拍品專文
En 1922, Alberto Giacometti s’installe à Paris et commence à étudier la sculpture à l’Académie de la Grande Chaumière. Il se peut que sa rencontre avec Pierre Matisse date de cette époque, alors que ce dernier caresse encore l’espoir de devenir artiste, et y étudie la peinture. Quelques années plus tard, il embrasse finalement la carrière de marchand d’art, puis fait découvrir l'œuvre de Giacometti aux États-Unis. Si la possibilité d’une collaboration est évoquée dès 1936, la guerre met le projet en attente et ce n’est qu’en 1948 que Pierre Matisse parvient à monter à New York sa première exposition consacrée aux sculptures, peintures et dessins de Giacometti. Par la suite, les deux hommes entretiennent une relation étroite. L’artiste écrit notamment de longues lettres à son marchand, évoquant aussi bien les doutes profonds qui hantent ses recherches artistiques que les soucis du quotidien les plus banals. Elles témoignent d’une confiance et d’une affection mutuelles s’étendant bien au-delà de la sphère professionnelle, au même titre que les trois œuvres présentées ici (lots 2-4). Acquises auprès du sculpteur par Pierre Matisse, elles furent offertes par ce denier en différentes occasions à sa fille Jacqueline et son gendre Bernard Monnier, qui les a toujours précieusement conservées.
Les premiers objets décoratifs de Giacometti datent des années 1930 et de sa collaboration avec Jean-Michel Frank. Plus tard, à la fin des années 1940, certaines commandes privées lui sont passées et éditées en tirage limité, comme cette Lampe coupe aux deux figures (lot 2). Si la pureté des objets dogons et de l’art égyptien, que le sculpteur a longuement étudiés et copiés au Louvre, se retrouve dans la coupe, les deux figures aux bras levés renvoient quant à elles aux travaux menés simultanément sur la première version de sa sculpture La cage (Fig. 2.). À la même époque, cette figure de femme est également traitée seule, en statuette autonome dont un bronze unique est tiré, mais aussi esquissée sur de nombreuses feuilles, griffonnée à même le mur de l’atelier, ou encore placée au centre d’un lustre à quatre branches. La multiplicité des supports participant à une même recherche révèle la cohérence du travail mené par Giacometti, et l’imbrication étroite de ses différents supports d’expression, qui se répondent et se complètent. D’autre part, le pied de la lampe coupe, composé d’une plaque rectangulaire posée en équilibre sur une base cubique, participe de la volonté de Giacometti de «faire partir les sculptures du sol quelles que soient leurs dimensions en évitant les socles amorphes». Pour se faire, il tente comme ici de «réaliser des figures dans un espace déterminé d’avance et dans des rapports fixes de dimensions avec cet espace» (lettre à Pierre Matisse, 28 décembre 1950). C’est peut-être à l’été 1950, alors que Pierre Matisse pose pour l’artiste aux pieds de La cage (Fig. 1.), qu’il découvre le sujet de la femme aux bras levés. Il fit ensuite l’acquisition de cette lampe avant d’en faire cadeau à Bernard et Jacqueline Monnier, quelques mois après leur installation dans leur premier appartement, boulevard de Clichy.
In 1922, Alberto Giacometti settled in Paris and began studying sculpture at the Académie de la Grande Chaumière. It may be that he first met Pierre Matisse during this period, when the latter still cherished the hope of becoming an artist and was studying painting at the same institution. Several years later, Pierre Matisse undertook his vocation as an art dealer, and soon made Giacometti's work known in the United States. Although there was talk of the two working together as early as 1936, the war forced the project to be put on hold, and it was not until 1948 that Pierre Matisse managed to organise the first exhibition in New York of Giacometti's sculptures, paintings and drawings. From that time on the two men enjoyed a close relationship. The artist would write long letters to his dealer, voicing both the deep concerns which haunted his artistic studies, as well as the most mundane of everyday preoccupations. The letters reflect a mutual trust and affection extending well beyond the professional arena, just as do the three works presented here (Lots 2-4). Acquired from the sculptor by Pierre Matisse, they were gifted by the latter on different occasions to his daughter Jacqueline and her husband Bernard Monnier, who would always treasure them.
Giacometti's first decorative objects date from the 1930s and his collaboration with interior designer Jean-Michel Frank. Later, towards the end of the 1940s, he accepted some private commissions to produce limited edition objects, such as the Lampe coupe aux deux figures (lot 2). While the goblet shares the purity of the Dogon and Egyptian art objects that the sculptor had long studied and copied at the Louvre, the two figures with raised arms bear resemblance to the work being carried out at the same time on the first version of his sculpture La Cage (Fig. 2). During this same period, the female figure was also treated in isolation, as a stand-alone statuette of which a single version in bronze was made. The figure was also sketched on numerous sheets of paper, scribbled directly onto the studio wall, and even placed at the centre of a four arm chandelier. The different types of media used, mirroring and complementing each other, were all part of the same research process and revealed the coherence of Giacometti's work. Moreover, the base of the goblet lamp, consisting of a rectangular ledge balanced on a cubic base, demonstrates Giacometti's desire to "make sculptures start from the ground regardless of their dimensions, avoiding amorphous plinths." To achieve this, he attempted, as in this case, to "make figures in a predetermined space and with fixed ratio of dimensions within that space", (letter to Pierre Matisse, 28 December 1950). It was possibly in the summer of 1950, when Pierre Matisse was posing for the artist at the foot of La Cage (Fig. 1.), that he discovered the subject of the woman with the raised arms. He went on to purchase the present lamp, before giving it to Bernard and Jacqueline Monnier a few months after they had moved into their first apartment on Boulevard de Clichy.
Les premiers objets décoratifs de Giacometti datent des années 1930 et de sa collaboration avec Jean-Michel Frank. Plus tard, à la fin des années 1940, certaines commandes privées lui sont passées et éditées en tirage limité, comme cette Lampe coupe aux deux figures (lot 2). Si la pureté des objets dogons et de l’art égyptien, que le sculpteur a longuement étudiés et copiés au Louvre, se retrouve dans la coupe, les deux figures aux bras levés renvoient quant à elles aux travaux menés simultanément sur la première version de sa sculpture La cage (Fig. 2.). À la même époque, cette figure de femme est également traitée seule, en statuette autonome dont un bronze unique est tiré, mais aussi esquissée sur de nombreuses feuilles, griffonnée à même le mur de l’atelier, ou encore placée au centre d’un lustre à quatre branches. La multiplicité des supports participant à une même recherche révèle la cohérence du travail mené par Giacometti, et l’imbrication étroite de ses différents supports d’expression, qui se répondent et se complètent. D’autre part, le pied de la lampe coupe, composé d’une plaque rectangulaire posée en équilibre sur une base cubique, participe de la volonté de Giacometti de «faire partir les sculptures du sol quelles que soient leurs dimensions en évitant les socles amorphes». Pour se faire, il tente comme ici de «réaliser des figures dans un espace déterminé d’avance et dans des rapports fixes de dimensions avec cet espace» (lettre à Pierre Matisse, 28 décembre 1950). C’est peut-être à l’été 1950, alors que Pierre Matisse pose pour l’artiste aux pieds de La cage (Fig. 1.), qu’il découvre le sujet de la femme aux bras levés. Il fit ensuite l’acquisition de cette lampe avant d’en faire cadeau à Bernard et Jacqueline Monnier, quelques mois après leur installation dans leur premier appartement, boulevard de Clichy.
In 1922, Alberto Giacometti settled in Paris and began studying sculpture at the Académie de la Grande Chaumière. It may be that he first met Pierre Matisse during this period, when the latter still cherished the hope of becoming an artist and was studying painting at the same institution. Several years later, Pierre Matisse undertook his vocation as an art dealer, and soon made Giacometti's work known in the United States. Although there was talk of the two working together as early as 1936, the war forced the project to be put on hold, and it was not until 1948 that Pierre Matisse managed to organise the first exhibition in New York of Giacometti's sculptures, paintings and drawings. From that time on the two men enjoyed a close relationship. The artist would write long letters to his dealer, voicing both the deep concerns which haunted his artistic studies, as well as the most mundane of everyday preoccupations. The letters reflect a mutual trust and affection extending well beyond the professional arena, just as do the three works presented here (Lots 2-4). Acquired from the sculptor by Pierre Matisse, they were gifted by the latter on different occasions to his daughter Jacqueline and her husband Bernard Monnier, who would always treasure them.
Giacometti's first decorative objects date from the 1930s and his collaboration with interior designer Jean-Michel Frank. Later, towards the end of the 1940s, he accepted some private commissions to produce limited edition objects, such as the Lampe coupe aux deux figures (lot 2). While the goblet shares the purity of the Dogon and Egyptian art objects that the sculptor had long studied and copied at the Louvre, the two figures with raised arms bear resemblance to the work being carried out at the same time on the first version of his sculpture La Cage (Fig. 2). During this same period, the female figure was also treated in isolation, as a stand-alone statuette of which a single version in bronze was made. The figure was also sketched on numerous sheets of paper, scribbled directly onto the studio wall, and even placed at the centre of a four arm chandelier. The different types of media used, mirroring and complementing each other, were all part of the same research process and revealed the coherence of Giacometti's work. Moreover, the base of the goblet lamp, consisting of a rectangular ledge balanced on a cubic base, demonstrates Giacometti's desire to "make sculptures start from the ground regardless of their dimensions, avoiding amorphous plinths." To achieve this, he attempted, as in this case, to "make figures in a predetermined space and with fixed ratio of dimensions within that space", (letter to Pierre Matisse, 28 December 1950). It was possibly in the summer of 1950, when Pierre Matisse was posing for the artist at the foot of La Cage (Fig. 1.), that he discovered the subject of the woman with the raised arms. He went on to purchase the present lamp, before giving it to Bernard and Jacqueline Monnier a few months after they had moved into their first apartment on Boulevard de Clichy.