Fernand Léger (1881-1955)
Fernand Léger (1881-1955)

Les trois masques: Afrique, Océanie et Amérique (Projet de rideau de scène pour "La création du monde")

Details
Fernand Léger (1881-1955)
Les trois masques: Afrique, Océanie et Amérique (Projet de rideau de scène pour "La création du monde")
signé des initiales et daté 'F.L. 22' (en bas à droite)
graphite sur papier vergé
20.8 x 26.9 cm. (8¼ x 10 5/8 in.)
Exécuté en 1922
Provenance
Rains Gallery, New York.
Douglas Cooper, New York (acquis auprès de celle-ci en 1934).
James J. Sweeney, New York (après 1980).
Collection particulière, Paris.
Exhibited
Bochum, Haus Kemnade, Hommage à Picasso, Kubismus und Musik, octobre-novembre 1981, no. 37 (illustré).
Houston, Museum of Fine Arts, Picasso, Braque, Gris, Léger: Douglas Cooper Collecting Cubism, octobre-décembre 1990, p. 38, no. 33 (illustré).
Further Details
'Les trois masques: Afrique, Océanie et Amérique (Project for the Curtain Design of "La création du monde")'; signed with the initials and dated lower right; pencil on laid paper; executed in 1922.

Lot Essay

C'est sous l'impulsion des Ballets suédois qu'est présenté en octobre 1923, au théâtre des Champs-Elysées, La création du monde. Le directeur du ballet, Rolf de Maré, amateur d'art visionnaire, fait appel à de jeunes talents épris d'avant-garde et de modernité, autour du thème central de l'Afrique. La société parisienne manifeste alors un intérêt croissant pour l'art et la culture des africains et des noirs américains, les deux communautés se confondant dans l'esprit du grand public. Blaise Cendrars qui, en 1921, a publié L'anthologie nègre, une compilation de récits africains, rédige le livret. Le poète admire la littérature orale africaine pour sa beauté et sa puissance évocatrice, et considère l'Afrique comme l'une des sources les plus riches pour la poésie et la philologie. Il tire l'argument de La création du monde des mythes africains de la Création. Jean Börlin, chorégraphe et danseur principal de la compagnie des Ballets suédois, désire quant à lui créer un "ballet nègre" depuis 1919. En 1920, à la comédie des Champs-Elysées, il exécute seul une danse intitulée Sculpture nègre. Pour La création du monde, Börlin se documente sur l'ethnographie des civilisations africaines dans les bibliothèques et les musées. Le compositeur Darius Milhaud souhaite par ailleurs écrire depuis 1922 une oeuvre de musique de chambre ou dramatique avec les éléments du jazz entendus à Harlem. La création du monde lui en offre l'occasion. Le décor et les costumes de Fernand Léger, enfin, trouvent leur source dans les dessins exécutés par l'artiste d'après des oeuvres d'art tribal. Comme l'a noté Jean Laude, les dessins de Léger sont souvent presque calqués d'après les planches de Negerplastik de Carl Einstein et de l'African Negro Art : Its influence on Modern Art de Marius de Zayas. Des études de rideaux de scènes, dont celle présentée ici, montrent trois têtes inspirées de la sculpture tribale. Le décor de La création du monde consistait en effet en trois figures représentant des dieux, qui furent réalisées en éléments découpés libres, mobiles et destinés à être déplacés. Certaines études de ce projet de rideau, dont celle conservée au MoMA (fig. 1), figurent les trois divinités en pied.
Bien que le décor de Léger s'inspire de la sculpture africaine, à aucun moment, tant avant qu'après ses travaux pour ce ballet, l'artiste n'est profondément influencé par l'art primitif. L'intérêt réel qu'il éprouve pour ce dernier dépend moins de sa structure que de ce qu'il prend pour des qualités de vigueur et de spontanéité. C'est précisément cette vitalité qui attire Léger, dans le jazz comme dans les "revues" noires. Pour l'artiste, le thème africain de La création du monde n'est qu'un prétexte parmi d'autres pour exprimer son goût du dynamisme et du spectacle.

The ballet La création du monde was created at the instigation of the Ballets Suédois in October 1923 at the théâtre des Champs-Elysées. The director of the ballet, Rolf de Maré, a visionary art lover, called on young talents keen on avant-garde or modernity. Africa was the central theme of the work. Parisian society was increasingly interested in African and African American art and culture, the public's mind often confusing both distinct origins. La création's libretto was written by Blaise Cendrars, who had published L'Anthologie nègre in 1921, a compilation of African stories. The poet admired oral African literature for its beauty and its evocative power and considered Africa as one of the richest sources for poetry or philology. He drew the theme of La création du monde from African creation myths. Jean Börlin, choreographer and main dancer of the Ballets Suédois, had wanted to create a "negro ballet" since 1919. In 1920, he performed a solo dance called Negro sculpture. For La création du monde, Börlin researched the ethnography of African civilisations in libraries and museums. Since 1922 Darius Milhaud, the composer, had been wanting to write a chamber or drama music piece with the elements of jazz he had heard in Harlem. La création du monde gave him the opportunity and he was able to use the elements of jazz studied in New York. The sets and costumes by Fernand Léger were based on drawings made by the artist after African art works. As Jean Laude noted, Léger's drawings are very close to Carl Einstein's Negerplastik plates and to African Negro Art: Its influence on Modern Art by Marius de Zayas. Studies for the stage curtains, including the present work, show three heads inspired by African sculpture. The sets were three figures representing gods, constructed in free-standing cutout elements, designed to be mobile on stage. Several studies for this curtain project exist, including one in the collection at MoMA which shows the three divinities in full-length (Fig. 1).
Léger's sets were inspired by African sculpture, but at no time, whether before his work for this ballet or after, was he deeply influenced by primitive art. Even here, Léger drew inspiration from primitive art for its formal and magic qualities and sought to integrate them in to his own personal work. The real interest Léger felt for primitive art depended less on its structure than on its qualities of strength and spontaneity. It is precisely this vitality which attracted Léger to jazz as to the "black revues". For Léger, the African theme of
La création du monde was a pretext among others to express his taste for energy and bravado.

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