Lot Essay
Jean Dubuffet peint Fenêtre sur le ciel en mai 1955 à Vence (Alpes-Maritimes), deux mois à peine après s'y être installé sur les conseils du médecin qui en avait vanté le climat pour sa femme Emilie, dite Lili, souffrant de troubles pulmonaires. Son premier atelier étant minuscule, il y reprend uniquement ses Assemblages d'empreintes à l'encre de Chine et dans un format réduit qui, espère-t-il, servira de base de travail pour de futurs projets. En avril, il trouve par hasard et pour son plus grand bonheur un atelier plus grand dans lequel il se remet passionnément à la peinture. Fenêtre sur le ciel naît de son enthousiasme retrouvé tout en comportant des réminiscences d'Assemblages d'empreintes que l'on décèle dans la technique pour le moins peu conventionnelle utilisé dans cette oeuvre.
'Elle consiste à faire des empreintes à la pâte de différents objets manufacturés pour produire des reliefs plus ou moins géométriques, par exemple des moules à pâtisserie, divers ustensiles de ménage et de cuisine, des paniers à salade, un porte-savon, un paillasson en caoutchouc, un sac à très grosse maille, etc... J'ai d'abord posé un grand nombre de ces objets que je m'étais procuré chez des marchands de couleurs, des droguistes et des grands magasins à Nice... Plus mes techniques évoluaient pour réaliser ces empreintes, plus les thèmes et le style des tableaux prenaient, eux-aussi, un nouveau visage.
Quant aux sujets traités, ils convergeaient vers un thème nouveau, [...] celui de morceaux de terrain plantés de choses qui poussent, des touffes d'herbe, des jolies plantes herbacées ressemblant à des étoiles, comme le plantain, le chardon ou le pissenlit, et surgissant d'entre les petites pierres de ce qui semble être un sol longeant des routes mal entretenues, ou celui des montagnes pelées comme on en trouve autour de Vence. Quant au style des tableaux, il se caractérise par une mise en peinture générale, minutieuse et généreuse, obtenue par un grand nombre d'empreintes de ces objets utilitaires que j'évoquais tout à l'heure, et auquel s'ajoute l'intervention de longues lignes tracées au pinceau fin. Ces lignes servent à souligner l'effet de pierre, de thym, de mousse, de lichen, mais aussi en des endroits inattendus, à embellir, par exemple, les zones de terre ou de ciel vides. Ainsi j'obtiens un double effet, un réalisme très descriptif et une irréalité extravagante, paisible et intense, l'association des deux créant une ambiguïté provocante'.
Dans Fenêtre sur ciel, le contraste entre le réalisme et cette 'irréalité extravagante et paisible' est accentué par la maison perchée sur l'horizon et ce personnage solitaire regardant le monde de l'unique fenêtre. La quantité prodigieuse de détails que l'on perçoit dans la représentation du sol qui prédomine dans le tableau se joint au rendu quasi Art brut de la maison et du visage, créant deux espaces distincts au coeur même de la toile. La silhouette et la maison possèdent une gaîté de conte de fée, alors que la partie inférieure de la composition est une célébration minutieuse de la terre brute et de sa flore modeste, obtenue par toutes les nouvelles techniques explorées par Jean Dubuffet.
'Elle consiste à faire des empreintes à la pâte de différents objets manufacturés pour produire des reliefs plus ou moins géométriques, par exemple des moules à pâtisserie, divers ustensiles de ménage et de cuisine, des paniers à salade, un porte-savon, un paillasson en caoutchouc, un sac à très grosse maille, etc... J'ai d'abord posé un grand nombre de ces objets que je m'étais procuré chez des marchands de couleurs, des droguistes et des grands magasins à Nice... Plus mes techniques évoluaient pour réaliser ces empreintes, plus les thèmes et le style des tableaux prenaient, eux-aussi, un nouveau visage.
Quant aux sujets traités, ils convergeaient vers un thème nouveau, [...] celui de morceaux de terrain plantés de choses qui poussent, des touffes d'herbe, des jolies plantes herbacées ressemblant à des étoiles, comme le plantain, le chardon ou le pissenlit, et surgissant d'entre les petites pierres de ce qui semble être un sol longeant des routes mal entretenues, ou celui des montagnes pelées comme on en trouve autour de Vence. Quant au style des tableaux, il se caractérise par une mise en peinture générale, minutieuse et généreuse, obtenue par un grand nombre d'empreintes de ces objets utilitaires que j'évoquais tout à l'heure, et auquel s'ajoute l'intervention de longues lignes tracées au pinceau fin. Ces lignes servent à souligner l'effet de pierre, de thym, de mousse, de lichen, mais aussi en des endroits inattendus, à embellir, par exemple, les zones de terre ou de ciel vides. Ainsi j'obtiens un double effet, un réalisme très descriptif et une irréalité extravagante, paisible et intense, l'association des deux créant une ambiguïté provocante'.
Dans Fenêtre sur ciel, le contraste entre le réalisme et cette 'irréalité extravagante et paisible' est accentué par la maison perchée sur l'horizon et ce personnage solitaire regardant le monde de l'unique fenêtre. La quantité prodigieuse de détails que l'on perçoit dans la représentation du sol qui prédomine dans le tableau se joint au rendu quasi Art brut de la maison et du visage, créant deux espaces distincts au coeur même de la toile. La silhouette et la maison possèdent une gaîté de conte de fée, alors que la partie inférieure de la composition est une célébration minutieuse de la terre brute et de sa flore modeste, obtenue par toutes les nouvelles techniques explorées par Jean Dubuffet.