拍品專文
Ce dessin (1886) est une étude pour le tableau Joli Coeur (1887) de Dante Gabriel Rossetti aujourd'hui conservé à la Manchester City Art Gallery (fig. 1). Comme le note Virginia Surtees dans son catalogue raisonné, la silhouette semble dépendre de celle de la demoiselle d'honneur sur l'extrême gauche dans The Beloved (1865 - 1866; Tate Britain, Londres), un tableau inspiré du Song of Solomon, l'une des oeuvres les plus importantes de la période intermédiaire de l'artiste. La pose est très comparable, et Ellen Smith fut le modèle de ces deux personnages.
La blanchisseuse Ellen Smith fut l'une des belles jeunes femmes aux moeurs légères qui posèrent pour Rossetti au milieu des années 1860. Elle était également employée par d'autres artistes de son cercle, tels que Edward Burne-Jones, J. R. Stanhope, Simeon Solomon et l'aquarelliste G. P. Boyce, qui occupa l'ancien appartement de Blackfriars à partir de 1862, puis devint son voisin à Chelsea neuf ans plus tard. La carrière de modèle de Smith semble avoir pris fin en 1873, avec son mariage. Boyce, qui la mentionne souvent dans son journal publié, indique pour le 17 février de cette année que, désormais sous le nom de Mme Elson, elle 'm'a rendu visite pour m'annoncer qu'elle s'était mariée trois semaines auparavant à l'un de ses anciens prétendants, un cocher. Elle souhaite faire des travaux de blanchisserie pour son propre compte, car les gains de son mari sont maigres'.
Smith fut ainsi le modèle du tableau et de la présente étude. Les principales différences entre les deux sont l'angle de sa tête et l'absence, dans le dessin, de la broche de nacre en forme de spirale qu'elle porte dans les cheveux sur le tableau. Ce bijou fut souvent utilisé par Rossetti pour orner ses modèles (Marillier le décrit comme 'si commun qu'il représente presque une signature'), probablement déniché dans l'une des boutiques de bric-à-brac qu'il affectionnait. Autre bijou de prédilection, le pendentif en cristal en forme de coeur au cou de la jeune femme qui donne son titre au tableau.
Le premier propriétaire du tableau fut Fanny Cornforth (1835 - vers 1906), jadis principal modèle de Rossetti et, quelques années auparavant, tout à la fois sa muse, son intendante et sa maîtresse. Comme beaucoup d'autres oeuvres, celle-ci lui fut donnée en guise de paiement. Après la mort du peintre en 1882, le tableau fut présenté à l'éphémère Rossetti Gallery qu'elle ouvrit sur Old Bond Street avec son mari John Bernard Schott, où furent exclusivement exposées et mises en vente des pièces de sa collection.
Le dessin fut ensuite acquis par Constantine Alexander Ionides (1833-1900), le chef autocratique de cette famille anglo-grecque ayant joué un rôle de premier plan dans les annales de l'art Victorien (voir également le lot 90). Grand admirateur de l'oeuvre de Rossetti, Ionides avait commandité le dernier grand tableau de l'artiste, The Day Dream, achevé en 1880. Mais le dessin ne figurait pas dans l'ensemble de 1 156 tableaux, dessins et imprimés qu'il légua au Victoria and Albert museum, comprenant des chefs d'oeuvre de Delacroix, Millet et Degas, Georges Frederic Watts, Burne-Jones et Rossetti lui-même. Resté dans sa famille, il fut transmis à sa fille, Mme Zoë Manuel, qui en était toujours propriétaire lorsque Virginia Surtees publia son catalogue en 1971.
Fig. 1 :
Dante Gabriel Rossetti, Joli Coeur, huile sur panneau, 1867. Manchester City Art Gallery.
La blanchisseuse Ellen Smith fut l'une des belles jeunes femmes aux moeurs légères qui posèrent pour Rossetti au milieu des années 1860. Elle était également employée par d'autres artistes de son cercle, tels que Edward Burne-Jones, J. R. Stanhope, Simeon Solomon et l'aquarelliste G. P. Boyce, qui occupa l'ancien appartement de Blackfriars à partir de 1862, puis devint son voisin à Chelsea neuf ans plus tard. La carrière de modèle de Smith semble avoir pris fin en 1873, avec son mariage. Boyce, qui la mentionne souvent dans son journal publié, indique pour le 17 février de cette année que, désormais sous le nom de Mme Elson, elle 'm'a rendu visite pour m'annoncer qu'elle s'était mariée trois semaines auparavant à l'un de ses anciens prétendants, un cocher. Elle souhaite faire des travaux de blanchisserie pour son propre compte, car les gains de son mari sont maigres'.
Smith fut ainsi le modèle du tableau et de la présente étude. Les principales différences entre les deux sont l'angle de sa tête et l'absence, dans le dessin, de la broche de nacre en forme de spirale qu'elle porte dans les cheveux sur le tableau. Ce bijou fut souvent utilisé par Rossetti pour orner ses modèles (Marillier le décrit comme 'si commun qu'il représente presque une signature'), probablement déniché dans l'une des boutiques de bric-à-brac qu'il affectionnait. Autre bijou de prédilection, le pendentif en cristal en forme de coeur au cou de la jeune femme qui donne son titre au tableau.
Le premier propriétaire du tableau fut Fanny Cornforth (1835 - vers 1906), jadis principal modèle de Rossetti et, quelques années auparavant, tout à la fois sa muse, son intendante et sa maîtresse. Comme beaucoup d'autres oeuvres, celle-ci lui fut donnée en guise de paiement. Après la mort du peintre en 1882, le tableau fut présenté à l'éphémère Rossetti Gallery qu'elle ouvrit sur Old Bond Street avec son mari John Bernard Schott, où furent exclusivement exposées et mises en vente des pièces de sa collection.
Le dessin fut ensuite acquis par Constantine Alexander Ionides (1833-1900), le chef autocratique de cette famille anglo-grecque ayant joué un rôle de premier plan dans les annales de l'art Victorien (voir également le lot 90). Grand admirateur de l'oeuvre de Rossetti, Ionides avait commandité le dernier grand tableau de l'artiste, The Day Dream, achevé en 1880. Mais le dessin ne figurait pas dans l'ensemble de 1 156 tableaux, dessins et imprimés qu'il légua au Victoria and Albert museum, comprenant des chefs d'oeuvre de Delacroix, Millet et Degas, Georges Frederic Watts, Burne-Jones et Rossetti lui-même. Resté dans sa famille, il fut transmis à sa fille, Mme Zoë Manuel, qui en était toujours propriétaire lorsque Virginia Surtees publia son catalogue en 1971.
Fig. 1 :
Dante Gabriel Rossetti, Joli Coeur, huile sur panneau, 1867. Manchester City Art Gallery.