiation à la peinture car la peinture est la construction des images, elle n’indique aucunement une manière et encore moins une technique. Chaque peintre a sa propre vision et ses propres méthodes de construction de l’image » (J. Kounellis, cité dans L’Élémentaire, le vital, l’énergie : Arte Povera in Castello, cat. expo. Château de Villeneuve, Fondation Emile Hugues, Vence 2004, p. 57). La présente œuvre témoigne d’une profonde sensibilité à la ligne, à la forme, au motif, à la surface et au rythme, chaque élément conçu en harmonie avec ses voisins. En jouant avec ces paramètres artistiques classiques, Kounellis cherche à attirer l’attention sur la beauté et la magie inhérentes aux substances du quotidien : les idéaux que nous attribuions autrefois à la peinture, suggère-t-il, se retrouvent dans les aspects les plus banals de notre existence.
Executed in 1987, and shown at the Sao Paolo Biennial that year, the present work is a complex and ambitious example of Jannis Kounellis’ metal wall reliefs. Held in the same private collection for the past three decades, it consists of six aluminium panels, each adorned with abstract material forms: plaster, iron, wax, wood, wool and burlap conspire in curious otherworldly formations, seemingly divorced from all earthly function. A leading exponent of Arte Povera, Kounellis belonged to a generation of artists who found rich metaphysical potential in humble everyday materials. His wall reliefs, writes curator Nancy Spector, are ‘morphologically reminiscent of painting’, with their ‘fusion of organic and inorganic substances [symbolising] the shifting and unpredictable nature of meaning in art’ (N. Spector, quoted at https://www.guggenheim.org/artwork/2377). Mounted like a suite of canvases, the present work’s panels seem laden with symbolic logic, yet ultimately refuse to yield any sense of narrative beyond their raw material make-up. Other examples from the same period reside in institutions including the Solomon R. Guggenheim Museum, New York and the San Francisco Museum of Modern Art.
Born in the Greek shipping port of Piraeus, Kounellis moved to Rome in 1956. From the beginning, his practice was conceptually-oriented: his early Alfabeti, or Alphabet Paintings, consisted of fragmentary letters and numbers that the artist would ‘perform’ aloud as he worked, thereby dissolving their semantic properties. This series set the tone for Kounellis’ subsequent oeuvre: though his engagement with found materials would position him within the ranks of artists such as Mario Merz, Giulio Paolini and Luciano Fabro, his works continued to address wider questions about the way in which we mine forms and materials for meaning. Much like the creations of Alberto Burri and Antoni Tàpies—important precursors to the Arte Povera movement—the present work alludes to a sense of higher order and reason while ultimately rejecting any attempts to ‘read’ its content. Many have posited Kounellis’ upbringing as influential in this regard, citing days spent watching the routine flux of industrial cargo to and from his hometown harbour. The repeated use of substances and forms throughout his own oeuvre, meanwhile, imbues his works with a sense of déjà-vu: each of the present panels is at once familiar and alien, flickering with faint, intangible memories.
Kounellis conceived the metal backdrops of his wall reliefs as ‘sheets of paper’: more broadly, however, he considered these works in painterly terms. ‘In the 1960s, I was designated as an “artist” because no-one knew how to define a heap of coal’, he explained. ‘But I’m a painter, and I lay claim to my initiation in painting because painting is the construction of images, it doesn't indicate a manner, even less a technique. Each painter has his own way of seeing and methods of constructing an image’ (J. Kounellis, quoted in L'Élémentaire, le vital, l'énergie: Arte Povera in Castello, exh. cat. Chateau de Villeneuve, Fondation Emile Hugues, Vence 2004, p. 57). Indeed, underpinning the present work is a profound sensitivity to line, form, pattern, surface and rhythm, with each element conceived in harmonious relation to its neighbours. By playing with these traditional artistic parameters, Kounellis sought to draw attention to the beauty and magic inherent in the substances of daily life: the ideals we once ascribed to painting, he suggests, are present in even the most banal corners of our existence.