拍品专文
Augsbourg devient au XVIe siècle le plus grand centre d’art et d’artisanat de l’Empire où convergent artistes et artisans tels que ébénistes, armuriers, horlogers mais aussi graveurs et orfèvres venus de toute l’Europe. Ainsi la communauté d’orfèvres passe de 63 maîtres en 1555 à plus de 200 maîtres en 1594. Cette lente hégémonie s’explique par l’importance de l’évêché, la coexistence tolérée des catholiques et protestants, la multiplication des commandes impériales en commençant par le duc de Bavière Albert V (1528-1579) et ensuite Rodolphe (1567-1612) et la puissance des grandes familles issues de la finance. Cette diversité encourage ainsi une grande créativité stimulée par le talent des artisans et la qualité des commandes et donne ultimement naissance à un style particulier et reconnaissable ainsi que des modèles uniques tels que ces grands bassins repoussés de scènes mythologiques qui viennent définir l’orfèvrerie d’Augsbourg.
JOHANNES LENCKER
La famille Lencker compte au moins trois orfèvres à la fin du XVIe siècle dont deux sont reconnus comme les figures centrales du style transitionnel entre maniérisme et baroque en Allemagne du sud: d’abord David admit comme compagnon dans la guilde des orfèvres d’Augsbourg en 1575 et qui décède en 1613 et son jeune frère Johannes (1570-1637) admit à la maîtrise à Augsbourg en 1616.
Johannes a laissé un intéressant corpus d’objets suffisant pour confirmer son style: Rosenberg en liste 16 auxquels von Falke a ajouté l’aiguière en triton provenant de la collection Gutman et aujourd’hui au Rijksmuseum à Amsterdam, un bassin ovale et une aiguière assortie du Schatzkammer de Dessau, un autre bassin et une aiguière provenant du service de toilette du pape Paul V et enfin le bassin Europa provenant de la collection Rutschi et aujourd’hui dans celle du Prince de Fürstenberg.
Lencker n’a en revanche laissé aucun dessin suggérant qu’il se fournissait pour ses modèles auprès de peintres à la mode. Néanmoins il est aussi possible qu’il faisait appel à son beau-frère Lucas Kilian, le graveur le plus connu d’Augsbourg qui publie en 1606 un recueil de modèles pour orfèvres intitulé Die Goldschmidtkunst und vornehmsten Operation derselben…benebst Kunstreichen Ziereinfassungen vorgestellt.
LE STYLE AUGSBOURGEOIS : ENTRE MANIERISME ET BAROQUE
Le bassin est composé de manière à être placé verticalement comme une tableau pour apprécier la composition qui occupe tout le bassin et n’est pas divisée comme souvent en panneaux. Il illustre la transition entre le maniérisme et le baroque combinant des enroulements de style auriculaire, qui se développe au même moment aux Pays-Bas, avec des motifs repoussés souples qui annoncent déjà le baroque.
Ce bassin dit de Fortuna n‘est pas sans rappeler dans son traitement stylistique avec ces têtes de putto en relief et une scène centrale occupant toute la surface du fond, le bassin par Elias Drentwett également daté 1618-1619 et figurant au centre l’enlèvement de Proserpine d’après un tableau de Lambert Sustis commandé par l'archiduc Charles d’Autriche, le frère de l’empereur Ferdinand II ou encore le bassin de Tobias Kramer daté 1615 figurant l’histoire de Déjanire et Hercule aujourd’hui conservé au Musée de l’ordre Teutonique à Vienne (Nr. G.021).
ALLEGORIE DE L’EAU ET DE LA TERRE
La thématique allégorique avec ces deux nymphes, sans doute un choix du commanditaire, est probablement inspirée par l’œuvre d’un artiste à la mode tels que Hans Rottenhammer, Hans von Aachen ou encore Jan Brueghel. C’est certainement à ce dernier que la scène qui orne le bassin fait le plus penser, rappelant son allégorie de l’Eau et de la Terre initialement développée par son père pour une commande du cardinal et évêque de Milan, Federico Borromeo en 1608. Pourtant c’est une thématique mythologique de Fortuna et Salacie qui a donné son nom à ce bassin gravé sur l'envers ‘The Fortunate Bason’.
Christie's a vendu le 29 novembre 2007 à Londres sous le lot 595 une copie de ce bassin datée 1789 qui était gravée des armoiries de John, 1st Earl of Stradbroke (1750-1827) et fut présentée avec le plat de Lencker dans la vente The Earl and Countess of Stradbroke, Henham Hall, Suffolk; Prudential Fine Art Auctioneers; 10-12 Octobre 1988, lot 128.
During the 17th century Augsburg became the most important artistic centre in the Holy Roman Empire, attracting artists and artisans such as cabinet makers, gunsmiths and watchmakers from all over Europe. The goldsmiths’ guild expanded from 63 masters in 1555 to over 200 by 1594. This expansion could have been due to the importance of the bishopric, the coexistence of the Catholic and Protestant communities, imperial commissions from the Duke of Bavaria Albert V (1528-1579) and from Rodolphe (1567-1612) and the growing importance of the Augsburg banking families. All these factors encouraged artistic creativity stimulated by the goldsmiths’ talent and the quality of the commissions which ultimately led to the emergence of a unique and recognisable style exemplified by these large sideboard basins chased with mythological scenes that would come to define Augsburg silver.
JOHANNES LENCKER
The Lencker family counted at least three goldsmiths by the end of the 17th century, of whom two are acknowledged as central figures of the transitional style between Mannerism and Baroque in South Germany; David registered as a journeyman in Augsburg in 1575 and his younger brother Johannes (1570-1637) who registered his mark in Augsburg in 1616. Johannes left an important body of work which confirms his personal style. Rosenberg listed sixteen pieces; Falke added another four: the Triton ewer from the Gutman collection, now in the Rijksmuseum in Amsterdam, a ewer and an assorted basin in the Dessau Schatzkammer, another basin and ewer from Pope Paul V’s toilet service and the Europa basin from the Rutschi collection now with the Prince of Fürstenberg. Lencker apparently left no drawings or designs and probably resorted to using the models and designs of fashionable painters. He may also have worked with his brother-in-law Lucas Killian, a reputed Augsburg engraver who published a collection of his silver designs in 1606: Die Goldschmidtkunst und vornehmsten Operation derselben…benebst Kunstreichen Ziereinfassungen vorgestellt.
THE AUGSBURG STYLE : FROM MANNERISM TO BAROQUE
The basin is designed to be displayed horizontally very much like a painting as suggested by the composition, unlike the more usual one made of small panels. This basin illustrates well the stylistic transition from Mannerism to Baroque combining auricular scrolls, developed at the same time in Holland, with early Baroque embossed motifs.
It is very similar in style and composition to Elias Drentwett basin also dated 1618-1619 commissioned by Archduke Charles of Austria, Ferdinand II’s brother, which depicts the Rape of Prosperina after Lambert Sustis’s painting, or Tobias Kramer’s Deianira and Hercules basin dated 1615 now in Vienna Treasury of the Teutonic Order.
AN ALLEGORY OF WATER AND EARTH
The two nymphs featured in the centre may be the choice of the patron and are probably after the work of artists such as Hans Rottenhammer, Hans von Aachen or Jan Brueghel. The scene is certainly reminiscent of Brueghel’s Water and Earth allegory, first created by his father in 1608 for the Milan cardinal and bishop, Federico Borromeo, however, it is the mythological theme of the nymphs Fortuna and Salacia that gave this basin its name, as engraved on the underside ‘The Fortunate Bason’.
Christie’s sold in London on 29 November 2007 a copy of this basin dated 1789, engraved with the arms of John, 1st Earl of Stradbroke (1750-1827) first offered together with the Lencker basin in The Earl and Countess of Stradbroke, Henham Hall, Suffolk; Prudential Fine Art Auctioneers; 10-12 Octobre 1988, lot 128.