出版
R. Marx, 'Les pointes sèches de Rodin', in Gazette des Beaux-Arts, vol. 27, 1 mars 1902, p. 208 (illustré).
Victor Hugo vu par Rodin, cat. exp., Paris, 2002, p. 49 (illustré, ill. 25).
D’ombre et de marbre, Hugo face à Rodin, cat. exp., Paris, 2003, p. 33 (illustré, fig. 16).
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«Je vous demande pardon de mon insistance. Mais l’ambition d’être celui qui aura fait le Victor Hugo de ma génération est si naturelle que vous ne me le reprocherez pas.»
A. Rodin, février 1883, cité in Victor Hugo vu par Rodin, cat. exp. Paris, 2002, p. 45.
Fin 1882, alors que Rodin est encore peiné par l’accusation de moulage sur nature lancé contre la sculpture l’Âge d’Airain, Edmond Bazire, journaliste et ami de l’artiste, lui souffla le nouveau projet d’exposer le portrait d’un homme célèbre «que personne ne soupçonnerait de se prêter à l’opération que l’on [lui] reproche» (E. Bazire, ‘Auguste Rodin’, in Art et critique, juillet 1889). Ce sera Victor Hugo. Bazire se chargera alors d’organiser la rencontre : «Vendredi, Cher ami, j’ai vu Victor Hugo ce soir. Ne manquez de pas lui faire visite dimanche. Jour sera pris pour déjeuner chez lui et commencer les poses. Il vous fera les conditions d’être bref ; acceptez-la [sic]. Le travail une fois en train, vous le pousserez jusqu’au bout sans difficulté» (op cit. Edmond Bazire, 1889). Mais Hugo, fatigué du souvenir des longues séances de pose que lui a infligé récemment le sculpteur Victor Villain, et convaincu qu’aucun sculpteur ne pouvait égaler le buste que David d’Angers avait fait de lui, refusa l’exercice sans toutefois renoncer au projet : «Venez déjeuner, venez diner. Vous prendrez des croquis, comme on prend des notes. Et vous verrez, cela vous suffira» (op cit. Edmond Bazire, 1889).
Ce sont dans ces circonstances inhabituelles et peu commodes que Rodin exécuta entre février et mars/avril 1883 entre soixante et quatre-vingts petits dessins et croquetons de Victor Hugo sur différents papier. Calque et papier fin ou papier à cigarette pour les plus sommaires réalisés au cours des repas, aux creux de ses mains, sur le vif au domicile du poète avenue d’Eylau. Et d’autres beaucoup plus aboutis, sur papier vergé, réalisés dans un second temps de mémoire, comme en témoigne notre exceptionnel et très rare double portrait. Malgré les exigences quelques peu contraignantes, et les fréquents froncements de «sourcils olympiens» du poète, Rodin tira profit de cette rencontre en allant au plus proche de son sujet : «Pendant plus d’un mois, j’en venais tous les jours chez lui pour faire son buste. [...] Il se laissait voir, et de tous les côtés – cela ne le gênait pas -, mais il ne voulait pas poser. Alors je le regardais en conscience. Et j’ai pu obtenir ainsi un Hugo qui est vrai» (Victor Hugo vu par Rodin, cat. exp., Paris, 2002).
Le Musée Rodin conserve de cette rencontre une douzaine de minuscules croquis des différents angles et profils de la tête et du visage du poète, et quelques autres simples portraits à la plume et encre et rehauts de gouache se trouvent aujourd’hui dans des collections privées. Cet inédit double portrait, provenant de l’ancienne collection de l’historien de l’art et collectionneur Claude Roger-Marx, amorce sans aucun doute la pointe-sèche que Rodin exécutera de Hugo en 1884, deux œuvres qui seront publiées ensembles dès 1902 par Roger-Marx dans la Gazette des Beaux-Arts.
“ Please accept my apologies for my insistance. However the ambition to be the one who will have made the Victor Hugo of my generation is so natural that you won’t reproach it to me.”
A. Rodin, February 1883, quoted in Victor Hugo vu par Rodin, exh. cat., Paris, 2002, p. 45.
In late 1882, when Rodin was still struggling with the accusation that he had produced his sculpture the Âge d’Airain by casting a living model, the artist's journalist friend Edmond Bazire gave him the idea to exhibit a portrait of a famous man "whom no one would suspect of going along with the trick of which [he] was accused" (E. Bazire,'Auguste Rodin', in Art et critique, July 1889). It would be Victor Hugo. Bazire took on the task of arranging the meeting: "Friday, dear friend, I saw Victor Hugo this evening. Be sure to pay him a visit on Sunday. The day shall be for you to take luncheon with him and work on poses. His conditions are that you be brief; accept it [sic]. Once under way, you will have no trouble seeing the work through to the end" (op cit. Edmond Bazire, 1889). But Hugo, exhausted by the memory of the long sitting sessions inflicted on him by the sculptor Victor Villain, and persuaded that no other sculptor would be able to match the bust David d'Angers had made of him, rejected the exercise but without abandoning the project: "Come to luncheon, come to dinner. You will do sketches, just as one takes notes. And you shall see that this will suffice" (op cit. Edmond Bazire, 1889).
It was under these unusual and impractical circumstances that, between February and March/April 1883, Rodin produced somewhere between 60 and 80 small sketches and rough drawings of Victor Hugo on different kinds of paper. Tracing paper, fine paper or rolling paper for the most summary ones completed during meals, in the palms of his hands, on the fly in the poet's home on Avenue d’Eylau. More accomplished ones were drawn on laid paper, after the fact from memory, as revealed in our extraordinary and quite rare dual portrait. Despite the somewhat restrictive demands and the frequent furrowing of the poet's "Olympian eyebrows", Rodin took advantage of this encounter to get up close with his subject: "For more than a month, I went to his house every day to do his bust. [...] He allowed himself to be seen, from all angles – this did not disturb him - but he did not want to pose. So I looked at him studiously. Thus, I was able to obtain a Hugo that is true" (Victor Hugo vu par Rodin, exh. cat., Paris, 2002).
From this encounter, the Musée Rodin holds some 12 minuscule sketches of various angles and profiles of the poet's head and face and a handful of other simple portraits in quill and ink highlighted with gouache are currently in private collections. This unprecedented dual portrait from the former collection of critic Marcel Guérin was undoubtedly the starting point for the dry point of Hugo produced by Rodin in 1884 both of which would be published together in 1902 by Roger-Marx in the Gazette des Beaux-Arts.