Lot Essay
L'environnement artistique des années 1960 est une scène où tourbillonnent les mouvements tels que le Pop art, le Nouveau réalisme ou l'Art Cinétique. Pablo Picasso se positionne, une fois encore, avec une personnalité artistique à part. En effet, il revient à son amour pour la peinture classique - notamment les peintres espagnols et hollandais du Siècle d'or - en y projetant toute son originalité. Ces thèmes de prédilection restent les mêmes (le peintre et son modèle, les portraits, les nus), avec toutefois l'apparition d'un nouveau personnage: le gentilhomme ou le mousquetaire. L'homme costumé sera un des sujets phares de l'année 1969, alors que sont organisées toutes les commémorations pour l'anniversaire de Rembrandt Harmenszoon van Rijn.
Quelques jours avant l'exécution du portrait d'homme aujourd'hui présenté, Picasso réalise une série de quatre peintures sur le thème du mousquetaire à la pipe (février 1969, Zervos XXXI, nos. 85 ou 90), dont l'inspiration n'est autre que l'oeuvre de Rembrandt, Portrait de Jan Pellicorne et son fils Gaspar. Picasso va s'inspirer de cette toile ainsi que des autoportraits de Rembrandt, pour faire triompher un personnage haut en couleur et hors du temps: mi-espagnol, mi-hollandais, en costume d'époque, avec une perruque, portant la moustache, ce singulier petit homme amusera plus d'un visiteur lors de l'exposition de Picasso à la chapelle gothique du Palais des Papes d'Avignon en 1970. Guy Scarpetta dira de sa visite de cette exposition: "Comme si, au fond, à l'audace de 1907 répondait, plus de soixante ans après, une autre audace, insolente et acharnée, peut-être plus bouleversante encore dans sa force d'ébranlement" (Le dernier Picasso, 1953-1973, catalogue de l'exposition, Paris, Centre Georges Pompidou, 1988, p. 110).
Dans le présent Portrait d'homme daté 'Dimanche 16.3.69 ', Picasso procède avec un tracé simple mais très efficace. Notons que durant cette même journée, l'artiste exécute deux autres dessins et une huile sur toile sur le même sujet. Dans notre dessin, numéroté 'IV', l'intensité expressive est palpable, ceci grâce à une technique réfléchie: une facture énergique, la juxtaposition de lignes et de cercles plus ou moins fins ou épais et un surprenant dialogue des couleurs (froides, pastel, acidulées). Par ailleurs, le choix d'une exécution "primitive" ou "enfantine" confère une personnalité très forte au personnage. Cet homme qui nous regarde en face, ne peut-il pas être abordé comme une sorte d'autoportrait ? Comme à son habitude, le maître espagnol interpelle et surprend. Le travail de reproduction dans la série des mousquetaires ou les portraits d'homme (avec ou sans variantes) définit le concept de création dans la dernière période de Picasso. En effet, ce dernier détruit la notion d'oeuvre et donne toute sa noblesse à l'idée de reproduction, ce qui n'est pas sans laisser songeur par rapport au travail d'Andy Warhol.
The art world of the 1960s consisted of a swirl of movements such Pop art, New Realism or Op Art. Pablo Picasso positioned himself, once again, as an outsider to these different currents. He preferred rather to rekindled his love for classical painting -in particular the works of the Spanish and Dutch artists of the Golden Age - projecting all of his originality into his re-interpretations of their work. His preferred themes remained the same (the artist and his model, portraits, nudes), but a new character also appeared: 'the gentleman' or 'musketeer'. The costumed character would feature as one of his key subjects in 1969, coinciding with the celebrations of the birth of Rembrandt Harmenszoon van Rijn.
Several days prior to the execution of Tête d'homme, Picasso produced a series of four paintings on the subject of the smoking Musketeer (February 1969), taking his inspiration from Rembrandt's "Portrait of Jan Pellicorne and his son Gaspar". Both this source, together with Rembrandt's self-portraits, would provide Picasso with the necessary material to bring to life a highly colorful character who spanned the centuries: semi-Spanish, semi-Dutch, in period costume, sporting a wig and moustache, this amusing figure would prove one of the highlights for visitors to the Picasso exhibition held in the gothic chapel at the Palais des Papes in Avignon in 1970.
Dated 'Dimanche 16.3.69 IV', Picasso's Tête d'Homme is executed using an economy of drawing which is both simple and effective. During the same day, Picasso would complete two further drawings and an oil of the same subject. In our drawing, numbered 'IV', the expressive intensity is palpable thanks to the technique which combines an energetic execution, the juxtaposition of lines and circles of varying thickness and the contrast of cold, pastel and acidic colours. The choice of a seemingly 'primitive' or 'childlike' execution lends the subject a strong sense of personality. Could this man who looks us straight in the eyes not be considered a form of self-portrait ? Typically, the Spanish master intrigues and surprises us. The progression through this series of musketeers or portraits defines the artist's creative approach in his later years. Hereby, Picasso destroys the classic notion of a single opus, giving rather the pride of place to the idea of repetition, and thereby allowing similarities to be drawn between his work and that of his contemporary, Andy Warhol.
Quelques jours avant l'exécution du portrait d'homme aujourd'hui présenté, Picasso réalise une série de quatre peintures sur le thème du mousquetaire à la pipe (février 1969, Zervos XXXI, nos. 85 ou 90), dont l'inspiration n'est autre que l'oeuvre de Rembrandt, Portrait de Jan Pellicorne et son fils Gaspar. Picasso va s'inspirer de cette toile ainsi que des autoportraits de Rembrandt, pour faire triompher un personnage haut en couleur et hors du temps: mi-espagnol, mi-hollandais, en costume d'époque, avec une perruque, portant la moustache, ce singulier petit homme amusera plus d'un visiteur lors de l'exposition de Picasso à la chapelle gothique du Palais des Papes d'Avignon en 1970. Guy Scarpetta dira de sa visite de cette exposition: "Comme si, au fond, à l'audace de 1907 répondait, plus de soixante ans après, une autre audace, insolente et acharnée, peut-être plus bouleversante encore dans sa force d'ébranlement" (Le dernier Picasso, 1953-1973, catalogue de l'exposition, Paris, Centre Georges Pompidou, 1988, p. 110).
Dans le présent Portrait d'homme daté 'Dimanche 16.3.69 ', Picasso procède avec un tracé simple mais très efficace. Notons que durant cette même journée, l'artiste exécute deux autres dessins et une huile sur toile sur le même sujet. Dans notre dessin, numéroté 'IV', l'intensité expressive est palpable, ceci grâce à une technique réfléchie: une facture énergique, la juxtaposition de lignes et de cercles plus ou moins fins ou épais et un surprenant dialogue des couleurs (froides, pastel, acidulées). Par ailleurs, le choix d'une exécution "primitive" ou "enfantine" confère une personnalité très forte au personnage. Cet homme qui nous regarde en face, ne peut-il pas être abordé comme une sorte d'autoportrait ? Comme à son habitude, le maître espagnol interpelle et surprend. Le travail de reproduction dans la série des mousquetaires ou les portraits d'homme (avec ou sans variantes) définit le concept de création dans la dernière période de Picasso. En effet, ce dernier détruit la notion d'oeuvre et donne toute sa noblesse à l'idée de reproduction, ce qui n'est pas sans laisser songeur par rapport au travail d'Andy Warhol.
The art world of the 1960s consisted of a swirl of movements such Pop art, New Realism or Op Art. Pablo Picasso positioned himself, once again, as an outsider to these different currents. He preferred rather to rekindled his love for classical painting -in particular the works of the Spanish and Dutch artists of the Golden Age - projecting all of his originality into his re-interpretations of their work. His preferred themes remained the same (the artist and his model, portraits, nudes), but a new character also appeared: 'the gentleman' or 'musketeer'. The costumed character would feature as one of his key subjects in 1969, coinciding with the celebrations of the birth of Rembrandt Harmenszoon van Rijn.
Several days prior to the execution of Tête d'homme, Picasso produced a series of four paintings on the subject of the smoking Musketeer (February 1969), taking his inspiration from Rembrandt's "Portrait of Jan Pellicorne and his son Gaspar". Both this source, together with Rembrandt's self-portraits, would provide Picasso with the necessary material to bring to life a highly colorful character who spanned the centuries: semi-Spanish, semi-Dutch, in period costume, sporting a wig and moustache, this amusing figure would prove one of the highlights for visitors to the Picasso exhibition held in the gothic chapel at the Palais des Papes in Avignon in 1970.
Dated 'Dimanche 16.3.69 IV', Picasso's Tête d'Homme is executed using an economy of drawing which is both simple and effective. During the same day, Picasso would complete two further drawings and an oil of the same subject. In our drawing, numbered 'IV', the expressive intensity is palpable thanks to the technique which combines an energetic execution, the juxtaposition of lines and circles of varying thickness and the contrast of cold, pastel and acidic colours. The choice of a seemingly 'primitive' or 'childlike' execution lends the subject a strong sense of personality. Could this man who looks us straight in the eyes not be considered a form of self-portrait ? Typically, the Spanish master intrigues and surprises us. The progression through this series of musketeers or portraits defines the artist's creative approach in his later years. Hereby, Picasso destroys the classic notion of a single opus, giving rather the pride of place to the idea of repetition, and thereby allowing similarities to be drawn between his work and that of his contemporary, Andy Warhol.